Inde : nouvelles coupures d’internet, les manifestants maintiennent la pression

De nouvelles manifestations contre la loi sur la citoyenneté, vue comme anti-musulmane, ont eu lieu vendredi en Inde, où les autorités ont coupé l’accès à internet en plusieurs endroits et déployé des milliers de policiers anti-émeutes.

Des partisans de la loi ont aussi organisé une contre-manifestation à Bombay, la capitale économique, illustrant les divisions que cette nouvelle loi a creusées.

Des centaines de personnes ont commencé à se rassembler devant la grande mosquée de New Delhi après la prière du vendredi, dans le vieux quartier de la capitale quadrillé par les forces de l’ordre. Policiers anti-émeutes et paramilitaires ont érigé des barricades sur les rues menant à la mosquée, où de violents affrontements avaient éclaté lors de précédentes manifestations.

Mais les protestataires se disaient déterminés à poursuivre tant que le gouvernement nationaliste hindou de Narendra Modi ne retirerait pas sa loi controversée.

Celle-ci prévoit de donner la nationalité indienne aux réfugiés d’Afghanistan, du Pakistan et du Bangladesh, sauf ceux de confession musulmane.

Vingt-sept personnes ont péri en deux semaines dans des manifestations parfois violentes contre cette législation qui a entraîné le plus important mouvement de contestation en Inde depuis l’arrivée au pouvoir des nationalistes hindous en 2014.

Des centaines de policiers étaient déployés et des dizaines de chekpoints ont été mis en place à Bombay, où deux manifestations rivales, pour ou contre la loi, ont rassemblé chacune près de 5.000 personnes.

Pour une manifestante hostile à la loi, Amanda Castellino, 27 ans, il s’agit de « préserver la culture laïque de l’Inde ».

→ Lire aussi : Loi sur la citoyenneté en Inde : Sécurité renforcée en prélude à de nouvelles manifestations

« Pourquoi les musulmans auraient-ils besoin de venir chez nous alors que le Pakistan, l’Afghanistan et le Bangladesh sont dominés par les musulmans? », s’interroge par contre Mahindra Shah, 82 ans, partisan de la loi.

En prévision de nouvelles manifestations vendredi, jour de la grande prière musulmane, les responsables d’Uttar Pradesh (nord) ont suspendu l’internet mobile et les SMS dans 21 districts sur 75, dont la capitale régionale Lucknow.

Dans plusieurs zones de cet État, contrôlé par les nationalistes hindous et dirigé par un moine radical, l’internet mobile n’avait été rétabli que mardi après près d’une semaine de suspension. Cette région de 220 millions d’habitants compte 20% de musulmans.

Bloquer l’accès à internet pour limiter les manifestations est une technique couramment utilisée par les autorités en Inde, le pays étant le leader mondial en nombre de coupures de ce réseau. Le site internetshutdown.in en a ainsi recensé une centaine pour la seule année 2019.

En amont de la grande prière hebdomadaire, des milliers de policiers armés patrouillaient vendredi matin des districts d’Uttar Pradesh à majorité musulmane. 5.000 personnes ont été placées en détention préventive, en plus de 1.000 autres déjà arrêtées en lien avec les manifestations.

Cette région pauvre et notoirement corrompue, où se trouve le célèbre Taj Mahal, avait vu de violents heurts il y a une semaine après la sortie des mosquées.

Le mouvement de contestation a d’ores et déjà entraîné la mort de 19 personnes dans cet État, la plupart tuées par balle. Un enfant de huit ans a péri piétiné dans un mouvement de panique dans la ville sacrée de Varanasi, circonscription de Narendra Modi.

La réponse brutale des forces de l’ordre nourrit la colère des manifestants, qui accusent les autorités de répression arbitraire.

Approuvée le 11 décembre par le Parlement, la loi contestée ne concerne pas directement les musulmans indiens, mais elle a renforcé les inquiétudes de cette minorité (14% du 1,3 milliard d’Indiens), qui craint d’être reléguée au rang de citoyens de seconde classe dans l’Inde des nationalistes hindous.

Alors que ce mouvement de contestation connaît un grand retentissement international, les autorités indiennes gardent à l’oeil les agissements des étrangers présents dans le pays et prennent des sanctions si elles découvrent qu’ils se sont joints à la mobilisation.

Une touriste norvégienne qui a participé à une manifestation dans l’État du Kerala (sud) s’est ainsi vu ordonner de quitter le pays, a rapporté l’agence Press Trust of India.

Avec AFP

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