Une attaque « chimique » fait 58 morts en Syrie, le régime pointé du doigt

Une attaque chimique présumée a fait mardi au moins 58 morts et quelque 170 blessés, dont de nombreux enfants saisis de convulsions et peinant à respirer, dans une ville rebelle en Syrie.

Cette attaque aérienne a provoqué une vague d’indignation internationale, Paris et Londres pointant du doigt le régime de Bachar al-Assad et réclamant une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU.

Les frappes ont visé très tôt un quartier de Khan Cheikhoun, une petite ville située dans la province d’Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie, place forte des rebelles et des jihadistes.

« Nous avons entendu des bombardements (…) Nous avons accouru dans les maisons et il y avait des familles mortes dans leur lits. On a vu des enfants, des femmes et des hommes morts dans les rues », a raconté à l’AFP un témoin, Abou Moustapha.

Des vidéos de militants anti-régime ont montré des corps sans vie sur la chaussée, d’autres pris de spasmes et de crises de suffocation.

Les victimes « ont les pupilles dilatées, des convulsions, de la mousse sortant de la bouche », a expliqué Hazem Chahwane, un secouriste interviewé par l’AFP dans l’un des hôpitaux de la ville. Au moins 11 enfants figurent parmi les 58 morts, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).

Il s’agit de « la deuxième attaque chimique la plus meurtrière du conflit en Syrie » après celle ayant fait plus de 1.400 morts en 2013 près de Damas, a précisé cette ONG, qui n’était pas en mesure de déterminer la nature du gaz toxique utilisé.

L’envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie Staffan de Mistura a déclaré que l’ONU allait chercher à « clairement identifier les responsabilités » et à faire « rendre des comptes » aux auteurs de cette attaque « chimique ». L’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) a pour sa part indiqué « rassembler et analyser des informations de toutes les sources disponibles ».

Le régime n’avait pas officiellement réagi en fin de journée, mais une source de sécurité à Damas a dénoncé une « calomnie ». « Les hommes armés tentent de remporter une (victoire) médiatique après avoir échoué à remporter (une victoire) sur le terrain », a-t-il ajouté, en faisant référence aux groupes rebelles.

L’armée russe, principale soutien du régime, a affirmé n’avoir mené aucun raid aérien dans la zone touchée.

Pour l’opposition syrienne, il ne fait pas de doute que le régime a utilisé des « obus contenant du gaz chimique ». Ce « crime horrible » rappelle l’attaque de l’été 2013 que la communauté internationale avait « laissé impunie », a-t-elle dénoncé.

L’opposition a prévenu que cette attaque « remettait en cause » le très fragile processus de paix engagé ces derniers mois à Genève pour tenter de mettre fin au conflit de six ans.

Pour le président français François Hollande, « une fois encore le régime syrien va nier l’évidence de sa responsabilité dans ce massacre ».

« Si nous ne pouvons pas encore être certains de ce qui s’est passé, cela a toutes les caractéristiques d’une attaque du régime qui a utilisé de façon répétée des armes chimiques », a déclaré de son côté le ministre britannique des Affaires étrangères Boris Johnson.

A Khan Cheikhoun, le correspondant de l’AFP a vu des soignants tenter de secourir une fillette, mais en vain. Son père, écrasé par la douleur, l’a prise dans ses bras, a embrassé son visage et l’a portée dans ses bras hors de l’hôpital.

Le journaliste a vu des patients avec de la mousse sortir de leur bouche. Certains d’entre eux étaient aspergés d’eau par les médecins qui tentaient de les réanimer.

L’hôpital dans lesquels ils étaient soignés a été bombardé mardi à deux reprises, provoquant d’importantes destructions et la fuite précipitée de médecins.

Le gouvernement syrien dément utiliser des armes chimiques dans une guerre qui a déjà fait plus de 320.000 morts depuis mars 2011. Il a ratifié la Convention sur l’interdiction des armes chimiques en 2013.

En octobre 2016, le Conseil de sécurité avait reçu un rapport concluant que l’armée syrienne avait mené une attaque à l’arme chimique, sans doute du chlore, à Qmenas, dans la province d’Idleb, le 16 mars 2015.

Après l’attaque de 2013, un accord russo-américain sur le démantèlement de l’arsenal chimique syrien avait écarté in extremis la menace de frappes américaines contre le régime.

Au moment où les espoirs de paix restent faibles, Bruxelles accueille jusqu’à mercredi une conférence internationale sur l’avenir du pays mais certains acteurs clés du conflit, comme la Turquie ou la Russie, ne devraient pas y être représentés au plus haut niveau.

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