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Baisse de l’inflation au Maroc : un soulagement en trompe-l’œil pour les ménages

Par Hajar Ben Hosain

Alors que l’indice général des prix à la consommation affiche une légère inflexion à la baisse, les produits de première nécessité continuent d’échapper à la détente. En avril, les ménages marocains ont vu leur pouvoir d’achat toujours sous pression, notamment du fait de la persistance de prix élevés sur certains aliments de base.

 Selon les données publiées par le Haut-Commissariat au Plan (HCP), l’indice des prix à la consommation (IPC) a reculé de 0,3 % entre mars et avril 2025. Cette baisse modérée s’explique par une diminution de 0,6 % des prix des produits alimentaires, conjuguée à une baisse plus marginale (-0,2 %) des produits non alimentaires. Dans le même temps, l’inflation sous-jacente — qui exclut les produits à prix volatils ainsi que les produits réglementés — a elle aussi reculé de 0,2 % sur un mois. Sur une base annuelle, elle reste toutefois en progression de 1,2 %.

Derrière ces indicateurs globaux, une lecture plus fine révèle d’importantes disparités sectorielles. Certains produits alimentaires ont en effet vu leurs prix chuter, contribuant à la baisse globale de l’IPC : les poissons et fruits de mer (-4,5 %), les viandes ainsi que le lait, le fromage et les œufs (-2,6 %), les huiles et graisses (-1,0 %) ou encore les céréales et produits boulangers (-0,3 %).

Mais dans le même temps, d’autres postes de consommation essentiels ont vu leurs tarifs s’envoler. Les fruits ont enregistré une hausse de 4,9 %, les légumes de 0,6 %, et les boissons chaudes telles que le thé, le café et le cacao de 0,2 %. Des augmentations qui affectent directement le panier de la ménagère, rendant plus difficile encore la perception d’un allègement réel de la pression inflationniste.

Lire aussi : Maroc : l’inflation ralentit à 0,9% en 2024

Les produits non alimentaires, quant à eux, ont connu une baisse significative des prix des carburants (-3,4 %), contribuant à amortir partiellement la hausse globale. Mais d’autres secteurs affichent des tendances opposées : les prix des restaurants et hôtels ont ainsi progressé de 4,4 % sur un an, tandis que ceux des transports reculaient de 4,0 %, reflétant une dynamique contrastée.

Cette évolution des prix s’inscrit dans un contexte agricole particulièrement tendu. Les aléas climatiques — sécheresse persistante, grêle, températures hivernales anormalement basses — ont compromis les rendements de nombreuses cultures maraîchères. Les filières les plus touchées concernent les tomates, les pommes de terre, les oignons et plus largement l’ensemble des légumes de saison. La réduction de l’offre locale, dans un pays où une part importante de la consommation repose encore sur les circuits courts, a mécaniquement exercé une pression à la hausse sur les prix.

À cela s’ajoute une campagne d’exportation soutenue vers des marchés extérieurs en croissance — notamment les pays du Sahel, la Mauritanie et l’Europe — qui limite davantage les volumes disponibles sur le marché intérieur. Tenus par des contrats internationaux, assortis de pénalités en cas de non-respect, les producteurs privilégient l’exportation à la satisfaction de la demande locale, accentuant le déséquilibre.

En parallèle, certains éléments externes semblent avoir contribué au reflux de l’inflation. D’après plusieurs observateurs relayés par la presse économique, la baisse des cours du pétrole sur les marchés mondiaux a allégé la facture énergétique nationale, avec un effet de transmission partiel sur les prix à la pompe. Par ailleurs, la baisse des prix des produits manufacturés chinois exportés vers le Maroc — stratégie commerciale déployée par Pékin pour compenser sa perte de compétitivité en Europe — aurait également pesé à la baisse sur l’inflation importée.

Toutefois, ces tendances restent fragiles et inégalement ressenties par les populations. En dépit de la décélération de l’inflation globale, le ressenti des ménages reste marqué par la cherté des produits de base. Pour une majorité d’entre eux, le quotidien demeure contraint, et le répit annoncé par les indicateurs macroéconomiques semble, pour l’heure, largement illusoire.

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