Polisario : Le nouveau visage du terrorisme transfrontalier

La menace n’est plus lointaine. Elle n’est plus hypothétique. Elle est aux portes de l’Europe, infiltrée, insidieuse, masquée sous les habits du pacifisme humanitaire, et elle porte un nom : le Polisario. Ce mouvement séparatiste, jadis relégué au statut de dossier régional enfermé dans les sables brûlants du Sahara, opère aujourd’hui sa métamorphose la plus inquiétante. Nourri par la complaisance idéologique de certaines capitales européennes, armé par une Algérie obsédée par l’illusion d’un leadership continental, et désormais immergé dans les réseaux djihadistes du Sahel, le Polisario se positionne comme l’un des catalyseurs majeurs de la déstabilisation de l’Afrique de l’Ouest – et, par ricochet, de la sécurité de l’Europe.
L’alerte est venue cette fois-ci, d’Italie, par le média ATLANTICO, relayée dans un article percutant intitulé « Alerte au Sahel : le risque d’un sanctuaire djihadiste hors de contrôle aux portes de l’Europe ». Le constat est glaçant : les liens avérés entre le Polisario et les réseaux djihadistes ne sont plus des spéculations. Ils sont documentés, suivis, observés. Ils se traduisent concrètement par l’implication de membres du front Polisario dans les rangs d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), de l’État islamique au Grand Sahara (EIGS), et dans les trafics d’armes, d’êtres humains et de stupéfiants qui financent ces hydres terroristes. Le plus grave, c’est que cette infiltration n’est pas une dérive marginale, mais une stratégie. Le Polisario, abandonné par la majorité des pays du monde dans sa quête d’indépendance chimérique, s’est reconverti. Il est passé de l’idéologie à la délinquance, puis du soi-disant nationalisme armé au militantisme djihadiste. Dans les camps de Tindouf, zone de non-droit opaque et impénétrable du droit international situé en territoire algérien, s’entraîne désormais une nouvelle génération de combattants déterritorialisés, endoctrinés, désespérés – donc mobilisables.
Le programme dit des « ambassadeurs de la paix », piloté depuis l’Italie et financé par Alger, en est une démonstration terrifiante. Sous couvert d’action humanitaire inspirée du programme espagnol « Vacances en paix », cette initiative prétend extraire des enfants sahraouis des camps pour leur offrir un répit estival en Europe. La réalité est tout autre. Ces programmes ont été détournés, instrumentalisés. Selon les services de renseignement espagnols, plusieurs anciens bénéficiaires de « Vacances en paix » ont été identifiés parmi les rangs d’organisations terroristes opérant au Sahel. Ces jeunes, élevés dans des familles espagnoles, devenus bilingues, parfaitement intégrés culturellement, sont aujourd’hui au sommet de la hiérarchie terroriste. Leur profil inquiète les services de sécurité : invisibles, mobiles, efficaces, capables de communiquer avec les diasporas sans éveiller le moindre soupçon. Ils incarnent le terrorisme moderne : celui qui ne porte plus de barbe ni de kalachnikov, mais qui sait utiliser un passeport européen et un langage fluide pour frapper au cœur.
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L’auteur de l’article appelle à la vigilance qui doit être totale. L’Italie, en ouvrant la porte à une initiative calquée sur un modèle déjà perverti, court un risque majeur. Celui d’introduire sur son sol, sous une forme enjolivée et moralement valorisée, les germes d’un extrémisme bien réel. Ce n’est pas un fantasme sécuritaire mais c’est la réalité vécue par les services espagnols, dont les rapports confidentiels, récemment dévoilés, décrivent avec précision les méthodes d’infiltration utilisées par le Polisario et ses soutiens. Ces rapports indiquent que les réseaux criminels utilisés pour faire passer migrants, armes et drogues sont les mêmes que ceux qui permettraient à des cellules djihadistes de se fondre dans les flux migratoires si l’ordre était donné. Le CNI (Centre National de Renseignement) espagnol est formel : le Sahel est devenu l’épicentre du terrorisme mondial, et les ramifications du Polisario y sont centrales.
Au cœur de cette architecture du chaos, un acteur régional tire les ficelles : l’Algérie. En entretenant le Polisario, en le finançant, en lui offrant une zone de repli dans les camps de Tindouf, Alger alimente consciemment une déstabilisation régionale qui lui permet de maintenir une pression constante sur ses voisins, tout en servant de point de contact pour les ambitions géostratégiques d’acteurs extérieurs, notamment l’Iran et le Hezbollah. Un rapport accablant de la Fondation pour la défense des démocraties (FDD) l’a récemment souligné : le Polisario est aujourd’hui une passerelle pour la pénétration iranienne en Afrique du Nord. En mai dernier, The Washington Post révélait la présence dans les prisons syriennes de membres du Polisario, venus renforcer les troupes du Hezbollah en Syrie. En juin, le Center for National Interest, ex-Nixon Center, confirmait à son tour l’usage des réseaux dudit mouvement dans l’infiltration du Sahel par les services algériens.
Ces révélations doivent être un électrochoc pour les autorités européennes. Le Polisario ne peut plus être perçu comme un acteur inoffensif d’un conflit lointain. Il est désormais une pièce maîtresse d’un axe de déstabilisation qui combine séparatisme, radicalisme religieux, trafic transfrontalier et manipulation idéologique. Il est un agent du chaos dans une région en pleine effervescence djihadiste, et une menace directe pour la sécurité des Européens. Le terrorisme sahélien n’est plus cantonné à Gao, Tombouctou ou Mopti. Il a ses relais à Rome, Madrid, Barcelone, Palerme.
Face à ce constat, une réponse s’impose : celle de la lucidité stratégique. Elle passe par une remise en question sans tabou de tous les programmes dits « humanitaires » liés aux milieux du Polisario. Elle exige une coopération renforcée avec les acteurs régionaux les plus fiables, au premier rang desquels le Maroc. Le Royaume, fort d’une diplomatie proactive au Sahel et d’un appareil sécuritaire reconnu, constitue un rempart crédible et expérimenté contre les menaces transnationales. Les services italiens, tout comme leurs homologues européens, gagneraient à s’appuyer sur l’expérience marocaine, tant en matière de prévention que de renseignement opérationnel.
Car il ne s’agit plus de géopolitique, ni même d’idéologie. Il s’agit de sécurité. De survie. Il s’agit de savoir si l’Europe saura reconnaître ses ennemis véritables avant qu’il ne soit trop tard. Le Polisario, en se transformant en outil de pénétration idéologique, en plateforme logistique du djihadisme sahélien, en relais d’intérêts iraniens ou algériens, a franchi un seuil. Celui qui sépare le « militantisme » du terrorisme. Celui qui transforme un faux combat de libération en réelle menace de destruction. Il est encore temps d’ouvrir les yeux. Mais le temps presse.