Le Maroc redessine la carte de ses exportations automobiles

Alors que les tensions commerciales entre grandes puissances se durcissent, l’industrie automobile marocaine évolue dans un contexte singulier. Relativement épargnées par les récentes surtaxes imposées par les États-Unis, les exportations marocaines vers le marché américain demeurent marginales. Cette filière dynamique reste toutefois exposée à un risque majeur : sa forte dépendance à la conjoncture économique de l’Union européenne. Face à cette vulnérabilité structurelle, le Royaume intensifie ses efforts pour élargir ses débouchés à l’international et réorienter ses flux commerciaux.
Le secteur automobile marocain s’est imposé au fil des années comme un pilier des exportations nationales et un moteur de l’industrialisation du pays. Grâce à la présence d’acteurs de référence comme Renault et Stellantis, le Maroc est aujourd’hui le premier constructeur automobile d’Afrique, avec une part significative de sa production, dont près de 90 % est destinée au marché européen.
Cette forte orientation vers l’Europe repose sur plusieurs atouts compétitifs : proximité géographique, infrastructure logistique performante (notamment le port de Tanger Med), fiscalité avantageuse et main-d’œuvre qualifiée. Toutefois, cette concentration des débouchés rend la filière particulièrement sensible aux aléas économiques européens : ralentissement de la demande, reconfigurations industrielles, nouvelles normes environnementales ou instabilités géopolitiques.
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Conscient de cette dépendance excessive, le Maroc a engagé une stratégie proactive de diversification de ses marchés. Selon les analyses du cabinet BMI (Fitch Solutions), cette orientation est aujourd’hui indispensable pour consolider les acquis du secteur et assurer sa résilience à long terme. Ainsi, le Royaume renforce ses partenariats commerciaux avec des régions à fort potentiel, notamment l’Afrique subsaharienne, le Moyen-Orient et le Royaume-Uni. L’entrée en vigueur de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) constitue à cet égard une opportunité stratégique pour faciliter les échanges intra-africains et accroître les exportations de véhicules vers de nouveaux marchés comme la Côte d’Ivoire, le Nigeria ou encore le Sénégal.
Parallèlement, les pays du Golfe, en quête de solutions de mobilité durable, apparaissent comme des partenaires intéressants pour le segment des véhicules utilitaires et électriques. Le Royaume-Uni, malgré le Brexit, demeure également une destination ciblée, grâce aux accords de continuité commerciale signés entre Rabat et Londres.
Outre la diversification géographique, le Maroc mise sur une transformation qualitative de son tissu industriel à travers le développement du véhicule électrique (VE). Plusieurs projets d’envergure liés à la production de composants, de batteries et d’unités d’assemblage de VE ont vu le jour, plaçant le pays dans une trajectoire ascendante dans ce segment porteur. Avec ses ressources naturelles (notamment le phosphate pour les batteries LFP) et un écosystème industriel en constante évolution, le Royaume entend se positionner comme un hub régional de la mobilité décarbonée.