La femme égale de l’homme, dites-vous ?…

Hassan Alaoui

Dans les toutes premières années de son règne, le Roi Mohammed VI a ordonné la mise en œuvre en 2004 d’une réforme sur le statut de la femme dont le Maroc ne cessera jamais d’être fier.

En 2004 une Commission a été constituée pour réfléchir sur le statut de la femme, présidée par feu M’Hamed Boucetta à qui le Roi a laissé libre cours pour faire des propositions courageuses et novatrices. Un texte largement débattu pendant des semaines et des mois a été finalement adopté avec le résultat immédiat de sortir notre pays de l’ornière : les archaïsmes en tous genres, familial, juridique, professionnel, économique, social voire politique.

Ce projet sociétal porte un nom : La Moudawana, tout à sa forte sémantique qui recouvre un large spectre de droits de la femme et de devoirs pour l’homme, remis en principe à sa juste place. Victoire également de toutes celles et tous ceux qui combattent depuis des lustres pour l’égalité et la justice des femmes avec les hommes. C’est peu dire que l’adoption du projet d’un nouveau statut de la femme aura constitué une étape majeure parmi les autres avancées réalisées sous l’impulsion du Roi Mohammed VI. Le Maroc a vécu ainsi un printemps exceptionnel en termes de projets tous azimuts, et celui de la reconnaissance de la femme comme partenaire à part entière de l’homme nous donne toujours le droit de nous enorgueillir à coup sûr.

→ Lire aussi : Maroc: Les femmes représentent plus de la moitié de la population en 2018

Pour autant, la réforme de la Moudawana, si elle a été l’occasion non pas de bouleverser mais à tout le moins de secouer le cocotier et d’atténuer le mouvement discriminatoire envers la femme, est aujourd’hui critiquée pour ses insuffisances voire ses manquements. Les principales critiques portent sur la non application ou l’inefficience des mesures et des lois contenues dans le texte législatif, les démoniaques ostracismes envers la femme – notamment dans les campagnes et les couches moyennes et pauvres- le mépris des hommes qui sévit comme une épée de Damoclès, la loi du travail qui marginalise la femme, les divorces unilatéraux qui favorisent les hommes, et…plus gravissime, les violences excessives et meurtrières dont sont victimes les femmes et qu’aucune loi, nulle force ne sont en mesure d’arrêter.

Somme toute, plus la rhétorique sur le statut ou les statuts de la femme se développe et se répand, plus les lois sont ignorées et piétinées. Les affaires de mœurs sur lesquelles s’étalent certains organes de presse digitale, avec leur cortège ahurissant de fake-news et de désinformation, révèlent à vrai dire le dysfonctionnement majeur de notre société : le machisme et cette irrépressible volonté de considérer la femme comme l’objet d’un désir-haine. L’autre revers de la pièce, concomitant à cette logorrhée sur ses exploits, ses droits acquis de longue date, est une insidieuse dérision et de compassion envers son sort, lâchée mezza voce par les cercles intellectuels qui n’en pensent pas moins, jouant aux plus féministes que la femme elle-même…

La femme est aussi un fonds de commerce pour les partis politiques et les pseudo leaders qui, du haut de leur tribune, en font leurs choux gras. Chaque formation politique en hisse une ou plus sur l’échiquier, mais aucune d’entre elles n’élève la femme au sommet de la hiérarchie au point d’en faire la présidente ou la secrétaire générale aux commandes réelles. Tant et si bien que l’égalité à ce niveau reste, hélas !, caricaturale pour ne pas dire pire… L’anecdotique est le cas de membre du parlement, tout à son machisme, qui vient de déclarer fièrement à une jeune collègue au même parlement : « Moi, j’ai passé toute ma vie (hyati) dans cette institution… ». Autrement dit : « va, va…petite femme… ». Elle eût pu lui rétorquer qu’à force d’y être depuis des décennies, et d’y blanchir sous le harnois, il a fini par user le fond de ses culottes et en même temps le strapontin (kourssi) d’un parlement connu pour l’ostracisme envers la femme, transformé en abri des mafieux…

Le chemin est encore long pour parvenir à une égalité relative, s’il faut encore changer la ou les lois –  une de plus –  portant statut de la femme, il faut surtout changer le tempérament de l’homme, sa nature, son comportement et extirper les racines du Mal. Je veux dire le manque d’éducation et de civisme qui est à notre société ce que le chancre est à un corps.

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