Colloque au Sénat à Paris « Les femmes des deux rives de la Méditerranée face à l’extrémisme »

Par Layla Mathieu

Depuis 2014, l’Association des femmes arabes de la presse et de la communication (AFACOM) et l’Organisation islamique internationale pour l’Éducation, les Sciences et la Culture (ISESCO) organisent chaque année le Forum international : « Le dialogue euro-méditerranéen au féminin ». Cette année le colloque s’est tenu au Sénat à Paris sur le thème « Les femmes des deux rives de la Méditerranée face à l’extrémisme », le 26 avril 2017.

Parrainé par la sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam, le colloque a été présidé par Dr Zeina el Tibi, présidente de l’Afacom et il a réuni plus d’une centaine de personnes dont de nombreuses élues : la sénatrice Catherine Morin-Desailly, présidente de la Commission de la Culture, de l’Éducation et de la Communication, et la sénatrice Corinne Feret , Françoise Schepmans, député maire de Mollenbeek (Belgique), Maria Teresa Fernandez de la Vega, ancien vice-Premier ministre d’Espagne, des députés égyptienne, marocaine, tunisienne, plusieurs ambassadeurs (Liban, Espagne, Palestine, Afghanistan…). Plusieurs personnalités ont également participé au colloque : l’ambassadrice Delphine Borione, secrétaire général adjointe de l’Union pour la Méditerranée (UpM), Dr Jean-Marie Heydt, président du Centre Nord-Sud du Conseil de l’Europe, Dr Charles Saint-Prot, directeur général de l’Observatoire d’études géopolitiques (OEG) et un parterre de hauts fonctionnaires, d’intellectuels et d’universitaires.

Dans son discours introductif, Dr Zeina el Tibi a souligné que « l’extrémisme et la radicalisation sont devenus une grave préoccupation aussi bien dans le monde arabo-musulman que dans beaucoup de pays européens. Certains ont pris prétexte pour dénigrer l’Islam en bloc. Pourtant il ne faut donc pas assimiler le monde musulman avec une minorité de fanatiques qui détournent l’islam à des fins criminelles. L’extrémisme et la radicalisation prolifèrent sur le terreau de l’ignorance. La priorité est de combattre cette ignorance dont profitent les charlatans extrémistes. »

La sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam (France), Samia Djacta (Algérie) représentant Dr Abdelaziz Othman Altwaijri, directeur général de l’ISESCO, et l’ambassadeur Delphine Borione, secrétaire générale adjointe de l’UPM, ont successivement pris la parole.

Trois thèmes majeurs

 Trois thèmes majeurs ont été abordés par les oratrices venues d’une douzaine de pays (Maroc, Tunisie, Égypte, Palestine, Italie, Jordanie, Liban, Belgique, Espagne, France, Italie, Roumanie…) : l’action des femmes dans la vie publique ; les femmes victimes et cibles de l’extrémisme ; les femmes médiatrices de paix et de tolérance. Le panel a été présidé par la sénatrice Morin- Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication au Sénat français, qui a souligné que sous le règne du Roi Mohammed VI, les droits de la femme n’ont cessé d’évoluer au Maroc, et elle s’est félicitée des actions du Souverain visant à consacrer davantage ces droits. Elle a en outre mis en avant la participation de la femme marocaine à la vie politique, se félicitant de l’accès de nombreuses femmes à des postes de responsabilité dans le Royaume.

Françoise Schepmans, députée belge et bourgmestre de la commune de Mollenbeek, qui a été le terreau de plusieurs terroristes, a présenté un exposé très apprécié par l’auditoire. Elle a affirmé que les associations de femmes de sa commune ont une action importante et positive face à la radicalisation. De son côté, Hayat Bouffarachen, vice-présidente de la Chambre des représentants du Maroc, a insisté sur l’importance de l’action des femmes dans la vie publique, soulignant que cette participation à la vie publique a permis à la femme d’acquérir les connaissances, la compréhension du tissu social et une certaine confiance en soi, ce qui lui permet de jouer un rôle actif dans la vie sociale et communautaire. Les députés tunisienne et égyptienne, Leila Hamrouni et May el Batran ont apporté leur témoignage sur la situation dans leur pays.

 Le panel sur les femmes victimes et cibles de l’extrémisme a été présidé par Charles Saint-Prot, directeur général de l’OEG, et a réuni Rita al Khayat (Maroc) sur « la caricature de la femme par les extrémistes », Safaa Alhamaydeh (Jordanie) sur « la femme palestinienne entre l’occupation et la radicalisation », Mariam el Kurdi sur « la femme dans la tourmente des prétendus printemps arabes » et la Libanaise Dr Maha Baaklini-Laurens, professeur en philosophie.

 Les femmes face au confessionnalisme

 Maha Baaklini-Laurens a présenté une communication sur l’action des femmes contre le confessionnalisme qui nourrit l’extrémisme et le refus de l’autre. Auteur du très beau livre, La passerelle du temps (éd. du Cerf ), elle a pris l’exemple du Liban pour exposer le système confessionnel est contestable et particulièrement défavorable aux femmes. Or les femmes expriment le désir du vivre ensemble qui est menacé au Pays du Cèdre par des années de crises et de conflits dus aux incidences extérieures. C’est pourquoi, « la femme va franchir les frontières érigées par la guerre entre les régions et accéder au statut de trait d’union entre les confessions » Du coup, les médiations féminines sont nécessaire pour apaiser la vie sociale.

 Le troisième panel présidé par Noha Rashmawi (Palestine) a porté sur l’action des femmes médiatrices de paix et de tolérance avec Marie-Geneviève Missegue (France) sur Le rôle de la femme dans le dialogue interreligieux ; Carmen Fernandez-Tavora, secrétaire générale de la Fondation Trois cultures de Séville (Espagne) sur la vie associative, Cléopatra Lorintiu (Roumanie) sur l’action des femmes dans les médias et les réseaux sociaux et Maria Teresa Fernandez de la Vega, ancienne vice-présidente du gouvernement espagnol, ancien ministre, membre du Conseil d’État (Espagne) sur les femmes pour un monde meilleur.

 Faire prévaloir les valeurs de dialogue

Dans les conclusions, Jean-Marie Heydt (Suisse), président du Centre Nord Sud du Conseil de l’Europe, a noté que les discours ont insisté pour le rôle des femmes –mères, épouses et soeurs- pour faire entendre la voix de la tolérance et de la raison. Il a indiqué que les oratrices ont constaté que les femmes sont les premières victimes des positions extrémistes et du radicalisme qui travestissent les vraies valeurs de l’Islam, et elles ont souligné le rôle des femmes contre l’extrémisme, notamment par le biais de l’éducation, de le la famille, de l’action associative ou des prises de positions des femmes de la politique et des médias.

  1. Heydt a conclu en précisant qu’il ne faut pas confondre l’Islam et les déviations et il a salué les initiatives visant à combattre l’extrémisme et le terrorisme de personnalités de premier plan, en particulier le Roi du Maroc.

Il s’est félicité de la volonté des organisations organisatrices (AFACOM et ISESCO), de leurs partenaires (UpM, Centre Nord Sud du Conseil de l’Europe, OEG, Fondation Hassan II pour les Marocains de l’étranger, Attijariwafa bank Europe, Radio Orient) et de tous les participants de promouvoir leur action au service du renforcement de la coopération visant à faire prévaloir les valeurs de paix et de dialogue entre les deux rives de la Méditerranée.

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