La Marche Verte a mis fin à la colonisation

Alors que l’Algérie et l’Espagne tentait d’empêcher le retour des provinces du sud au Maroc et que la situation s’enlisait, le Roi Hassan II annonça, le 17 septembre 1974, son intention de porter l’affaire du Sahara devant le Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye. Il s’agissait de deman­der à la Cour si le Sahara était, comme le prétendait l’Espagne, une terre qui « n’appartenait à personne » lors de la colonisation, ou bien si les territoires concernés avaient effectivement des liens avec le Royaume chérifien.

Cette démarche s’inscrit dans le cadre d’une diplomatie marocaine qui a toujours cherché à aboutir à un règle­ment pacifique du différend, en faisant valoir son bon droit et en saisissant les différentes organisations internationales de ce dossier. L’initiative du Roi répon­dait donc au jeu de Madrid qui tentait d’empêcher la restitution des territoires au Maroc afin de perpétuer d’une fa­çon ou de l’autre sa présence dans la région. L’initiative marocaine visait également à clarifier les choses. C’est ce que comprirent bien les populations du Sahara qui allaient manifester leur hostilité contre la poursuite de l’occupa­tion espagnole et demander un retour au Maroc. Dans ces manifestations, le rôle des mouvements de résistance loyalistes a été important mais personne n’enten­dit alors parler du Polisario qui com­mençait à cette époque à passer sous le contrôle de l’Algérie. En décembre 1974, le cadi de Laayoune, à la tête d’une importante délégation, se rendit à Fès pour faire acte d’allégeance devant le roi Hassan II.

L’avis de la CIJ

L’initiative du Roi obligeait chacun à tomber les masques. Alger et Madrid étaient pris de court. Ils firent tout leur possible pour empêcher l’arbitrage de la Cour. Une première victoire fut rem­portée par le Maroc lorsque le comité de décolonisation de l’ONU décida que la Cour internationale de justice de­vait être saisie. Le 16 octobre 1975, la Cour internationale de justice rendit son avis consultatif sur les deux questions qui lui étaient soumises. Répondant à la première question, l’avis de la Cour déclara que le territoire n’était pas ter­ra nullius lors de la colonisation. Pour ce qui concerne la seconde question, la C.I.J reconnut « l’existence, au moment de la colonisation espagnole, de liens juridiques d’allégeance entre le Sultan du Maroc et certaines des tribus vivant sur le territoire du Sahara Occidental ».

Fort de l’avis de la Cour, le Roi Has­san II pouvait alors prendre la décision historique d’appeler le Peuple maro­cain à une Marche verte (al Massira al khadra) pour entrer en possession de son territoire. On n’insistera jamais as­sez sur la portée de cette initiative. Le 6 novembre 1975, 350 000 Marocains uniquement armés de drapeaux natio­naux et du Coran, pénétrèrent au Sahara marocain sans rencontrer de résistance. La Marche verte a constitué un acte de récupération des territoires nationaux au terme d’une mobilisation populaire qui vaut tous les referendums. En fin de compte, la Marche verte ouvrit la voie à l’accord de Madrid, du 14 novembre 1975, signé par l’Espagne, le Maroc et la Mauritanie, fixant les modalités de rétrocession des territoires avant février 1976 et le transfert de l’administration du territoire à Rabat et, pour une petite partie des territoires, à Nouakchott, qui finalement y renoncera en 1979, date à laquelle le Maroc recouvrera sa souve­raineté sur toute la région.

La restitution du Sahara marocain au Royaume

Le 17 novembre, Hassan II déclarait dans un discours à la Nation : « Au­jourd’hui, Cher Peuple, je suis en me­sure de te dire que notre Sahara nous a été rendu et sans effusion de sang ». Le lendemain, les Cortès espagnols rati­fiaient l’accord du 14 novembre par 345 voix contre 4 (et 4 abstentions) Ainsi, l’accord a mis un terme au statut de ter­ritoires non-autonomes des territoires du Sahara qui sont redevenus marocains comme l’Alsace et la Moselle sont re­devenues françaises en 1918 et en 1945 après l’occupation allemande. La ques­tion d’un referendum n’avait donc pas à être posée. Ali Yata a témoigné qu’il n’avait jamais connu une telle ferveur populaire « sauf peut-être à l’époque où notre Peuple, vingt années plus tôt, avait réussi à abolir le protectorat ». La récupération des provinces sahariennes venait parachever la libération du Ma­roc en permettant sa réunification Par conséquent, la récupération du Sahara marocain a tourné la page de la coloni­sation.

Disons-le tout net, la question du Sahara n’est plus un problème de déco­lonisation depuis 1975, mais une tenta­tive de sécession encouragée de l’exté­rieur. Elle ne relève plus des questions de décolonisation mais d’une ingérence étrangère dans les affaires marocaines et d’une tentative de déstabilisation en violation de paragraphe 4 de l’article 2 de la Charte des Nations unies. Que se passe-t-il en effet entre la Marche verte et le retrait espagnol en févier 1976 ? Des troupes algériennes, appuyées par des Cubains et des Allemands de l’Est, s’emparent des positions abandonnées par les Espagnols à l’Est du Sahara ma­rocain (Amgala, Guelta Zemmour, etc.) avec l’idée d’installer le Polisario dans une partie du territoire pour créer un fait accompli et placer le plus de personnes possibles sous le contrôle algéro-Polisa­rio.

Une seule solution :le plan marocain

Quarante-quatre ans après la Marche Verte du 6 novembre 1975, qui a clos la question de la colonisation des provinces du sud marocain par l’Espagne, en per­mettant leur restitution au Royaume chérifien, une analyse d’envergure est devenue nécessaire sur la persistance du conflit sur le Sahara marocain (dit « occidental ») créé de toutes pièces par l’Algérie et le bloc communiste au milieu des années 1970. Ce conflit a été instrumentalisé et continue à être un fonds de commerce pour quelques États, organisations, associations et mi­litants qui se croient encore au temps de la Guerre froide. Désinformation, propagande, provocations, campagnes ciblées d’intoxication, toutes les mé­thodes bien connues de l’activisme révolutionnaire totalitaire continuent à fonctionner grâce aux subventions d’un régime algérien qui, depuis 1975, tente d’accréditer la fiction d’un mouvement séparatiste fantoche au Sahara maro­cain, le Polisario, et reste, hélas, obsédé par sa haine du Maroc.

Quant au Maroc, il a pacifié la région et a écarté depuis longtemps la menace militaire agitée, jadis, par Alger, avec la participation de forces importantes venues de Cuba et de l’Europe de l’Est sous occupation soviétique. En outre, le Maroc a accompli des efforts gigan­tesques, financiers, administratifs, tech­nologiques, éducatifs et sanitaires, pour mettre cette région, tragiquementdélais­sée lors de l’occupation espagnole, au niveau du reste du pays. D’un désert où il n’y avait aucune infrastructure, où les maigres populations étaient lais­sées à l’abandon, où les soins de santé et l’éducation étaient inexistants, la vo­lonté marocaine a permis de développer des territoires dotés de routes, d’aéro­ports, de ports, de villes, de services de santé, d’écoles, d’usines de dessale­ment d’eau, de réseaux électriques. Des ressources nouvelles ont été mises en valeur : les ressources halieutiques, les énergies renouvelables, le tourisme. Et il est notable que les choix ont été faits dans une logique de développement du­rable, comme avec le souci de profiter aux populations.

Le Maroc a présenté, en 2007, au Se­crétaire général des Nations Unies une Initiative pour la négociation d’un sta­tut d’autonomie de la région du Sahara. Dans sa résolution 1783 du 31 octobre 2007, le Conseil de sécurité des Nations unies s’est félicité des efforts «sérieux et crédibles faits par le Maroc pour aller de l’avant vers un règlement ». De nos jours, tous les observateurs ob­jectifs et les principaux États – à com­mencer par les États-Unis et la France – reconnaissent que le plan d’autono­mie, dans le cadre de la souveraineté du Royaume et de son unité nationale, constitue la seule solution appropriée pour en finir avec ce triste reliquat de la Guerre froide. Si l’on veut éviter que cette partie du sud de la Méditerranée se transforme en une nouvelle Somalie, une seule conclusion s’impose : il faut en tout premier lieu mettre un terme au conflit sur le Sahara marocain.

Dr Charles Saint-Prot

* Directeur général de l’Observatoire d’études géopolitiques. Coauteur du livre «Sahara marocain. Le dossier d’un conflit artificiel», éd. Le cerf, 2016

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