Nouvelle variante Covid et célébrations de fin d’année…Voici les raisons derrière les nouvelles mesures de restrictions

Sur la base des recommandations du Comité scientifique et technique, plusieurs mesures restrictives ont été annoncées par le gouvernement marocain, il y a quelques jours. Ces mesures, qui vont durer 3 semaines, englobent aussi l’interdiction des fêtes et des rassemblements publics ou privés ainsi que la fermeture des restaurants, cafés, commerces et grandes surfaces à 20h. Des experts expliquent à MAROC DIPLOMATIQUE les raisons derrière cette décision. 

A quelques jours des célébrations de fin d’année, le Maroc a décidé d’instaurer un couvre-feu nocturne, à l’échelle nationale, de 21h à 6h, en plus de nouvelles mesures restrictives, qui sont en vigueur depuis le 23 décembre et qui vont durer 3 semaines. Ces mesures englobent aussi l’interdiction des fêtes et des rassemblements publics ou privés ainsi que la fermeture des restaurants, cafés, commerces et grandes surfaces à 20h.

Ce n’est pas tout, à Casablanca, Marrakech, Agadir et Tanger, les restaurants devront fermer totalement pour une durée de trois semaines, mais peuvent continuer d’assurer la livraison à domicile et l’emporter. Ces décisions ont été adoptées afin de renforcer les procédures de l’état d’urgence sanitaire en vigueur depuis la mi-mars, sur la base des recommandations de la Commission scientifique et technique. Grosso modo, trois semaines d’arrêt des services à table pour les restaurants au niveau des grandes villes, tandis que les cafés resteront ouverts.

Un nouveau coup dur pour les restaurants ? 

A Casablanca, les professionnels du secteur ne décolèrent pas, pour cause la préparation de repas à emporter ne leur permet pas de couvrir leurs charges. « On essaie à peine d’équilibrer nos comptes après la crise due au confinement, nous voilà à nouveau face à la décision de la fermeture », s’insurge un restaurateur à Maârif, dans la capitale économique, qui a vécu cette nouvelle comme une douche froide. C’est le cas également d’un restaurateur à Tanger, Mohamed qui nous a déclaré : « on ne s’y attendait pas, surtout en cette période, qui constitue pour nous d’habitude une bouffée d’oxygène », a-t-il indiqué, en ajoutant que le couvre-feu va compliquer davantage la situation pour les professionnels de ce secteur, qui comptaient sur les fêtes de fin d’année pour récupérer les pertes d’une année morose. Dans ce contexte, l’Association nationale des propriétaires et gérants des cafés et restaurants au Maroc a pointé le manque de communication de la commission de veille avec les professionnels du secteur.

Les dessous « scientifiques » de cette décision

Notons que ces nouvelles restrictions ont été décidées sur la base des recommandations du Comité scientifique. Sur quelles bases ces recommandations ont-elles été formulées ? Nous avons posé la question à un spécialiste des maladies infectieuses et membre du Comité scientifique, qui nous a expliqué les défis auxquels sont confrontées les autorités et qui ont abouti à la prise de cette décision : taux de contamination élevé dans les lieux de rassemblement de la population, circulation de la nouvelle variante du coronavirus et célébrations de fin d’année.

Selon cet expert, il a été démontré scientifiquement que le risque de contamination demeure élevé dans tout endroit où il y a un rassemblement de personnes sans possibilité d’aération et où il y a contact étroit entre les personnes dans un espace fermé. « Il y a désormais une classification scientifique, faite par plusieurs équipes européennes et américaines, où il est clairement indiqué que les endroits à risque de contamination sont les bars, les cafés, les restaurants, les salles de sports, etc. », a-t-il fait savoir.

Pour docteur Moulay Said Afif, président de la Société marocaine des sciences médicales (SMSM) et membre du Comité national technique de vaccination, « chaque endroit de rassemblement est susceptible de créer des clusters, c’est pour cela qu’il faut que les gens respectent les gestes barrières à titre individuel et adhèrent à l’opération de vaccination pour qu’on puisse s’en sortir ».

La nouvelle variante sème l’inquiétude des experts

Ce n’est pas tout, l’apparition d’une nouvelle variante du Coronavirus est aussi une source d’inquiétudes pour le Comité scientifique. « Les collègues européens nous ont fait savoir que le virus a connu une mutation très importante et que celle-ci commence à circuler. Sa caractéristique est sa force de multiplication, ce qui veut dire que le risque de transmission de ce virus a augmenté de 30 à 40 fois », précise notre source qui pense que le virus serait déjà arrivé au Maroc puisqu’il y a eu des gens qui arrivent chaque jour d’Espagne, de France, des Pays-Bas, etc. Des pays où les premiers cas contaminés par la nouvelle souche Covid-19 ont déjà été identifiés. A cet effet, le Maroc est en train de faire une veille génomique à travers le laboratoire de virologie à Rabat, mais, « il est probable que dans les prochains jours, le Maroc confirme l’identification du premier cas contaminé par nouvelle variante».

Dans ce contexte, Dr Afif appelle à respecter scrupuleusement les gestes barrières. « La nouvelle variante n’est pas plus virulente, mais plus contagieuse, ce qui veut dire qu’elle va atteindre les gens vulnérables », nous a-t-il confié, rappelant que le seul moyen pour qu’on puisse retourner à la normale est de vacciner 80% de la population d’ici l’été. Pour l’instant, aucun cas de la nouvelle variante du Covid-19 n’a été recensé au Maroc d’après « une série de tests effectués par l’Institut Pasteur», selon les déclarations du ministre de la Santé à nos confrères.

3 semaines de mesures restrictives : le pourquoi du comment 

En réponse à cette question, notre premier interlocuteur, qui est membre du Comité scientifique nous a déclaré : « Nous n’avons rien contre les bars et les restaurants et si on avait d’autres solutions, nous les aurions proposées. Même les grandes puissances étaient obligées de faire la même chose. Le Comité scientifique, pour sa part, est juste chargé d’apporter des réponses aux interrogations des responsables qui prennent la décision, sur la base de données scientifiques ».

Par ailleurs, il y a d’autres facteurs de risques à prendre en compte. Selon la même source, « On a tous suivi les retombées de la fête de Aid Al-Adha sur la situation épidémiologique et j’étais personnellement contre l’idée de maintenir les célébrations. Je suis passé 3 ou 4 fois à la télé pour dire : Ne voyagez pas et restez chez vous, mais cela n’a rien donné, tout le monde a voyagé et après, c’était la catastrophe. On est passé de 200 cas à 4000 voire 5000 cas par jour ».

D’autant plus que la baisse du nombre de tests quotidiens, depuis quelques semaines inquiète plusieurs experts. « Il ne faut pas se fier aux chiffres qui sont enregistrés aujourd’hui, parce que le nombre de tests a diminué et les gens ne se testent plus comme avant », nous dit notre source.

Mais, alors, pourquoi 3 semaines de restriction ? « Parce que les retombées ne se  font pas ressentir dans l’immédiat, il faut attendre la durée d’incubation qui peut prendre 7 à 10 jours », explique ce membre du Comité scientifique.

Les décisions restent toutefois difficiles à prendre dans ce contexte pour le président de la Société marocaine des sciences médicales (SMSM), « parce qu’il faut toujours garder la balance entre la vie économique du pays et la situation sanitaire ».

Le grand défi de l’opération de vaccination 

A l’heure où l’opération de vaccination est prévue prochainement, le fait de se retrouver avec de nombreuses personnes contaminées risque d’entraver le bon déroulement de cette opération. « Notre souci est aussi de protéger le personnel médical, le fait qu’il y ait des cas positifs à la Covid parmi les professionnels soignants risque d’être une catastrophe », explique ce spécialiste des maladies infectieuses. Un avis que partage docteur Afif, « si on veut que l’opération de vaccination se passe bien, il faut que le nombre des cas Covid diminue ». Comme les professionnels de la Santé seront au frontline de l’opération de vaccination, « il ne faut pas que les hôpitaux soient saturés des cas Covid, parce que le personnel médical n’est pas extensible », conclut-il.

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