La régulation des champs cultuels et religieux : Le smart power marocain pour l’intégration régionale en Afrique
La diplomatie spirituelle du Royaume tire sa substance des spécificités du « modèle cultuel marocain ». Ce dernier est de plus en plus prisé, dans un contexte international, marqué par la prolifération des courants extrémistes violents.
Le Maroc, avait très tôt engagé une dynamique interne de lutte contre la radicalisation, par le biais d’une réforme du champ religieux, menée à plusieurs niveaux. L’offre du Maroc d’un islam « modéré » et « moderne », respectueux de la stabilité et de la légitimité des Etats, séduit, à un moment où d’autres courants comme le salafisme ou le wahhabisme, prônent une pensée radicalisante, ayant entraîné des pays et des populations dans une spirale de violence.
De ce fait, en se positionnant comme acteur géopolitique de dimension continentale, le Maroc réagit à l’insécurité régionale et mondiale liée à la menace terroriste en s’appuyant sur une politique « religieuse» déployée en tant qu’outil de valorisation du capital religieux du pays d’une part, et visant à bâtir une politique dont le socle est la prévention, par une maitrise et un contrôle du religieux et des discours qui y sont liés d’autre part.
Le smart power marocain
Face à la montée de l’extrémisme violent, le domaine religieux constitue ainsi un pilier et une spécificité du modèle de coopération Sud-Sud, prôné par le Maroc avec ses partenaires africains, qui partagent avec le Royaume l’inquiétude de voir se développer des modes de religiosité menaçantes, tant pour la cohésion sociale que pour les fragiles équilibres sociopolitiques de la région.
S’appuyant sur le « lead » d’un patrimoine religieux et spirituel partagé, le Maroc a pu asseoir une présence remarquée et une certaine influence dans les débats sécuritaires au Sahel, où il n’a pas à proprement parler une présence stratégique. Son outil, par excellence, est une stratégie d’influence dont le religieux, son contrôle et l’exportation d’un modèle « rassurant », est le socle.
Depuis deux décennies, un nouvel élan de politique étrangère prend forme au Maroc, par l’élaboration d’un nouveau « génie diplomatique » marocain global, multidimensionnel et évolutif, assimilant proaction et consolidation des acquis. L’action du Royaume illustre son engagement constant pour le renforcement de la stabilité et la sécurité des Etats en Afrique, en vue d’asseoir des espaces de paix et de prospérité partagée, dans le respect des paramètres fondamentaux que sont, la résolution pacifique des différends, le respect de la souveraineté des Etats et la préservation de leur intégrité territoriale, leur identité culturelle et cultuelle.
La démarche diplomatique du Maroc en Afrique subsaharienne s’appuie, certes, sur les moyens classiques, mais aussi sur une diplomatie relevant davantage du « soft power ». Une stratégie qui, alliant, puissance et influence, s’articule autour d’une approche sécuritaire d’une part, et sur une démarche transversale qui fait interagir le politique, l’institutionnel et le législatif, l’économique et le social, le culturel et le cultuel, d’autre part.
Cette stratégie serait plus justement qualifiée de « smart power marocain », puisqu’elle favorise l’interaction productive entre les notions, bien connues, mais peu opérantes isolément, de « hard power », un pouvoir de coercition par la force ou la menace, incarné par l’approche sécuritaire, et de « soft power », un pouvoir d’attraction, porté par l’approche sociale et culturelle qui fonctionnent comme appui à l’approche cultuelle. Le résultat de cette addition est ce mélange d’habileté et d’expérience que l’on nomme désormais « smart power » ou «pouvoir intelligent ».