Arabie saoudite: trois princes arrêtés pour « complot » contre le prince héritier

Les autorités saoudiennes ont arrêté trois princes, dont le frère et le neveu du roi Salmane, accusés d’avoir comploté pour renverser le puissant prince héritier Mohammed ben Salmane, dirigeant de facto du pays, ont indiqué samedi trois sources à l’AFP.

Ces arrestations, qui illustrent le renforcement de l’emprise sur le pouvoir du prince héritier en balayant ses derniers potentiels opposants, interviennent dans un contexte sensible pour ce pays ultradépendant du pétrole, confronté à la chute des prix de l’or noir et obligé récemment de limiter l’accès aux lieux saints musulmans, sources de revenus importantes du royaume, en raison du nouveau coronavirus.

La garde royale a arrêté vendredi le prince Ahmed ben Abdelaziz al-Saoud, frère du roi, ainsi que le neveu du monarque, le prince Mohammed ben Nayef, accusés d’avoir préparé un coup d’Etat pour évincer le prince héritier, ont indiqué un responsable arabe et un responsable occidental à l’AFP.

Le frère cadet du prince Nayef, Nawaf ben Nayef, a lui aussi été appréhendé, ont ajouté ces sources sous couvert de l’anonymat.

Selon le responsable occidental, qui affirme citer des sources au sein du gouvernement saoudien, des militaires et des responsables du ministère de l’Intérieur accusés de les soutenir ont aussi été arrêtés.

« Avec cette purge, aucun rival ne reste pour empêcher le prince héritier d’accéder au trône », a-t-il ajouté.

Ces arrestations ont soulevé des questions quant à la santé du roi Salmane, âgé de 84 ans, et sur la possibilité que Mohammed ben Salmane lui succède bientôt, mais selon les déclarations à l’AFP d’une autre source proche des dirigeants saoudiens, « le roi est en bonne santé et va bien ».

Le prince héritier est « aux commandes » et la purge a été menée « après l’accumulation de comportements négatifs des deux princes », a indiqué cette source sans donner plus de détails.

Le Wall Street Journal, quotidien américain qui a le premier fait état de ces arrestations, avait indiqué que les princes Ahmed et Nayef — autrefois prétendants au trône — pourraient encourir la peine de mort ou la perpétuité.

Le lieu dans lequel ils sont détenus reste inconnu.

Ces dernières années, le prince héritier a consolidé son emprise sur le pouvoir en emprisonnant d’éminents religieux et militants mais aussi des princes et d’influents hommes d’affaires.

Considéré comme dirigeant de facto du pays puisqu’il contrôle les principaux leviers du gouvernement, de la défense à l’économie, Mohammed ben Salmane est aussi connu pour sa volonté de piétiner toute trace de dissidence interne avant d’accéder formellement au trône.

Son image de réformateur a été grandement ternie par le meurtre du journaliste saoudien, critique du pouvoir, Jamal Khashoggi au sein du consulat d’Arabie saoudite à Istanbul en octobre 2018 qui a entraîné un torrent de critiques à l’international.

« Le prince Mohammed s’est enhardi –il a déjà évincé toutes les menaces à son ascension et emprisonné ou tué les voix critiques de son régime sans aucune répercussion », explique Becca Wasser, analyste politique à la RAND Corporation, basée aux Etats-Unis.

« C’est un pas supplémentaire pour consolider son pouvoir et un message à quiconque –aussi au sein de la famille royale– voudrait le provoquer », ajoute l’experte.

Mohammed ben Salmane avait évincé le prince Nayef, ancien prince héritier et ministre de l’Intérieur, en 2017 en prenant sa place. Plusieurs médias occidentaux avaient alors affirmé que le prince Nayef avait été placé en maison d’arrêt, ce que les autorités avaient démenti.

Septuagénaire, le prince Ahmed était rentré au royaume depuis Londres après l’éclatement du scandale Khashoggi, une décision qui avait été interprétée par certains comme une volonté de montrer son soutien à la monarchie.

Peu avant son retour en octobre 2018, le prince Ahmed avait lancé, selon une vidéo largement diffusée sur internet, à des protestataires qui scandaient contre l’implication de l’Arabie saoudite dans le conflit au Yémen: « Qu’est-ce que la famille à voir avec ça? Certains individus sont responsables (…) le roi et le prince héritier ».

Ce commentaire avait été perçu par certains comme une des rares critiques à l’adresse des plus hauts dirigeants du royaume, mais l’intéressé avait balayé une telle interprétation comme « inexacte ».

« L’arrestation de plusieurs princes mécontents (…) reflète un mécontentement croissant à l’égard du « Fils Roi » au sujet de son hégémonie méprisable et de ses politiques sociales, économiques, étrangères et religieuses », a déclaré de son côté Madawi al-Rasheed, un universitaire saoudien basé à Londres.

Avec AFP

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