La politique survivrait-elle aux frasques ?

Il se passe quelque chose comme un déplacement des paramètres qui régissent notre vie nationale,  politique, sociale et morale. L’Establishment qui gouverne le Maroc semble céder devant la marée sociale, incarnée par les réseaux sociaux. C’est à se demander s’il y a encore une vie politique au sens littéral du terme !

Une démocratie proclamée, disons simplement un pays aspirant à la modernité, peut-il exister sans débat, sans confrontation entre ses composantes ? L’échiquier politique se compose de deux pôles majeurs, placés l’un face à l’autre, ils se regardent comme deux chiens de faïence sur une commode, s’épiant, s’évitant aussi. Quatre partis politiques, le PJD, le RNI, le MP, le PPS forment la majorité gouvernementale, chacun d’entre eux revendiquant sa propre légitimité et assumant – en solitaire, dira-t-on – la mission qui lui a été confiée. On peut même avancer que le gouvernement contient plusieurs gouvernements, c’est une sorte de « poupée russe »…

En face, une opposition constituée du PAM, de l’Istiqlal, de l’Union constitutionnelle et de l’USFP. On peut imaginer que le vœu du défunt Roi Hassan II de voir émerger deux pôles rivaux puissants a été exaucé. Les deux blocs, avec à leur lisière une trentaine de petits partis atomisés, sont enferrés dans des « politiques à la petite semaine »…

Sauf à nous faire prendre des vessies pour des lanternes, l’échiquier national est brouillé et ses cartes biseautées. Car, il n’y a plus aucune différence fondamentale entre l’une et l’autre formation, ni en termes de programmes, ni en termes de discours et de langage. Et si l’on avait encore une illusion à cet égard, il n’est que de regarder de près les réactions des uns et des autres des responsables des divers partis qui se sont cru interpellés par les dernières agressions, d’Inezgane et de Fès notamment, et qui se sont découvert des vertueux de défenseurs des libertés. Ils ont, à quelques décalages près, en particulier celui de Hamid Chabat, affiché la même réprobation.

La différence, qui est la caution de la diversité, du pluralisme et de l’alternance, est qu’il n’y a pas de différence. On assiste à un mimétisme discursif qui est la règle et le dominateur commun entre les partis, hormis quelques nuances suggérées ici et là. Mais au fond, de plus en plus, on assiste à un phénomène de récupération des thèmes, sociaux notamment et à une surenchère de séduction abattue sur les citoyens et la société civile qui s’exprime largement sur la toile.

Dans quelques mois, la campagne électorale pour les communales battra son plein. Cependant, d’ores et déjà les formations politiques se positionnent et construisent leur discours où, âpre concurrence oblige, ils devraient surenchérir encore et encore pour séduire. En attendant, le champ politique est dans l’expectative, soumis au spectacle, à la dérision et aux phrases assassines. Quand un Chabat reprend à son compte les paroles et les comportements et l’agression de cette foule déchaînée contre le jeune gay, essentiellement pour des raisons électoralistes, quand il considère que les agressions d’Inezgane et de Fès constituent un « détail », alors que Benkirane, Mézouar, Benabdallah et autres leaders les ont dénoncées, on en vient à se demander de quelle crédibilité le chef de l’Istiqlal, maire de Fès de son état, peut-il se prévaloir ?

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