Société civile : quel engagement pour une action citoyenne solidaire?
Dossier du mois
Les jeunes et leur rôle dans l’émergence de la société civile au Maroc
Houssam Hatim, Chroniqueur, Coordinateur national des jeunes d’Amnesty Maroc
Le concept de la société civile, lui-même se banalise, et ce, puisque son usage, est de plus en plus fréquent. Et donc, en s’y confrontant, on risque d’avoir une vague idée de sa signification. Etant dans l’air du temps, comme on peut la retrouver chez Marx, la société civile s’inscrit dans un espace public, distinct de l’Etat au sein de la société, à l’intérieur duquel des rassemblements des citoyens exercent des activités autonomes, collectives et structurées, suivant leurs centres d’intérêts visant une réciprocité des échanges et la poursuite des objectifs communs ; où on retrouve des intérêts souvent contradictoires, voire conflictuels. Ceci dit, la société civile ne peut être homogène. Diversifiée et polymorphe, ses composantes demeurent variables au gré des forces qui la composent. Au Maroc, il n’est pas à cacher leur manque de visibilité et (surtout) de lisibilité dans l’espace public.
Malheureusement, au Maroc, comme dans tout le Continent Africain, le rôle des associations, des ONG, des Think Tank et des réseaux sociaux est toujours sous-estimé. Comme leur utilité ne fait aucun doute, aujourd’hui d’ailleurs, j’aspire à ce qu’ils deviennent des puissances vouées à la recherche de nouvelles idées, à l’étude et à l’émission des propositions. Fondamentalement, ils doivent être indépendants de la société politique où se tiennent les décisions. Fournir des solutions relatives au bien commun, défendre, plaider pour le meilleur intérêt du peuple sans aucune tentative à la participation au pouvoir politique ni la tentation de le conquérir, est, à mon sens, leur rôle. Finalement, je me permets de dire qu’ils devront prendre conscience de peser sur l’avenir de la société et de trouver de nouvelles formes d’actions, des visions et des solutions aux problématiques pour contribuer à la bonne gouvernance. Ce qui nécessite l’élargissement de leur champ d’intervention pour qu’ils puissent jouer le rôle de « médiation » qu’ils peuvent être amenés à jouer entre des parties opposées, comme le disait R.N. Haass sur les Think Thank. En ce qui me concerne, je dirais que la société civile peut se substituer aux formations politiques. Puisque sa vocation est bel et bien de créer un impact social dans la vie publique, les acteurs de la société civile sont impliqués dans la politique sans pour autant viser des fonctions étatiques. D’après ma connaissance, la société civile se caractérise fondamentalement par son attitude collective de refus de subordination de la part des organisations ayant une action sociale et aux formations politiques. Son indépendance lui permet d’assurer plus de légitimité dans la prise de position afin de veiller à la prise en compte des revendications sociales et être un contre-pouvoir. Dans le cas échéant, le champ d’action des tenants du pouvoir s’agrandit et surgissent avec lui les prémices d’une toute puissance étatique. Cela fait perdre à la société civile sa représentativité, et détruit la condition de son existence, voire de la démocratie. Et donc, cesse d’être un contre-pouvoir.
Autrement, comment peut-on imaginer la place de la société civile dans l’affermissement de la démocratie ? Je dirais que tout résulte de ce que l’on entend par la démocratie. Personnellement, et comme inscrite dans mon imaginaire, la démocratie ne se construit pas tel un meccano. Elle est un projet sans cesse à construire qui implique la liberté d’opinion, le respect des droits des « minorités », la confrontation pacifique des idéologies… etc. Et donc – il faut le rappeler – la liberté d’organisation, l’Etat de droit, la responsabilité des gouvernants. Perception bien subjective, j’en conviens, mais qui me semble logique. Cela suppose des pouvoirs et contre-pouvoirs, et donc, un espace libre, celui que la société civile forte et indépendante est censée occuper. Ce disant, la société civile contribue non seulement à l’affermissement de la démocratie en agissant tel un acteur de l’essor de celle-ci, mais son édification est également, disons-le, au coeur de tout processus de démocratisation.