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Nucléaire civil : Le Maroc consolide son expertise et étend son leadership au service de l’Afrique

Par Hajar Ben Hosain 

Engagé dans une dynamique de développement technologique et scientifique, le Maroc renforce sa position en tant qu’acteur clé de l’utilisation pacifique du nucléaire. Fort de son expérience et de son expertise croissante, le Royaume affirme sa volonté de partager ses acquis, notamment avec les pays africains membres de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA), contribuant ainsi à un avenir énergétique plus sûr, durable et solidaire.

À l’occasion de la session du Conseil des gouverneurs de l’AIEA, qui se tient du 9 au 13 juin à Vienne, le Maroc a souligné avoir développé, grâce au soutien de l’AIEA, une expertise reconnue dans de nombreux domaines, notamment la santé, la médecine nucléaire, la nutrition, l’eau, l’agriculture, l’industrie et l’environnement.

Selon la MAP, l’ambassadeur représentant permanent du Maroc auprès des organisations internationales à Vienne, Azzeddine Farhane, a déclaré ce lundi 9 juin 2025, lors de son intervention devant le Conseil des gouverneurs de l’AIEA, que le Maroc reste pleinement engagé à partager son expérience en matière d’utilisation pacifique, sûre et sécurisée des technologies nucléaires avec ses partenaires, en particulier les États africains membres de l’Agence. Il a également rappelé que le Royaume a mis en place des centres de formation reconnus, spécialisés dans l’application des techniques nucléaires dans divers secteurs, comme le confirme le rapport annuel de l’AIEA pour l’année 2024.

En effet, le rapport met en avant la première réunion régionale organisée conjointement par le Maroc et l’AIEA dans le cadre de l’initiative ZODIAC, qui vise à renforcer les capacités de détection et de lutte contre les maladies infectieuses zoonotiques. Cet événement a réuni 34 laboratoires nationaux africains afin de partager leurs expériences, d’évaluer les résultats obtenus et d’identifier des synergies avec d’autres initiatives similaires. Le document souligne également la tenue, à Rabat en février 2024, de la réunion régionale des agents de liaison et des coordinateurs nationaux de l’Accord Régional Africain de Coopération pour la Recherche, le Développement et la Formation liés à la Science et la Technologie Nucléaires (AFRA), qui a rassemblé 37 États membres africains autour d’échanges d’expériences et de bonnes pratiques en matière d’utilisation pacifique des techniques nucléaires.

Concernant l’initiative « Rayons d’espoir » lancée par le directeur général de l’AIEA, le diplomate a précisé que le rapport reconnaît le rôle de l’Institut national marocain d’oncologie, désigné centre de référence de l’Agence, dans le renforcement des capacités des États membres africains à travers la formation et le partage d’expertise. Il a également souligné que, au-delà de son engagement en faveur des applications pacifiques du nucléaire, le Maroc appuie activement les efforts internationaux en matière de sûreté et de sécurité nucléaires. Le Royaume assume ainsi plusieurs responsabilités : la présidence du Comité directeur du Réseau mondial de sûreté et de sécurité nucléaires (GNSSN), la coordination pour l’Afrique du Nord au sein du Forum des organismes de réglementation nucléaire en Afrique (FNRBA), ainsi que la participation à la Commission des normes de sûreté (CSS) de l’AIEA.

Lire aussi : Garanties nucléaires : le Maroc atteint le niveau maximal de l’AIEA

L’ambition nucléaire structurée du Maroc

De fait, le Maroc s’est peu à peu affirmé comme un acteur majeur du nucléaire civil, alliant ambition historique, infrastructures de recherche de pointe et partenariats stratégiques à l’échelle internationale. Grâce à un centre nucléaire de référence reconnu par l’AIEA, à des accords bilatéraux novateurs et à une feuille de route visant à intégrer l’énergie nucléaire dans son mix énergétique à l’horizon 2030, le Royaume met son expertise technique et diplomatique au service d’une vision énergétique à la fois durable et souveraine.

En effet, Avec 70 % des réserves mondiales de phosphate, dont est extrait l’uranium, le Maroc dispose d’un levier majeur pour son ambition nucléaire. Une richesse naturelle qui place le Royaume en pole position dans la course à l’énergie atomique, alors que Rabat prépare méthodiquement ce virage depuis une décennie. Dès 2014, le pays a entamé la construction d’un cadre juridique, tout en accumulant expertise et évaluations techniques pour concrétiser cette ambition. Une stratégie patiente, mais qui pourrait faire du Maroc un acteur clé dans le paysage énergétique mondial de demain.

A cet égard, le Maroc, reconnu par l’AIEA comme l’un des 13 futurs pays producteurs d’énergie nucléaire, confirme son engagement dans cette voie stratégique. En février 2024, Rabat a signé à Vienne le Country Programme Framework (CPF) 2024-2029, un accord qui structure sa coopération avec l’AIEA autour de six priorités nationales : la sûreté nucléaire et la radioprotection, la sécurité alimentaire et l’agriculture, la santé humaine, la gestion des ressources en eau, le développement du nucléaire civil et les applications industrielles, incluant notamment les réacteurs de recherche et les techniques non destructives.

Des partenariats au cœur de l’atome

Le Royaume, membre de l’AIEA depuis 1957, a par ailleurs renforcé son partenariat en septembre 2024 en renouvelant un accord de coopération entre son centre national dédié aux sciences et techniques nucléaires (CNESTEN) et l’AIEA. Cet engagement, scellé lors de la 68ᵉ Conférence générale de l’AIEA, vise notamment à développer l’utilisation des techniques isotopiques dans des secteurs clés comme la gestion de l’eau, l’environnement et l’industrie, à travers des programmes de formation et la fourniture de services analytiques. Le CNESTEN, déjà labellisé Centre régional d’excellence AFRA dans des domaines comme l’hydrologie isotopique et les essais non destructifs, consolide ainsi son rôle de plateforme technologique de référence en Afrique.

Parallèlement, le Maroc a développé une coopération active avec la Russie dans le domaine du nucléaire civil. Depuis 2017, plusieurs accords ont été conclus entre les deux pays. Un protocole de coopération, signé en 2017, a été officiellement ratifié par le gouvernement russe le 12 octobre 2022. Ce document prévoit une collaboration dans pas moins de quatorze domaines, allant de la construction et l’amélioration d’infrastructures nucléaires à la conception de réacteurs, en passant par la réalisation de sites de dessalement d’eau, d’accélérateurs de particules, la gestion du cycle du combustible et des déchets radioactifs, l’exploration de gisements d’uranium, ainsi que la formation du personnel, notamment celui de l’AMSSNuR, l’autorité marocaine de sûreté nucléaire.

En outre, lors du deuxième Forum Russie-Afrique, tenu à Saint-Pétersbourg en juillet 2023, l’entreprise marocaine Water & Energy Solutions (WES) a signé un protocole d’accord avec Rusatom Smart Utilities -filiale de Rosatom- en vue de coopérer sur des projets de dessalement d’eau de mer utilisant l’énergie nucléaire. L’objectif de cet accord est d’examiner l’intégration de la technologie Rosatom afin de réduire les coûts énergétiques liés au dessalement. Ces initiatives avec la Russie constituent un aspect important de la stratégie du Maroc pour développer son programme nucléaire civil, en particulier pour le dessalement.

Le Maroc a par ailleurs renforcé sa coopération nucléaire avec l’Union européenne à travers le programme Euratom-Maroc, qui vise à améliorer la sûreté des installations nucléaires, la gestion des déchets radioactifs et à aligner le Royaume sur les standards internationaux en matière de sécurité nucléaire. Ce partenariat stratégique permet au Maroc d’accéder à des technologies nucléaires de pointe et de participer à des projets européens de recherche et développement, consolidant ainsi sa position dans le paysage énergétique mondial. Le Royaume est désormais perçu comme un véritable pont technologique entre l’Europe et l’Afrique, en mesure de favoriser le transfert de compétences et de technologies nucléaires vers le continent africain.

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