La digitalisation de l’Afrique : Le point avec Saloua Karkri Belkeziz

A l’heure de la 4ème révolution industrielle, l’Afrique compte 473 millions d’internautes, soit 36% de sa population, selon la plate-forme de gestion des médias sociaux « Hootsuite ». Un chiffre relativement faible, pour un continent de plus d’un milliard de personnes. Alors, comment encourager la révolution numérique en Afrique?

En marge de la 12ème édition du forum MEDays, qui se tient du 13 au 16 novembre, à Tanger, MAROC DIPLOMATIQUE s’est entretenu avec Saloua Karkri Belkeziz la Présidente de la fédération des technologies de l’information, des télécommunications et de l’Offshoring (APEBI).

MD_ Est-ce que le digital peut éventuellement contribuer au renforcement de l’intégration africaine ?
_ Il faut dire que les défis dans tous les pays africains sont les mêmes. En Afrique, nous accusons un retard aux niveaux de l’industrie, la santé, l’éducation, etc. En revanche, le digital reste le seul moyen pour rattraper le temps perdu.
Le cas échéant, celui du Kenya, ou les citoyens étaient très peu bancarisés, en l’occurrence, une startup a trouvé une solution à travers le ‘mobile payment’. C’est un moyen de paiement qui ne nécessite pas de passer par les banques. Aujourd’hui, 46% du PIB au Kenya passe à travers ce canal du paiement mobile.
Au Rwanda, une startup a pensé à créer un logiciel, qui permet la distribution des médicaments aux régions enclavées, à travers des drones, parce qu’il y a des problèmes d’infrastructures et pauvreté.
Il y a plusieurs d’autres exemples qui montrent qu’aujourd’hui, le digital est un moyen de sauter le pas, notamment, une initiative qui est aussi très importante, l’alliance Smart Africa, lancée en 2014. Son objectif est de rapprocher le secteur privé et les gouvernements africains autour du développement de l’internet en Afrique.
On peut aussi travailler sur l’interconnexion de l’infrastructure telecom entre les différents pays d’Afrique, moyennant des câbles sous marins. D’ailleurs, Maroc Telecom a déjà démarré un projet dans ce sens. Ce qui permettrait d’offrir une connectivité pas chère, à l’ensemble de la population africaine.
Certes, la jeunesse à travers le continent est de plus en plus branchée à travers le continent, mais ensemble, on peut créer un marché numérique commun, qui nous permettra de créer des plateformes africaines, qui vont concurrencer les plateformes américaines.
MD_ Quel chemin à prendre pour accélérer la digitalisation de l’Afrique ?
_ Il y a plusieurs voies à suivre, qui peuvent impacter directement les populations africaines, à savoir, la connectivité, qui est très chère entre les différents pays d’Afrique, la réglementation numérique, avoir un code numérique purement africain, etc.
MD_ Est-ce que le digital commence à contribuer aujourd’hui, à la croissance économique du continent ?
_ Dans toute l’Afrique, je pense que le chiffre est de 7% du PIB et plus de 300 000 emplois. Des chiffres très insuffisants.
Au Maroc, SM le Roi a appelé, dans plusieurs contextes, à digitaliser l’administration et à améliorer les services du citoyen.
Il est temps d’accélérer le travail dans ce sens, maintenant qu’il y a une émergence du digital et qu’on assiste à la modernisation de la fonction publique.
En outre, nous sommes en train d’attendre justement la nouvelle commission qui va discuter du nouveau modèle de développement économique. Nous espérons qu’il sera basé sur le digital, parce que ce n’est pas un secteur en soi. Il comporte trois dimensions : horizontale (liée à tous les secteurs), vertical (elle concerne l’administration, le citoyen et l’entreprise) et temporelle (liée à la notion du temps).
MD_ Est-ce qu’on peut dire que le processus de la digitalisation du Maroc a atteint un stade de maturité ?
_ En réalité, il ne va pas encore assez vite ! D’ailleurs, à l’APEBI, nous sommes en train de préparer un livre de recommandations, que nous allons présenter le 4 décembre, où on va émettre des propositions concrètes, basées sur des entretiens avec des personnalités marocaines aussi bien politiques, économiques que d’autres, pour dire voilà ce qu’il faut faire dans les domaines de la gouvernance, la formation, les infrastructures, le télécom, etc. Nous espérons que le gouvernement en tiendra compte
Je trouve qu’on devrait avoir un jour un portefeuille ministériel qui s’occuperait des technologies de l’information, comme le cas de plusieurs pays du continent.

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