Ban Ki-moon et le Sahara : les raisons du report d’une visite

Une fois pour toutes, comme aussi pour mettre un terme au suspense, annonce plus ou moins officielle vient d’être faite au sujet de cette visite controversée du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, dans la région : viendra, viendra pas ! En  s’alliant au principe d’une visite dans la région, il devait se rendre, successivement, à Alger, Tindouf, Rabat, Lâayoune et Nouakchott . Aussi paradoxal que cela eût paru, c’est, à sa décharge, une reconnaissance et une confirmation sous-jacente que le différend oppose le Maroc et l’Algérie d’abord…La visite a été annoncée au niveau du Conseil de sécurité au mois de décembre dernier.

Ban Ki-moon a reporté sa visite au Maroc au mois de juillet, à la barbe des dirigeants algériens qui s’étaient empressés de jubiler et de s’étouffer de joie. Le secrétaire général de l’ONU pourrait donc se rendre, le 7 mars seulement, en Algérie et en Mauritanie. Les calculs algériens sont, de ce fait, contrariés. Le gouvernement algérien et sa presse ont pavoisé et pavoisent toujours, car, à leurs yeux, la visite de Ban Ki-moon au Sahara – ils n’ont pas arrêté de le souligner – allait lui offrir le spectacle d’un territoire « occupé, colonisé, d’un peuple soumis, terrifié, appauvri, réprimé… ». Ils n’ont eu de cesse de tirer des plans sur la comète, comme on dit.

La visite de Ban ki-moon à Lâayoune, si elle devait avoir lieu en mars, correspondrait certainement à un agenda algérien : elle serait intervenue un mois avant avril, date à laquelle le Conseil de sécurité des Nations unies organise, comme chaque année, un débat sur l’affaire du Sahara, prend acte du rapport que lui soumet le secrétaire général que Christopher Ross, son envoyé spécial propose, et vote les résolutions dont notamment le paragraphe concernant la prorogation du mandat de la MINURSO ( Mission de l’ONU au Sahara) chargée du « maintien de la paix ».

Il se trouve que les séparatistes du polisario – avec le soutien des services algériens – n’allaient pas demeurer inactifs pendant la visite de Ban Ki-moon à Lâayoune. On le sait, on l’a vécu le 10 novembre 2010 à Gdim Izik, à 12 kms à l’est de Laâyoune, lorsque les sympathisants du polisario, sans crier gare, ont – contrairement à ce qui a été avancé et défendu, y compris par la presse étrangère dite crédible – attaqué les forces de l’ordre. Ils avaient multiplié à dessein les provocations, brûlé des voitures, incendié des lieux publics et – des photos explicites l’on montré – frappé à mort des représentants des forces auxiliaires. Evidemment , les propagandistes d’Alger se sont empressés d’instrumentaliser ces événements tragiques bien fomentés, exerçant des pressions sur les médias internationaux, les ONG voire certains gouvernements.

Depuis lors, avec une mauvaise foi caractérisée, le pouvoir algérien se fait fort d’instrumentaliser le thème des prétendues « violations des droits de l’Homme au Sahara », parvenant même à le glisser dans le débat du Conseil de sécurité de l’ONU en avril 2014 et, non sans obsession, de vouloir imposer que la tâche de la MINURSO, qui est essentiellement d’assurer la paix, soit élargie à l’application des droits de l’Homme.

Le pouvoir algérien et les stipendiés du polisario espéraient donc voir éclater les violences lors de la visite de Ban Ki-moon, à Lâayoune. Cela ne fait aucun doute, et si c’est nécessaire, des groupuscules affidés du polisario – bénéficiant pourtant des libertés et du droit de circuler – pourraient les provoquer. Ainsi une image faussée serait-elle livrée au secrétaire général de l’ONU un mois avant le rapport du Conseil de sécurité.

Mais, Ban Ki-moon  ne se rendra pas à Lâayoune en ce mois de mars. Il n’accédera pas aux morbides désirs du pouvoir algérien  et de ses stipendiés. Cela dit, le Maroc a le droit d’accepter ou de récuser le principe d’une visite de ce genre. Rien ne l’y oblige. Le Sahara est un territoire marocain, dont la libération et la rétrocession au Maroc ont été dûment reconnues par l’ONU, notamment par l’adoption, en décembre 1975, au niveau de l’Assemblée générale des Nations unies, de l’accord tripartie de Madrid, signé le 14 novembre de la même année, entérinant sa décolonisation. Le sinistre scénario de désordres, de violences prévisibles et de conditionnement de l’opinion  internationale moyennant des méthodes éprouvées par le polisario et ses commanditaires d’Alger, ne se reproduira pas au mois de mars, soit quelques semaines avant le débat rituel du mois d’avril. Le pouvoir algérien, espérant mettre à profit cette visite, en conçoit de l’aigreur et rabat son caquet. C’est pourquoi le président Bouteflika vient d’adresser à Ban Ki-moon un message, selon une rhétorique usée jusqu’à la corde, le pressant d’organiser un référendum au Sahara, croyant mettre en difficulté à la fois le Maroc et l’organisation internationale.

Le Maroc avait déjà accepté le principe du référendum dès 1981, notamment après le Sommet de l’OUA (Organisation de l’Unité africaine) tenu à Nairobi. Mais le pouvoir algérien a saboté l’opération de recensement des populations éligibles pour voter, rejetant la majorité des Sahraouis qui sont originaires ou résidents au Sahara, mais qui ne sont pas à Tindouf. Un autre point essentiel tient au mandat de Ban Ki-moon qui s’achève au mois de décembre prochain : les dirigeants algériens, sont lancés dans une course contre la montre pour arracher une décision en leur faveur avant son départ.  Quelle portée pourrait-elle avoir, quelle légitimité même provenant d’un secrétaire général appelé à préparer sa sortie honorable et à gérer les affaires courantes? N’est-il pas un patron en sursis ? Ce que découvrira Ban Ki-moon lors de sa visite, à Lâayoune, au mois de juillet prochain, ce sont des provinces en plein développement, des réalisations spectaculaires menées depuis quarante ans, des investissements considérables, un Sahara qui n’a rien à voir avec ce que nous avons connu et vu en novembre 1975, consistant, à l’époque, en des baraquements vétustes, un Texas espagnol poudreux et la garde des Tercio qui languissaient.

En définitive, un territoire désolé que l’Algérie de Boumediene, tout à son expansionnisme véreux et sa mauvaise foi, n’avait cessé de convoiter.

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