XXVIIIÈMESOMMET DE L’UA À ADDIS ABÉBA : Maroc, le come-back

Les 30 et 31 janvier, se tiendra, à  Addis Abéba, le 28ème Sommet  de l’Union africaine dont l’ordre du  jour sera, à coup sûr, dominé par l’entrée  en scène du Royaume du Maroc. S’il avait  quitté l’OUA, en novembre 1984, lors d’un  Sommet plutôt houleux, organisé dans la  même ville, le Maroc entre de plain-pied  dans l’Union africaine, son héritière et créée  en juillet 2000 au Sommet de Lomé. Trente  quatre ans ont passé depuis que le Maroc a  claqué la porte de l’OUA et dénoncé l’une  des plus calamiteuses injustices, pour ne pas  dire la malveillante escroquerie d’un certain  Edem Kodjo, ci-devant secrétaire général  de l’organisation panafricaine, consistant à  y faire entrer la « rasd » et donc à jouer au  proconsul du gouvernement algérien.

Le départ du Maroc de l’OUA avait sonné  le glas d’une époque et, bien entendu, ouvert les portes à un désastreux aventurisme  dans lequel semble avoir excellé une diplomatie algérienne, inspirée et véhicule du  cynisme radical. L’histoire nous rattrape,,  elle nous tire par la nuque : la création de  l’Organisation de l’unité africaine ( OUA)  remonte aux années cinquante du siècle  dernier et le rôle du Maroc y fut d’autant  plus déterminant qu’il en était l’un des tout  premiers cofondateurs et les plus engagés  à construire un groupement géopolitique  capable, à l’époque, de former un bloc anticolonial homogène. L’esquisse de ce bloc  dont l’uniformité sera peaufinée au fur et à  mesure, avait été dessinée à Casablanca, dès  l’année 1960,, sous l’égide du Roi Mohammed V, Kwamé N’Krumah, Ahmed Sékou  Touré, Modibo Keita, Gamal Abdel Nasser  et un représentant du Roi Idriss 1er ( Senoussi) de Libye. Plus tard, dans la perspective d’édification et de renforcement de ce  groupe, Farhat Abbès, président du GPRA  (Gouvernement provisoire de la République  algérienne) s’y joindra.

Le même Farhat Abbès, en sa qualité de  président de la future Algérie indépendante,  avait été reçu, quelques mois avant, la libération de son pays par le Roi Hassan II à  Rabat . Tous deux convenaient que les négociations sur les frontières et les territoires  du sud-est marocain spoliés par la France  – et remis plus tard arbitrairement à l’Algérie – devaient être reportées sine die, ou  simplement après la libération de l’Algérie,  le Maroc faisant de sa mauvaise fortune bon  cœur. Les deux dirigeants avaient même  signé un accord formel le 6 juillet 1961 où il  est explicitement stipulé que « les frontières  sahariennes héritées de la colonisation par  l’Algérie ( au dépens du Maroc) ne seront  pas opposables au Maroc ».

Au motif que les combattants algériens,  qui avaient fait d’Oujda leur base arrière  militaire, devaient prioritairement recouvrer  leur indépendance, aussi bien Mohammed  V que Hassan II avaient donc décidé de  différer les revendications sur nos territoires et nos frontières. Ces territoires sont  Tindouf, Bechar,Touat, Saoura, Kenadssa  entre autres. Tant et si bien qu’une fois libérée, l’Algérie s’employa non seulement  à renier ses engagements, mais à combattre  le Maroc. Il est vrai qu’entre temps celui  qui aura été devant l’histoire, le tout premier président de l’Algérie indépendante,  Ferhat Abbès, – signataire de l’accord avec  le Maroc – avait été écarté du pouvoir par  Ben Bella et ses complices dont l’une des  premières graves décisions fut non seulement de dénoncer l’accord, mais de faire la  guerre au Maroc en octobre 1963.

On ne s’étonnera donc pas que, dans la  foulée, lors de la création de l’OUA et de  la ratification de la Charte par seulement 31  Etats – l’Afrique du sud n’en faisant pas partie – , le Royaume du Maroc ait imposé aux  rédacteurs une clause significative sur « les  frontières héritées de la décolonisation par  les Etats devenus indépendants » ! Ministre  des Affaires étrangères du Maroc à l’époque  et représentant dépêché par le Roi Hassan II  à Addis Abéba, Ahmed Balafrej imposa une  « nette réserve » de « non reconnaissance  voire de contestation » des frontières léguées par la France que le Maroc n’entérinera jamais. Pendant des années, la Charte de  l’OUA a donc comporté, comme une mauvaise conscience, ce principe fondamental  de contestation dans son texte que l’Algérie  a combattu de toutes ses forces. De concert  avec les gouvernements sud-africains successifs, l’Algérie s’est acharnée à verrouiller  un éventuel retour du Maroc sur la scène  africaine. En vain.

Lorsqu’est venu le temps de fondre  dans les oubliettes l’ancienne OUA pour  la remplacer à partir de 2000 par l’Union  africaine, à Durban et à Lomé, une volonté  de barrer la route au Maroc a été d’autant  plus exprimée que c’est Thabo Mbeke ,  président de l’Afrique du sud et fossoyeur  de l’héritage de Mandela, qui en devint le  premier président mais aussi le porte drapeau de l’antimarocanisme. Son successeur,  qui n’est autre que le satrape Jacob Zuma  et son égérie de femme, Nkosazana Dlamini-Zuma, présidente de la Commission  de l’UA depuis 2012 et pressentie comme  future présidente de l’Afrique du sud, en  sont devenus le fer de lance. Ce qu’il faut  rappeler à Thabo Mbeke, à Jacob Zuma et  Dlamini Zuma, est le rôle joué tout au début  des années soixante par les Rois du Maroc,  feux Mohammed V et Hassan II dans le soutien à l’ANC ( African National Congress),  le parti politique que présida notamment  Nelson Mandela. Il avait pignon sur rue, à  Rabat, comme aussi les leaders des autres  mouvements de libération comme le MPLA  d’Angola, le Front de libération mozambicain. Il n’est pas jusqu’à Joaquim Chissano  du Mozambique qui n’ait eu la qualité d’un  « hôte permanent de feu Hassan II », logé  et pris en charge longtemps à l’hôtel Balima de Rabat. La guerre froide a déplacé les  lignes, certes, mais le Maroc a bel et bien  été au cœur des mouvements de libération  africains…

Responsables algériens et sud-africains  se sont donc employés depuis dix-huit ans  maintenant à renier au Maroc son droit  de réintégrer l’Union africaine. Ils n’y  croyaient pas si bien faire ! Car le Maroc  va réintégrer l’Union africaine alors que la  Commission est encore présidée par Damini  Zuma, la piètre entraveuse. En juillet dernier, Paul Kagamé, président du Rwanda,  s’est rendu en visite officielle au Maroc et  s’est entretenu plusieurs fois avec le Roi  Mohammed VI, notamment du retour du  Maroc au sein de l’UA. Cette visite a constitué un acte fondateur dans ce sens, et depuis  lors, appuyé sur une vision royale, il donnera au Royaume du Maroc les arguments  et la légitimité nécessaires.

Le Roi Mohammed VI , tout à son audace  et à sa maîtrise de la Realpolitik, a indiqué  «qu’après réflexion, il nous est apparu  évident que quand un corps est malade, il  est mieux soigné de l’intérieur que de l’extérieur»

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