Le MEN étonné de certains avis exprimés au sujet d’un prétendu retour en arrière concernant la place accordée à la philosophie

Le ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle se dit étonné que « des avis si tranchés se soient exprimés au sujet d’un prétendu retour en arrière sur la place accordée à la philosophie dans l’école marocaine », partant de préjugés concernant un texte dans le nouveau manuel scolaire de l’éducation islamique de la première année du Baccalauréat.

Dans un communiqué, où il apporte des précisions suite à la publication dans les médias de positions exprimées par certains acteurs de la société civile et certains intellectuels en relation avec la place de la philosophie dans l’école marocaine, le ministère s’étonne du choix fait par certains intervenants dans cette polémique de réduire les efforts fournis pour la révision profonde des manuels scolaires à la simple citation d’un « texte historique » pour des fins d’illustration et de débat d’idées.

« Des préjugés ont été émis sur les réalisations de cette opération de révision des manuels scolaires occultant de manière totale les changements profonds qui ont concerné le curriculum de l’éducation islamique », souligne le ministère, qui réagit ainsi aux diverses analyses publiées dans la presse traitant du cas du manuel scolaire de l’éducation islamique de la première année du Baccalauréat « Mannar Attarbiya Al Islamiya », et spécifiquement d’un module parmi quatre portant sur la relation de la foi et de la philosophie.

Les choix pédagogiques relatifs au nouveau curriculum d’éducation islamique ont pour objectif d’inculquer les valeurs de modération, de tolérance, de paix, d’altérité et d’amour de l’autre et de renforcer les valeurs universellement partagées dans leur dimension spirituelle, précise le ministère.

Le nouveau programme d’éducation islamique du cycle secondaire qualifiant comporte des thèmes dictés par le contexte socioculturel national et international, note le département de l’Education nationale, selon lequel ce curriculum a fait le choix de permettre aux élèves d’approcher des thèmes d’actualité à débattre dans un cadre correctement encadré, à l’intérieur de l’enceinte d’un établissement scolaire et sous la supervision des enseignants qui se conforment aux exigences du curriculum.

Ces exigences sont clairement définies dans les documents officiels publiés par le ministère et mis à la disposition des enseignants et des inspecteurs de la discipline, souligne la même source, qui précise que le nouveau curriculum d’éducation islamique, pour le niveau 1ère année du Baccalauréat, traite de quatre grands thèmes: « Foi et Métaphysique », « Foi et Science », « Foi et Philosophie » et « Foi et Civilisations ».

Le module « Foi et Métaphysique » se focalise sur le concept de la métaphysique, ses rapports avec la Foi et les retombées des croyances métaphysiques sur les perceptions et les comportements afin de se prémunir contre les dérives relatives à ce sujet et qui associent la métaphysique aux mythes, alors que celui portant sur « Foi et Science » traite de l’importance donnée à la science par l’Islam pour pallier à l’émergence de positions de désaveu de la science.

Pour « Foi et Philosophie », le curriculum précise que parmi les objectifs de ce module, il y a la nécessité d’insister sur le fait que la pensée philosophique renforce la raison et développe la pensée tout en réfutant l’idée de l’existence d’une contradiction entre la raison et la Foi, alors qu’à travers le module « Foi et Civilisations », le nouveau curriculum vise à inculquer dans le conscient et le comportement des jeunes le besoin de valoriser les valeurs universellement partagées et le devoir de consolider cet héritage humain et de promouvoir son rayonnement.

L’extrait du manuel scolaire objet de la polémique concerne une seule citation présentée dans le module « foi et philosophie » et utilisée comme illustration d’une position considérée par les auteurs dudit manuel comme violente envers la philosophie, précise le communiqué, selon lequel l’utilisation de cette citation fait partie d’un scénario pédagogique encadré par des « questions orientées » pour amener les élèves à faire des comparaisons entre les contenus de cette position décrite comme violente et des positions différentes qui considèrent que la raison et la pensée sont des outils pour aboutir à la vérité.

Ce manuel, à travers ce choix pédagogique clair et précis, vise à permettre aux élèves, sous l’encadrement de l’enseignant, de développer leur esprit critique et d’améliorer leurs compétences d’argumentation, tout en offrant un cadre adapté permettant le débat autour de thèmes « sensibles » avec une approche pédagogique sereine, poursuit le ministère. Débattre de ces sujets dans un espace scolaire encadré permet d’éviter le risque d’exposer les élèves à ces mêmes débats en dehors de l’école sans être outillés et réduit les possibilités d’exploitation des jeunes moyennant une apologie des positions « extrémistes » sans relation aucune avec les percepts de paix et de modération que prône l’Islam, estime la même source.

Le ministère précise dans ce contexte que le Maroc est l’un des rares pays qui enseigne cette matière comme discipline obligatoire pour tous les élèves, pendant les trois années du cycle secondaire qualifiant avec un volume horaire variant de 2 à 4 heures par semaine selon les filières et les options, ajoutant que la plupart des pays, dont des pays occidentaux, se limitent à enseigner la philosophie en dernière année du cycle secondaire, et des fois elle n’est pas obligatoire pour toutes les filières ou encore optionnelle.

Portant des sujets intellectuels fondamentaux avec des approches didactiques rénovées, le curriculum national de la philosophie est structuré autour de 8 modules: la philosophie, la nature et la culture, l’Homme, l’Action et l’Innovation, la condition humaine, la connaissance, la politique et la morale, relève le ministère, précisant que ces modules abordent de nombreux sujets tels que les repères de la pensée philosophique, la distinction entre la nature et la culture, la conscience et l’inconscience, la technique et la science, le travail et l’art, le droit et la justice, le devoir et le bonheur.

Ces sujets, explique le ministère, sont étudiés à partir d’une approche didactique basée sur la problématisation, la conceptualisation et l’argumentation en usant des opportunités qu’offre le débat d’idée dans la classe.

En présentant ces précisions, le ministère fait appel aux intellectuels, chercheurs, penseurs ainsi qu’à ses enseignants, qu’ils aient exprimé des positions critiques à l’encontre de certains contenus dudit manuel scolaire ou qu’ils aient interagi avec la polémique pour défendre la place de la philosophie, pour « prendre du recul avant d’émettre des jugements ne prenant pas en compte les exigences d’un travail scientifiquement basé, tel que l’élaboration de documents pédagogiques, en particulier les manuels scolaires ».

Pour aborder les sujets objet de discussions, débats ou controverse, les manuels scolaires doivent volontairement garantir des espaces de liberté, de diversité et de l’acceptation de l’autre, insiste le ministère, réitérant son engagement d’interagir positivement avec toutes les propositions et les critiques constructives pour l’amélioration de la qualité des curricula et des manuels de toutes les matières scolaires qui lui sont soumises.

Ces précisions du ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle font suite à un premier communiqué rendu public le 19 décembre dernier relatif aux manuels scolaires de l’éducation islamique.

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