Rabat: Entretien avec l’Ambassadeur de chine sur les relations maroco-chinoises

Par Khadija Skalli

 Les relations diplomatiques entre la Chine et le Maroc connaissent un véritable es­sor. Sur le plan économique, de plus en plus d’entreprises chinoises inves­tissent dans le Royaume. La culture n’est pas en reste. Rabat et Pékin organisent conjointement une année culturelle et touristique en 2020. Les deux pays affichent une forte volonté de renforcer leur coopération bila­térale à tous les niveaux. Entretien avec l’Ambassadeur de la Répu­blique populaire de Chine à Rabat, Li Li.

  • MAROC DIPLOMATIQUE : Les relations diplomatiques entre le Maroc et la Chine datent de 1958. Comment voyez-vous aujourd’hui ces relations ?

– L’amitié entre la Chine et le Maroc re­monte loin dans l’histoire. Le Maroc figure parmi les premiers pays africains et arabes à avoir établi des relations diplomatiques avec la Chine.

Après plus de soixante ans de relations diplomatiques, les relations bilatérales se sont toujours développées d’une manière saine et stable, et se trouvent dans la meil­leure période de leur histoire. Elles se ca­ractérisent par un soutien réciproque en ce qui concerne les intérêts fondamentaux et préoccupations majeures de part et d’autre, une confiance politique mutuelle accrue, une coopération économique et commer­ciale croissante, de belles perspectives de coopération dans les secteurs émergents, des échanges humains et culturels en plein essor et un partenariat stratégique porté à un nouveau stade de développement.

Cette année marque deux événements très importants pour nos pays respectifs : le 70e anniversaire de la fondation de la République populaire de Chine et le 20e anniversaire de l’intronisation de sa Ma­jesté le Roi Mohammed VI. Je souhaite vivement que les relations entre nos deux pays continuent de connaître un dévelop­pement vigoureux et que les liens d’amitié se resserrent toujours davantage entre nos deux peuples.

  • La coopération économique est-elle à la hauteur des bonnes relations diploma­tiques qui lient les deux pays?

– Aujourd’hui, les échanges écono­miques sino-marocains connaissent un développement en profondeur, avec des projets phares dans divers domaines. Avec un volume commercial de 4,4 milliards de dollars américains en 2018, la Chine de­meure le troisième partenaire commercial du Maroc. L’investissement d’entreprises chinoises dans l’industrie automobile a enregistré des résultats substantiels. Citic Discatal a signé avec le gouvernement ma­rocain un accord d’investissement de 350 millions d’euros pour la production des jantes en aluminium, un record de l’inves­tissement chinois au Maroc, et l’usine sera bientôt mise en production.

La coopération sino-marocaine recèle de grandes potentialités. Le gouvernement chinois a toujours encouragé les entre­prises chinoises performantes à mener des coopérations au Maroc. En plus des projets dans des secteurs traditionnels comme la finance, la santé et la formation profes­sionnelle, un intérêt particulier a été porté sur les secteurs émergents. Les hommes d’affaires chinois des secteurs d’équipe­ments à hautes technologies, d’énergies re­nouvelables, de transport, d’e-business, de télécommunication 5G ainsi que d’agricul­ture verte sont nombreux à venir découvrir le marché marocain. Je suis persuadé que ces coopérations donneront davantage de fruits concrets dans l’avenir.

  • Le Maroc est parmi les premiers pays à avoir signé l’accord de l’Initiative de « la Ceinture et la Route » visant à revigo­rer l’ancienne route de la soie. Quelles sont les perspectives de ce projet ?

– Ces dernières années, le Maroc soutient et participe activement à la construction conjointe de « la Ceinture et la Route ».

 Depuis la signature de l’accord entre les deux pays il y a plus d’un an, l’Ini­tiative « la Ceinture et la Route » est progressivement passée, au Maroc, d’une vision à des actions de coopé­ration concrète. A travers le renforce­ment de la synergie des stratégies de développement nationales, la base de la coopération sino-marocaine a été consolidée, avec une intensification ef­fective des coopérations pragmatiques dans les domaines des infrastructures, des investissements commerciaux et de la finance.

Fin avril, le 2e Forum de « la Cein­ture et la Route » pour la coopération internationale s’est tenu à Beijing avec succès et a donné des fruits abondants. Il a permis notamment d’établir l’ob­jectif d’une coopération de qualité en matière de construction conjointe de « la Ceinture et la Route » pour fixer les orientations à suivre dans l’ave­nir, de créer un partenariat mondial de connectivité pour promouvoir un dé­veloppement interconnecté, de donner d’abondants résultats pragmatiques in­carnant l’esprit du bénéfice mutuel et du gagnant-gagnant, de mettre en place une plate-forme associant les gouver­nements locaux et les milieux indus­triel et commercial pour élargir les op­portunités de coopération, d’améliorer la structure de la coopération de « la Ceinture et la Route » pour créer un système de soutien, et de faire jouer le rôle d’orientation de la diplomatie des Chefs d’Etat pour approfondir les rela­tions bilatérales.

Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale Nas­ser Bourita a participé au Forum à la tête d’une importante délégation maro­caine. Des échanges de vues approfon­dis avec des dirigeants chinois et afri­cains sur la construction conjointe de « la Ceinture et la Route » ont permis de dégager de larges consensus. Je suis sûr que sous l’impulsion des deux par­ties, la construction conjointe de «« la Ceinture et la Route » deviendra un moteur des relations sino-marocaines et offrira une nouvelle plate-forme aux échanges bilatéraux au profit des deux peuples.

  • Un mémorandum d’entente a été signé en décembre 2018, entre les deux pays, pour l’organisation d’une année touristique et culturelle maro­caine en Chine en 2020. Il est égale­ment prévu que le Maroc abrite une année culturelle chinoise. Quels sont les enjeux diplomatiques de cet événe­ment culturel ?

– La Chine comme le Maroc sont connus, dans le monde, pour la richesse de leurs traditions culturelles et res­sources touristiques. Les échanges et coopérations dans les domaines cultu­rel et touristique favorisent la compré­hension mutuelle entre les deux peuples et constituent un aspect important du partenariat stratégique sino-marocain. L’année touristique et culturelle que nous organiserons conjointement en 2020 sera la première du genre entre la Chine et un pays africain, et elle va, j’en suis convaincu, resserrer l’amitié entre les Chinois et les Marocains, fa­voriser les échanges de personnes dans les deux sens, consolider les échanges et coopérations culturels et faire pro­gresser, sans cesse, le partenariat stra­tégique sino-marocain.

En 2018, le nombre de touristes chinois au Maroc a encore augmenté pour atteindre 200.000, un nouveau re­cord, et ce grâce à un intérêt croissant des Chinois pour la culture marocaine. Pendant l’année touristique et cultu­relle, nous allons organiser de multi­ples activités couvrant des domaines aussi variés que le tourisme, la culture, l’artisanat traditionnel, les patrimoines culturels matériels et immatériels, et nous sommes sûrs que cela permettra aux deux peuples de mieux connaître l’histoire, le développement ainsi que les us et coutumes de l’autre pays et de se rapprocher davantage dans le cadre de « la Ceinture et la Route ».

  • Quelle place occupe le Maroc dans la coopération sino-africaine?

– Le Sommet de Beijing du Fo­rum sur la coopération sino-africaine (FCSA) s’est tenu avec succès en sep­tembre dernier. Lors de ce sommet, le Président chinois Xi Jinping a annon­cé que la Chine se donnerait comme priorité la mise en oeuvre des « huit initiatives majeures » afin de dévelop­per sans cesse la coopération sino-afri­caine.

Le Maroc est un membre important du FCSA. Sa coopération accélérée avec la Chine reflète parfaitement le dynamisme de la coopération si­no-africaine. Surtout qu’actuellement, les entreprises chinoises sont plus nombreuses à venir investir dans le pays, et que les atouts marocains en termes de position géographique, de politique d’investissement préféren­tielle et de coût de main-d’oeuvre ont ouvert de belles perspectives à la coo­pération bilatérale, laquelle pourra tout à fait servir de modèle à la coopération sino-africaine.

Par ailleurs, dotés tous les deux d’un mûr mécanisme de coopération avec l’Afrique et de riches expériences en la matière, la Chine et le Maroc pour­ront associer leurs efforts en faisant valoir leurs avantages respectifs, de sorte à approfondir la coopération tri­partite dans le cadre de la coopération Sud-Sud et à contribuer à un meilleur développement en Afrique.

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