La crise actuelle semble avoir dévié la trajectoire du débat au profit de la régulation de la mondialisation (think-tank)

Si la crise économique et financière de 2008 a accentué le clivage démondialisation contre mondialisation, la crise actuelle semble avoir dévié la trajectoire du débat au profit d’une troisième voie, celle de la régulation de la mondialisation, souligne un récent article du think-tank marocain Policy Center for the New South (PCNS) intitulé “l’inflexion de la mondialisation : raison et confusion dans le contexte covid-19”.

Le processus de mondialisation, si solide soit-il, se trouve à l’épreuve d’une crise sanitaire mondiale “inattendue” et “brutale”, écrit Rachid El Houdaigui, Senior fellow au PCNS et auteur de l’article, notant que cette réalité adresse au monde une question qui interpelle autant les décideurs, les managers que les chercheurs : Que pourraient être les effets du Covid-19 sur l’économie politique internationale? Rupture, continuité ou inflexion?

De son avis, les questions qui interpellent les Etats, quelle que soit leur taille, sont liées au statut et au rang dans l’économie mondiale : Quelle position occuper dans le tableau géo-économique? Comment y maintenir une position confortable ou comment la conquérir ou la reconquérir?

Procédant à une auscultation du système de valeur prévalant dans les processus décisionnels des Etats, M. El Houdaigui estime que “comme partout dans le monde, la logique adoptée est celle du choix de l’option qui impliquera des coûts minimaux et des bénéfices maximaux, au vu de l’intérêt national”.

Et d’enchaîner que le discours “protectionniste” et “anti-multilatéralisme” ainsi que le jeu géopolitique “agressif” sont les conséquences directes de cette tendance, qui risque d’être renforcée par la crise sanitaire du Covid-19.

Par ailleurs, et afin d’appuyer ce constat, M. El Houdaigui explique que le mouvement peut, donc, être accéléré vers plus de protectionnisme, mettant en relief le montant des échanges visés par les mesures restrictives à l’importation, entre octobre 2018 et octobre 2019, et qui était estimé à 747 milliards de dollars, à en croire un rapport de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) de décembre 2019.

Dans la même veine, l’expert en relations internationales poursuit qu’en quatre mois, “nous avons assisté à un croisement d’expressions (protectionnisme ciblé, relocalisation, réorganisation de la chaîne de valeur) qui, par ailleurs, n’a pas encore montré son ampleur ni abouti à une conceptualisation commune”.

Certainement, nous assisterons à une “avalanche” de concepts, de programmes et de codes de conduite, destinés à baliser les pistes de la nouvelle régulation, constate-t-il, estimant que le risque est que ces idées soient désignées essentiellement à structurer la géo-économie mondiale, plutôt qu’à l’interpréter.

Revenant sur le rapport Chine-Occident, l’auteur écrit que la sociologie de la production stratégique sur Covid-19 est “fortement” teintée de “l’obsession mutuelle” de ces deux blocs, relevant que le reste du monde, notamment le continent africain, devra éviter “le piège” de la dualité incompatible et “la guerre” des modèles, à travers une présence manifeste dans les grandes “fabriques” mondiales des idées.

Quant aux défis du secteur de l’industrie mondiale, M. El Houdaigui pense que les Etats industriels commencent à “tirer la leçon” de leur “dépendance” envers la Chine et entrevoient une réorganisation de leurs chaînes d’approvisionnement, sous forme de relocalisation, régionale sinon nationales.

Ainsi, il met en avant l’exemple du Japon qui a déjà consacré une aide de 2 milliards d’euros aux industriels désireux de délocaliser une partie de leur production hors de Chine, ajoutant que les autres pays européens, encore au stade des intentions, réfléchissent à des mesures de relocalisation qui viendraient se greffer sur des choix politiques déjà établis.

De surcroît, ce mouvement démontre que les capacités des pays développés-forteresses seront mises à “rude épreuve”, tant il est vrai, continue-t-il, que le “bouleversement” des systèmes des chaines de valeur aura un coût politique et économique.

Somme toute, M. El Houdaigui estime que l’enjeu pour le Maroc est “d’arrimer” son industrie à toute dynamique européenne tournée vers la réorganisation régionale du modèle de production et d’approvisionnement.

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