Le Maroc, la Russie et la peccamineuse sanction de Zelensky contre deux diplomates ukrainiens

Par Hassan Alaoui

Faut-il pour être crédible aux yeux du président ukrainien Volodymyr Zelensky et dans ses grâces que le Maroc envoie des armes à l’Ukraine , décréter des sanctions contre la Russie ? Des armes que le Maroc ne fabrique ni ne possède qui ne seraient jamais  à la hauteur de la puissance armée de la Russie, des sanctions que nous serions les  seuls, hormis l’Union européenne et les Etats-Unis , à engager au milieu de près de la moitié des pays membres de l’ONU n’ayant pas pris part au vote de condamnation ?

On a appris, ce mercredi 31 mars, par voie de presse que le président ukrainien a rappelé son ambassadrice à Rabat Okssana Vassilieva et celui en Georgie les accusant de « n’avoir pas accompli leur travail » , leur lançant in fine ce mot dont le moins que l’on puisse dire est qu’il relève d’un mode expéditif navrant : « Avec tout le respect, s’il n’y a pas d’armes, pas de sanctions, pas de restrictions contre le business russe, cherchez s’il vous plaît un autre travail ». Nous tombons à la renverse , nous nous en tenons donc à cette décision malheureuse , voire autoritariste qui en dit long à la fois sur le caractère intempestif du président Zelensky et de l’injustice qui frappe les deux ambassadeurs.

Faudrait-il y voir un signal contre le Maroc, au-delà de la peccamineuse sanction contre deux diplomates ?

On comprend en effet bien l’impatience qui s’est emparée du président ukrainien, qui réclame à cors et à cris des armes, des interventions, un soutien total, terrestre, aérien, logistique, tactique et stratégique, une mobilisation internationale tous azimuts. On constate en revanche que tous – je dis tous – les pays de la planète ne se sont pas pour autant portés volontaires pour soutenir sa cause, n’entendent nullement remettre en question leur relation avec la Russie. Tant et si bien que même l’Union européenne, adossée aux Etats-Unis , hormis un soutien logistique, ne s’est pas engagée dans une guerre pour soutenir l’Ukraine ou empêcher un tant soit peu son invasion par les troupes de Russie et encore moins freiner leurs avancées.

→ Lire aussi : Ukraine: Le SG de l’ONU plaide pour un cessez-le-feu humanitaire

Au fur et à mesure que le président ukrainien appelle à l’aide avec chaque jour plus de véhémence, l’intervention militaire russe continue et réduit le territoire de l’Ukraine à une peau de chagrin. Les enjeux changent au quotidien, les pourparlers d’Antalya en Turquie traînent, ne suivent plus, et les chances d’une paix renvoyées à des jours meilleurs. On ne cessera jamais de faire notre cet apophtegme de Carl von Clausewitz , le général prussien selon lequel « la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens… ». Or, plus que jamais la guerre en Ukraine illustre cette dimension tragique , la politique étant à la fois l’objectif et le moyen. Poutine négociera en position de force, s’assurant la reconquête des territoires brigués après avoir anéanti le pouvoir de Zelenzky.

Qui d’autre aujourd’hui prétendrait l’en empêcher ? Aussi, lorsque le président Zelensky s’en prend aux pays, disons à certains pays par l’intermédiaire de deux de ses ambassadeurs, au Maroc et en Georgie, c’est comme on dit « noyer son chien en l’accusant d’avoir la rage »…Le Maroc, pour y revenir, ne peut distribuer ni armes pour l’Ukraine, ni sanctions contre la Russie, et le président Zelensky , livré à une rhétorique guerrière par l’Union européenne qui ne peut aller au-delà du soutien qu’elle lui accorde, s’interdit elle-même un engagement armé en Ukraine qui passerait aux yeux du Kremlin , on ne le sait que trop, pour un casus belli aux conséquences apocalyptiques ! On ne le dira jamais assez, le Maroc a construit sa doctrine , devenue au fil des ans un dogme, de non-alignement depuis le célèbre discours de feu Hassan II prononcé au premier Sommet des pays Non-Alignés de septembre 1961 à Belgrade. Le Souverain y avait défendu le principe de neutralisme positif inscrit désormais comme une devise sur le fronton de sa diplomatie.

Nous sommes restés attachés et fidèles à ce paradigme, actifs pour promouvoir la paix et la concorde, prudents et en retrait face à des conflits qui entraînent mort d’hommes et déchainent la haine.

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