PAM: De quel projet, Benchamach est-il le nom ?

Par Hassan Alaoui

On n’a pas encore fini de prendre la réelle mesure du « départ » orchestré  d’Ilyas El Omary du sommet du PAM, que déjà les interrogations fusent sur les capacités à diriger de celui qui le remplace.

L’élection de Hakim Benchamach à la tête du PAM ( Parti de l’Authenticité et de la modernité) est tout sauf une surprise. Adoubé , c’est le cas de le dire, par le parti et ses militants, poussé même par son prédécesseur Ilyas El Omari et les autres ténors, le président en exercice de la Chambre des Conseillers gravit manifestement les échelons d’une carrière politique qui aura commencé réellement – en tout cas officiellement – il y a seulement moins de dix ans et qui se poursuit sous de lumineux lampions.

Fait d’un bloc, dit-on, le nouveau « patron » du PAM réussira-t-il là où son « illustre » prédécesseur n’a pu le faire ? Autrement dit, apporter la réplique au Parti de la Justice et du développement (PJD), avec des méthodes nouvelles de gestion, un langage approprié à la nouvelle donne politique, ce sens de la mesure qui aura tant manqué à Ilyas El Omari et surtout un projet de société inédit capable de mobiliser les Marocains ? A vrai dire, la question essentielle qui taraude les esprits est de savoir quel changement le nouveau secrétaire général apportera-t-il , alors que, semble-t-il, presque la moitié des membres du parti n’ont pas pris part samedi à son élection et ont préféré déserter un scrutin qualifié de tournant ?

L’avenir nous dira ce qu’il en est de ce changement à la tête d’un parti censé rassembler les vocations et les talents nationaux, mais  qui , soi-dit en passant, voit se succéder à sa tête deux leaders originaires de la même région – le Rif. Ilyas El Omari et Hakim Benchamach – comme on l’a souvent dit – viennent de ce « gauchisme des années de plomb », et se sont fait forts d’investir la citadelle politique nationale, ils ont montré leur capacité à s’imposer dans un échiquier d’autant plus figé que les islamistes du PJD avaient cru le dompter. Le PAM a incarné et, peut-être incarne-t-il toujours une alternative à la suprématie du parti islamiste. Il est la deuxième force politique nationale en devançant les formations traditionnelles, anciennes ou nouvelles comme le Parti de l’Istiqlal, le RNI, le MP, l’USFP, l’UC et le PPS.

En moins de dix ans, il a cependant connu une série de changements à sa tête, soit quatre jusqu’ici, qui eurent pu faire croire à une quête de difficile stabilité. Mais qui, en réalité, témoignent d’un processus d’adaptation aux circonstances dans lesquelles la scène politique nationale évolue. L’élection de Benchamach à sa tête possède cette caractéristique qu’elle clarifie le champ, elle met fin à un ballotage meurtrier dans lequel l’a plongé Ilyas El Omary demeuré de longs mois caparaçonné au « pouvoir », persistant et signant au grand dam de certains des membres du parti. Il est sorti, somme toute, par la « grande porte » en délivrant ce dernier des fantômes de la ploutocratie. Le vote, pour le candidat favori que fut Benchamach, est clair : il ne signifie pas seulement une relative victoire, non plus un blanc-seing accordé après une âpre bataille, mais plutôt une mission voire un défi. Le nouveau secrétaire général aura du « pain sur la planche » et, surtout, devra réconcilier les sensibilités au sein du parti, redonner confiance à toutes celles et tous ceux qui, par dépit ou poussés, se sont éloignés de son activité ou encore mieux n’assumaient pas les orientations et les choix que l’ancien secrétaire général lui imprimait.

Le marqueur étant désormais le scrutin législatif de 2021, Abdelhakim Benchamach n’a plus que deux ans – un peu moins même – pour préparer son parti à cette échéance fondamentale, en principe censée être l’enjeu majeur et structurel pour une transition politique inéluctable. Quatre « grands » partis au moins croiseront le fer, le PJD, le PAM, le RNI et l’Istiqlal , ils affûtent d’ores et déjà leurs armes avec des ambitions, certes annoncées différemment, mais tendant tous à prendre la relève des islamistes. Rien n’est moins sûr, en effet, que de préjuger de ce que sera l’échiquier politique dans deux ans. Toutefois, en épure se dessinent d’ores et déjà l’affrontement prévisible et, à coup sûr, les reclassements collatéraux habituels. Rassembler, concilier, rédimer les hommes, renforcer un modèle de gouvernance inédite, voilà entre autres ce qui attend le nouveau secrétaire général du PAM, tout à sa bonhomie et à sa sagesse proverbiale.

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