Le gouvernement Benkirane entre promesses et réalisations

DOSSIER DU MOIS

La « méthode Benkirane dans la gouvernance »

Bouchra Boulouiz

Chercheuse indépendante, essayiste et romancière, consultante en communication et pour les  usages des TIC 

 

La gouvernance  de Abdelilah Benkirane me semble être une gouvernance sans imagination ni créativité sur le plan économique et industriel. Il me semble également que les premières victimes sont  son propre électorat composé majoritairement des classes moyennes   et populaires. Sans parler aussi  de jeunes, chômeurs et chômeuses,  sous-employés ou dans des emplois précaires, beaucoup même sont dans l’informel et c’est cette  classe surtout  que la gouvernance d’Abdellillah Benkirane a sanctionnée. En effet, le gouvernement  l’a négligée en termes de politiques publiques et d’insertion dans le système productif existant. Aussi fallait-il  repenser et en réinventer un autre nouveau qui puisse convenir au contexte actuel. Or cela n’a jamais été fait. Au lieu de se pencher sur les vrais problèmes, créer des postes budgétaires, écouter les jeunes, les intégrer dans la vie active et améliorer les conditions de vie, on a préféré les endoctriner et  les endormir par des discours et des utopies millénaristes.

A mon avis, cette gouvernance  s’est trompée de siècle et de millénaire. C’est plutôt un  boulet, un boulet pour le changement, un  accélérateur de retard par rapport à un calendrier de grands projets industriels et structurants  qui devaient permettre l’entrée du Maroc dans une société mondialisée et globalisée, dans une société de l’information et de la connaissance qui a coïncidé avec  le règne de Mohammed VI, et une décennie plus tard avec le « Printemps arabe ». La nouvelle place du Maroc  aurait pu se négocier, à ce moment là, si le gouvernement avait préparé une vraie politique sociale pour l’emploi, l’insertion,  la  répartition  des richesses, de vraies politiques éducatives et de formation, une vraie culture créative et d’innovation, un mouvement de recherche et de développement qui aurait accompagné ces projets. Au lieu de cela, on a eu surtout recours à un discours pauvre en sens, mais riche en lieux communs et en images surannées et arriérées. D’ailleurs, ce type de discours –je crois-  possède en lui-même ses propres limites objectives, car il ne s’appuie pas sur un fondement scientifique, il n’est pas conceptualisé,  ni rationalisé,  et il ne peut que se métamorphoser en langage de la rue,  un langage primaire, stade anal comme diraient les psychologues. Ce qui est d’ailleurs en parfaite cohérence avec l’image d’un homme du peuple dont il se réclame. Ce trait forcé de l’homme du peuple malgré son côté touchant et presque « vierge », le révèle  comme  un homme du passé, il me rappelle beaucoup d’hommes dans mon entourage, en cela il m’est familier comme il est familier à tous les marocains, sauf qu’eux ne sont pas Premier Ministre. D’ailleurs, certains sont directeurs d’école ou instituteurs… On peut dire que nous  avons eu un « profil instit » comme premier ministre. C’est un  décalé et rien ne peut agir sur lui : ni la conjoncture nationale, ni internationale, ni les enjeux du monde. C’est un  leader politique enfermé dans une  vision arabe et musulmane étroite,  et s’il doit s’en aller, il doit le faire en s’excusant, il sera pardonné car, au fond, c’est un honnête homme mais qui doit lire les grands écrits sur la gouvernance comme celui de Saint Simon qui parle de la transition d’une société cléricale  à une vraie société industrielle…

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