Hossein Tallal à la Galerie Atelier 21 : Portraits imaginaires et continuité dans le changement

Hassan Alaoui

Dans ce qui s’appelle la continuité dans le changement, oxymore si prisé de l’artiste, Hossein Tallal nous gratifie à partir de ce mardi 13 février et jusqu’au 20 mars d’une belle exposition de ses travaux, regroupés dans un répertoire intitulé « Portraits imaginaires ».

L’exposition, dont le vernissage est fixé ce mardi 13 février, aura pour cadre la Galerie d’art Atelier 21, à Casablanca. Autrement un lieu convivial, connu pour abriter le « nec plus ultra » de la création artistique, dont les cimaises ont vu défiler de grands peintres.

Les « Portraits imaginaires » incarnent une sorte de fil d’Ariane dans l’œuvre de Tallal, parce qu’ils constituent le thème fondateur en perpétuel devenir, et parce que l’artiste lui-même entend rester fidèle à sa méthode, à sa technique, aux croquis de visages et de héros apparentés à des personnages d’un cirque fellinien. Combien d’entre nous ne se reconnaissent-ils pas dans ces traits, peaufinés par le stylet à la finesse aiguë, ces silhouettes détachées du réel, figures emblématiques d’une fantasmagorie inouïe, un monde que pourrait décrire un certain Jorge Luis Borges dans son célèbre texte : « Le livre des êtres imaginaires », intitulé dans une première  de « Manual de zoología fantástica ».Plus qu’une centaine de créatures fantastiques sont recensées et présentés dans cette galerie qui est autant une œuvre d’art qu’un bestiaire littéraire.

Le point commun entre Borges et Tallal, quand bien même la comparaison paraîtrait fallacieuse, voire choquante, est le détail de l’anomalie, soulignée et mise en exergue. Une anomalie heureuse des personnages, la difformité qui est au monde ce que l’esthétique paradoxale est aux objets, ici les visages décalés, clownesques même. « Les reconnaissez-vous, ces êtres qui passent comme en rêve, parés de leur suffisance et de joyaux » ? s’est interrogé Maurice Arama, compagnon critique de Tallal.  « On reste figé devant ces figures de carnaval » !, ajoute-t-il. Voilà, le mot est lâché : carnaval.

Il sied d’autant plus bien à cette peinture si forte et exubérante qu’il n’est pas étranger à l’inspiration de l’artiste, plongée dans les espaces et les couleurs du Brésil, plus particulièrement dans la province du Salavador, à Bahia où sa mère Chaïbia avait exposé il y a quelques années et connu un vif succès. Hossein Tallal en garde les traces, de cette peinture colorée, il en a fait son « miel » avant de faire inscrire on art dans la technique du portrait et du visage. La gestuelle aidant, il donne à cette technique toute la dimension expressive, en rire, en songe, en tristesse. Si Toulouse-Lautrec est très présent dans sa quête, Tallal ne dédaignerait pas un Gustave Courbet, parce qu’il confère au corps ses mystères et ses douleurs ondulées. Le rire dans ses dessins est celui du fou, heureux et joyeux, dont la parole dit vrai !

Dans sa galerie casablancaise, véritable sanctuaire où cohabitent les arts de toutes sortes, s’alignent les portraits de son Musée imaginaire à la Malraux : Cherkaoui, Kacimi, Amine Demnati, Jilali Gharbaoui, Farid Belkahia, Mohamed Melehi, Miloudi, Elbaz, Tayeb Seddiki et bien d’autres. Le noir et blanc est leur socle, comme s’ils devaient se fixer sur un même registre, être sacrifiés au nom de l’éternité si sèche et sobre.

La galerie d’art Atelier 21 nous offre le privilège de revisiter une œuvre riche, représentée par quelque 27 toiles d’une extrême beauté, qui nous jettent et projettent dans l’intimité de l’un des derniers grands peintres de notre époque. Jusqu’au 20 mars, nous aurons le plaisir de côtoyer le travail d’un artiste qui reste fidèle à son style mais qui incarne aussi l’anticipation.

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