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Mondial 2030 : un tournant pour l’immobilier marocain, mais à quel coût ?

Par Abir Ettayache

À l’horizon 2030, le Maroc s’apprête à accueillir un événement planétaire : la Coupe du Monde, co-organisée avec l’Espagne et le Portugal. Pour le Royaume, c’est une opportunité historique d’afficher sa modernité, de stimuler l’économie et de transformer durablement ses territoires. Parmi les secteurs les plus galvanisés : l’immobilier. Pourtant, derrière l’euphorie actuelle, se dessine un risque de vision à court terme.

En ce début d’année 2025, porté par une conjoncture favorable et la perspective de la Coupe du Monde, le volume des investissements s’envole. Plus de 322 milliards de dirhams ont déjà été recensés, selon les médias avec des projets d’infrastructures colossaux : stades, routes, hôtels, transports. Au milieu de tout cela, le marché immobilier marocain connaît un regain d’intérêt sans précédent

À Marrakech, véritable vitrine de cette frénésie, les prix flambent. Dans le quartier de Guéliz, le prix du mètre carré se négociait à 8 500 dirhams il y a à peu près un an, et ne cesse d’augmenter en ce début d’année 2025. Les investisseurs – notamment étrangers – affluent, attirés par une rentabilité locative pouvant atteindre 12 %. Même dynamique à Casablanca, Rabat ou Tanger, où la pénurie d’offres alimente l’envolée des prix, poussant le marché immobilier vers les périphéries.

Un catalyseur économique à double tranchant

Comme le soulignent les experts du secteur, cette dynamique économique positive nécessite d’être encadrée. Car si le Mondial agit comme un puissant moteur de croissance, il peut aussi engendre des risques à savoir la surchauffe du marché, spéculation excessive et déséquilibre entre l’offre et la demande.

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La tension est palpable : hausse de 17 % de la demande, contraction de 20 % de l’offre, selon les médias. Cette pression pousse à l’expansion urbaine, à la création de nouvelles zones résidentielles comme la ville verte de Zénata, et à une redéfinition du paysage urbain. Les infrastructures se modernisent, les pôles industriels émergent, mais les défis persistent : connectivité avec les centres-villes, risque de villes-dortoirs, envolée des prix, rendant le logement inaccessible aux classes moyennes.

Que disent les promoteurs immobiliers ?

Les acteurs du secteur mettent en avant plusieurs arguments pour souligner l’intérêt d’investir dans l’immobilier en ce moment. Ils évoquent notamment l’impact des grands événements sportifs, la croissance économique du Royaume portée par d’importants investissements dans les infrastructures, la hausse continue des prix de l’immobilier, l’augmentation du tourisme qui booste la demande pour les locations de courte durée, ainsi que les opportunités de partenariat avec des acteurs locaux et internationaux.
Des arguments en effet solides sur le papier, mais, pour la plupart, restent essentiellement axés sur une vision à court terme.

Des investissements massifs, mais pour qui ?

La Coupe du Monde 2030, c’est aussi 50 milliards de dirhams pour les infrastructures sportives, une perspective de 1,5 million de visiteurs, et des retombées touristiques estimées entre 2 et 3 milliards de dollars. Bien que faisable compte tenu du classement du Maroc en termes de tourisme, ces chiffres restent conditionnés à plusieurs facteurs.

L’exemple de l’Afrique du Sud, hôte du Mondial 2010, est édifiant où les effets positifs de la Coupe du monde furent temporaires en termes de création d’emplois et de baisse de la criminalité, et inférieurs aux estimations d’avant la Coupe du monde. En termes de chiffres, l’Afrique du sud a accueilli 309 000 touristes, venus pour la Coupe du monde ; ces derniers ayant dépensé environ 400 millions de dollars d’après les études du département du tourisme. Or, les estimations étaient de 480 000 et des dépenses par séjour trois fois plus importantes qu’en réalité. Dès lors, le Marocain risque de se retrouver dans le piège de l’investissement à court terme, basé sur une demande artificiellement gonflée par un événement ponctuel.

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