Mohammed VI, le Roi qui ose et qui bouscule

Par Souad Mekkaoui

 Limogeages sans état d’âme quand il le faut, colère rédhibitoire, re­cadrages intempestifs … S’il est une autre manière de régner et de gouverner, le Roi Mohammed VI sévit et réprime quand besoin est. Et Dieu sait que les occasions de se fâcher n’ont pas manqué tout au long de ces dernières vingt années, au cours desquelles il s’est efforcé d’imprimer la règle de la rigueur et de la cohérence.

Vingt ans déjà ! Ne s’empêche-t-on pas de dire.

Et si analystes et experts se sont précipités pour faire le bilan des vingt ans de règne, le Roi lui-même nous surprend, encore une fois, et dresse la balance à deux colonnes, croche pieds aux aigris qui ne voient que le verre à moitié vide.

Vingt ans déjà ! Tant de choses faites et tant de choses encore à réaliser ! Tel est donc le constat de Sa Majesté pous­sant plus loin « l’audace » dont le Sou­verain s’était prévalu dès ses premiers discours. Depuis et à chacune des occa­sions où il s’adresse au peuple, il nous prend de court, nous réconcilie avec l’autorité dont il a changé les contours et les tons, nous impressionne par son déterminisme et son courage à cham­bouler les codes et les règles.

Mohammed VI, jusqu’au bout de ses convictions

S’il est un Roi qui se fait l’avocat des causes de son peuple et qui défend ses conditions, son bien-être et surtout sa dignité c’est bien Mohammed VI. Déjà au lendemain de son intronisation et à travers son premier discours du trône, ses mots sonnaient comme un manifeste qui se voulait préambulaire d’un règne différent où la proximité et l’humain constituent l’épine dorsale. On savait dès lors qu’on allait vivre une ère « dans l’air du temps », avec un Roi visionnaire pour qui le règne est une responsabilité et une mission de foi. S’il a toujours affiché sa volonté d’édifier un Maroc moderne et un pays émergent en rompant avec certaines pratiques du passé, le Roi Mohammed VI a toujours rappelé les acquis de ses prédécesseurs, conscient que pour aller de l’avant, il faut s’appuyer sur son his­toire, tout en opérant la continuité avec une résonance plus personnelle, apte à s’adapter aux mutations du monde.

Et le pari est réussi ! Le Roi Moham­med VI, n’en déplaise à certains, en plus d’être le Roi des grands chantiers sectoriels, est le Roi qui change les pa­radigmes mais fait des fondamentaux son cheval de bataille. C’est le Roi qui a su assurer la stabilité du pays quand bien même l’heure était aux turbulences dans la région. Oui, il faut bien le reconnaître puisque c’est l’évi­dence même : le Maroc a changé à tout crin. Oui le Maroc progresse. « Certes, il ne nous a pas toujours été donné de réaliser tout ce à quoi nous aspirons. Mais, aujourd’hui, Nous sommes plus déterminés à maintenir le cap, en ca­pitalisant les acquis obtenus, en para­chevant la dynamique de réformes en cours, en corrigeant les dysfonction­nements observés sur le terrain. » dira Sa Majesté le Roi dans son dernier dis­cours du Trône. Les négativistes n’ont qu’à faire l’économie de leurs critiques. Loin de toute fanfaronnade, le Roi, en dépit du bond qualitatif en matière d’infrastructures sait que ce n’est pas suffisant et n’en pense pas moins que ses citoyens. Du coup, le goût amer de l’inachevé se fait sentir étant donné que les progrès et les réalisations, d’ores et déjà accomplis, n’ont malheureuse­ment pas encore eu des répercussions suffisantes sur l’ensemble de la société marocaine. Certes, le Maroc n’est pas le plus beau pays du monde, certes il y a à dire et à redire sur le combat conti­nuel de la classe moyenne, certes la jus­tice sociale n’est toujours pas le fort du pays, certes nos cerveaux se dérobent, mais on ne peut faire abstraction de toutes les avancées qui mettent le Ma­roc au devant de la scène internationale.

Tout reste à faire malgré tout

Si l’on estime à l’unanimité que les discours de SM le Roi Mohammed VI posent les bases d’une feuille de route traçant, à chaque fois, la voie à suivre selon la vision d’un chef d’État oeuvrant pour le développement, la co­hésion et la solidarité dans son pays, ce­lui du XXe anniversaire de son acces­sion au trône sonne comme la locution inaugurale d’une nouvelle étape. Celle qui énonce, de façon précise, l’ambi­tion de Sa Majesté le Roi de mettre le Royaume sur les rails d’une nouvelle ligne à grande vitesse.

Faut-il rappeler son discours très court et très structuré, du 9 mars 2011 qui avait médusé le pays. Des réformes constitutionnelles, la régionalisation, la reconnaissance de l’amazighité du pays tout y était. Il y cédait aussi une partie de ses prérogatives au premier ministre élu. Une révolution dans un pays où le roi, à la personne inviolable et sacrée, avait les pleins pouvoirs et gouvernait par dahir royal. Dès lors, le Maroc de Mohammed VI, à travers ses Discours, nous conforte dans ce qu’on avait bien compris : Mohammed VI n’a pas une conception autoritaire et dictatoriale du pouvoir. Ce Roi pour qui une monarchie patriotique et citoyenne est un choix majeur a toujours fait de la proximité avec son peuple l’une de ses devises. Et c’est grâce à ses orientations et à son leadership incontestables que le Maroc a réussi, peu à peu, à imposer sa singularité sur la scène internationale. Paradoxalement, entre l’image renvoyée par le Ma­roc à l’extérieur et la vérité criante des inégalités sociales l’écart se creuse davantage. De facto, mal­gré toutes ces réalisations qui ont changé le visage du Maroc, on se rend presqu’inévitablement à l’évi­dence : l’essentiel ne change malheu­reusement pas. Les riches continuent à s’enrichir et les pauvres s’appauvrissent de plus en plus. Ainsi, allant même jusqu’à penser contre soi-même, le Souverain, entre aspirations huma­nistes et quête morale d’un pays plus juste, reconnaît l’échec de notre mo­dèle de développement actuel et, bien évidemment, celui des partis politiques et du gouvernement. En conséquence, il annonce une Nouvelle Génération de Réformes à la faveur d’un Maroc réso­lument tourné vers l’Avenir, un Maroc où « s’estompent les disparités criantes et les comportements générateurs de frustration, où disparaissent les formes de rente existantes ». Aussi faut-il en finir avec les agissements et les as­pects négatifs, en faisant « triompher les valeurs de travail, d’engagement responsable, de mérite et d’égalité des chances ».

Une rentrée qui se fait attendre

Il est donc clair qu’il reste du chemin à parcourir afin de mettre à niveau le social. Tel est l’un des plus grands dé­fis des années à venir. C’est pourquoi le Roi Mohammed VI parle de nou­velle étape dont les maîtres mots sont « responsabilité » et « essor ». Pour la rentrée donc, nous avons rendez-vous avec une nouvelle étape qui abonde en enjeux et en défis autant internes qu’externes. Par ailleurs, « l’enjeu de consolidation de la confiance et des acquis : confiance entre les citoyens, confiance dans les institutions natio­nales qui les rassemblent, confiance et foi dans un avenir meilleur. C’est la clé de la réussite et la condition sine qua non pour que se concrétise notre ambi­tion collective. » souligne Sa Majesté. Néanmoins, il convient de noter que la réussite de cette nouvelle étape passe par l’implication et l’engagement des institutions et des instances nationales concernées. Mais elle ne peut se faire sans la mobilisation de tous comme l’a si bien dit Sa Majesté le Roi dans son discours.

Néanmoins, pour accompagner cette dynamique et s’inscrire dans ce dis­cours de la méthode du Roi Moham­med VI, cet objectif suppose une vision globale et des projets menées à bonne fin grâce à des ressources qualifiées et des conditions favorables. Et c’est dans ce sens que le Roi a décidé de mettre en place, dès la rentrée prochaine, une commission spéciale chargée du mo­dèle de développement. Sa mission sera de rendre compte d’un constat exact de l’état des lieux avec objecti­vité et impartialité. C’est pourquoi elle devra aussi être dotée de l’audace, d’es­prit d’initiative et du génie nécessaires pour proposer des solutions adaptées.

D’emblée, une nouvelle étape exige de nouveaux moyens et de nouvelles compétences. A cette fin, le remaniement gouvernemental s’annonce, enfin, imminemment pour y injecter du sang neuf. Insti­tutions et instances politiques, éco­nomiques et administratives sont appelées à ouvrir différents postes de responsabilités à des profils de haut niveau. L’heure est donc à la méritocratie. Pour cela, il faudra commencer par changer les men­talités. Et parce que les mots de Sa Majesté ne sont jamais fortuits, ce sont justement ces mentalités qui font que « les freins imposés par certaines législations nationales, la frilosité et l’indécision prépondé­rantes chez certains responsables cantonnent parfois le Maroc et le placent dans une posture néga­tive d’enfermement et de réserve » parce qu’ils cherchent avant tout à préserver leurs propres intérêts.

In fine, Un sang nouveau, un souffle nouveau pour un Maroc meilleur, un Maroc inclusif, un Maroc de tous.

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