Peu d’espoirs avant les nouveaux pourparlers intersyriens

Un cinquième round de négociations pour mettre fin à la guerre en Syrie s’ouvre jeudi à Genève sous l’égide de l’ONU mais suscite peu d’espoirs au vu de l’inflexibilité du régime et de l’opposition.

Bien que la précédente session de pourparlers en février ait accouché d’un agenda clair pour la première fois –lutte contre le terrorisme, gouvernance (terme flou pour évoquer une transition politique), Constitution, élections–, ce programme paraît démesurément ambitieux au vu du fossé entre les deux parties.

Quatre séries de pourparlers ont déjà été organisés à Genève sous l’égide de l’ONU depuis début 2016, mais sans parvenir à trouver une solution à ce conflit qui a fait en six ans plus de 320.000 morts et des millions de déplacés.

Les mêmes invités du round de février ont confirmé leur participation, selon l’émissaire spécial de l’ONU pour la Syrie Staffan de Mistura qui pilotera ces pourparlers indirects.

« Ce seront des ‘proxy talks’, les pourparlers directs sont exclus », a affirmé à l’AFP une source occidentale proche des négociations.

M. de Mistura, qui veut que les quatre sujets de l’agenda soient discutés « en parallèle », se chargera de « filtrer les choses et d’arrondir les angles », précise la source.

Mais sa tâche sera rude car selon des analystes et des diplomates, l’opposition et surtout le régime ne semblent pas disposés à faire des concessions.

L’opposition ne cesse de réclamer le départ du président syrien Bachar al-Assad comme elle le fait depuis 2011, ce que le chef de l’Etat refuse. Damas de son côté veut que la « lutte contre le terrorisme » –terme par lequel le pouvoir désigne tous ses adversaires– soit discutée en priorité.

« Il n’y a pas d’espoir à mon sens », indique à l’AFP Thomas Pierret, spécialiste de la Syrie à l’université d’Edimbourg. « Le régime continue de gagner du terrain (…) il n’y aucune raison pour lui de faire la moindre concession ».

Depuis l’intervention militaire en Syrie de son puissant allié russe fin 2015, le régime du président Assad alors en difficulté a complètement renversé la donne, remportant une série de victoires face aux rebelles et jihadistes.

« Le régime n’était pas disposé à faire des compromis quand il était en train de perdre militairement; il l’est moins maintenant qu’il a l’avantage », renchérit Noah Bonsey, du centre de réflexion International Crisis Group.

En décembre, l’armée a repris aux rebelles la totalité de la ville d’Alep, sa plus importante victoire.

« Ces négociations sont très difficiles », soutient une source diplomatique française. « L’opposition est fracturée et on a assisté depuis des mois à une lente dégradation du rapport de forces en sa défaveur ».

Les deux belligérants s’accusent de manquer de sérieux sur les négociations.

« Il y a peu d’espoirs en raison de l’entêtement de l’autre partie qui ne souhaite pas vraiment trouver une solution », a affirmé à l’AFP Yehya Aridi, un des conseillers du Haut comité des négociations (HCN), qui rassemble des groupes clés de l’opposition.

Il accusé le régime d’avoir adopté une approche qui consiste à « soumettre » l’opposition, en obtenant la reddition de nombreuses localités rebelles après des années de bombardements et de siège.

Pour Bassam Abou Abdallah, analyste proche du régime syrien, ce sont les alliés régionaux de la rébellion qui cherchent à entraver une solution.

« Pour la première fois il y a un agenda clair (à Genève). Mais à chaque fois qu’il y a une avancée politique, des combattants liés à des puissances régionales mènent de nouvelles attaques », a indiqué le directeur du Centre de Damas pour les études stratégiques.

Il faisait référence à l’assaut mené depuis dimanche par des rebelles et des jihadistes à Damas, le plus violent depuis deux ans.

Les deux délégations arriveront mercredi à Genève. L’adjoint de l’émissaire spécial, Ramzy Ezzeldin Ramzy, aura la tâche de les accueillir jeudi car M. De Mistura sera en déplacement à Moscou et Ankara, deux parrains du cessez-le-feu en vigueur en Syrie depuis le 30 décembre.

Lors de la dernière séance, les pressions russes sur Damas semblent avoir payé, puisque pour la première fois le régime a annoncé à Genève qu’il était prêt à discuter des trois thèmes politiques fixés par M. De Mistura (gouvernance, élections, Constitution).

Du côté de l’opposition, jusqu’il y a peu soutenue par les Etats-Unis, le flou règne, l’administration de Donald Trump n’ayant donné jusqu’à présent aucun signe d’implication dans la recherche d’un règlement du conflit syrien.

« La vision des Etats-Unis n’est pas encore claire (…) et la solution en Syrie ne se fera que selon un accord russo-américain », conclut M. Abou Abdallah.

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