Relations Maroc-Brésil : une coopération Sud-Sud solidaire

Par Saad Bouzrou

Il n’est pas exagéré de dire que les relations entre le Maroc et le Brésil revêtent un caractère particulier. Les liens entre les deux pays ne datent pas d’hier. Ils ont commencé au XVIII siècle, lorsque des immigrants marocains sont arrivés au Brésil, attirés notamment par le cycle d’exploitation du caoutchouc en Amazonie, et lorsque le Brésil a pris les premières mesures pour établir des représentations diplomatiques sur le territoire chérifien.

sur le plan politique, une étape extraordinaire a été franchie, avec la visite au Brésil, en 2004, de S.M. le Roi Mohammed VI, qui avait déjà rendu visite à Rio de Janeiro en 1992, alors prince héritier, en sa qualité de représentant du Maroc à la Conférence Rio-92 sur l’environnement et le développement.

Des relations séculaires et amicales

En 1861, un premier consulat a été ouvert à Tanger, suivi d’autres consulats brésiliens dans d’autres villes du Maroc. En 1906, un ministre plénipotentiaire brésilien présente, pour la première fois, ses lettres de créance au Sultan du Maroc. Après la restauration de l’indépendance du Maroc en 1956, le Brésil rétablit rapidement ses relations et ouvrit, en 1961, son ambassade à Rabat, dirigée par le grand écrivain brésilien Rubem Braga.

Depuis lors, les liens entre le Brésil et le Maroc se sont élargis et consolidés. Au niveau politique, un dialogue a été engagé caractérisé par l’amitié et la convergence de vues entre les deux pays en développement, sur la base d’un sentiment spontané de sympathie réciproque entre les deux peuples. Dans le même temps, les échanges économiques et commerciaux se sont diversifiés, même si à ce niveau, les relations sont encore bien en deçà du niveau escompté, compte tenu de la forte présence économique des deux pays dans leurs régions respectives.

Une coopération multidimensionnelle

Récemment, sur le plan politique, une étape extraordinaire a été franchie, avec la visite au Brésil, en 2004, de SM le Roi Mohammed VI, qui avait déjà rendu visite à Rio de Janeiro en 1992, alors prince héritier, en sa qualité de représentant du Maroc à la Conférence Rio-92 sur l’environnement et le développement. En 2018, le chef du gouvernement du Maroc, Saâd Eddine El Othmani, s’est rendu au Brésil, à l’occasion du Forum mondial de l’eau, où il s’est entretenu avec l’ex-président Michel Temer. Ces réunions de haut niveau ont révélé une grande entente entre le Maroc et le Brésil sur des questions d’intérêt commun, étant donné qu’ils sont deux pays ouverts sur l’extérieur, convaincus que la coopération Sud-Sud est, aujourd’hui, plus que jamais avantageuse et fructueuse et continuent leurs efforts pour donner plus de dynamisme à une coopération multidimensionnelle qui concerne tous les niveaux, politique, économique, social et culturel. En janvier 2019, Le Chef du gouvernement, qui a représenté SM le Roi Mohammed VI à la cérémonie d’investiture du nouveau président élu du Brésil, Jair Bolsonaro, a d’ailleurs évoqué la présence, de part et d’autre, d’ « une volonté de développer ces relations pour le mieux dans les domaines économique, politique et des échanges entre les deux peuples ».

La diplomatie parlementaire entre la République fédérative et le Royaume est devenue aussi dynamique ces dernières années, notamment avec l’instauration des groupes d’amitié parlementaires dans les chambres législatives des deux pays. Au Brésil, suite aux visites, au Maroc, du sénateur Fernando Collor de Mello (juillet 2017 et novembre 2017), le groupe d’amitié Brésil-Maroc a été installé au Sénat fédéral et une première réunion conjointe avec le groupe homologue marocain a eu lieu en mars 2018 à Brasilia, où un ambitieux programme de travail en commun a été défini.

Entre 2000 et 2012, les échanges commerciaux sont passés de 221 millions USD à un niveau record de 2,15 milliards USD

L’intérêt du rapprochement entre les deux peuples

L’intérêt réciproque entre les deux pays est visible aussi dans le nombre de touristes brésiliens qui visitent le Maroc chaque année. Depuis 2013, avec la reprise des vols directs (SP-Casablanca et Rio-Casablanca) – qui ont déjà une fréquence quotidienne -, le nombre de touristes brésiliens a considérablement augmenté. En 2016, il y en avait environ 32 000. En 2017, le nombre a dépassé les 45.000. Dans le même temps, le nombre de touristes marocains au Brésil a également augmenté. Les voyages dans les deux sens sont également facilités par la non-obligation d’un visa. Les échanges touristiques, ainsi que les initiatives culturelles, favorisent donc un rapprochement entre les deux peuples et, le cas échéant, une meilleure connaissance réciproque.

Un partenariat économique marqué du sceau de l’essor

Quant aux relations économiques et commerciales, elles ont fortement augmenté au cours des 15 dernières années. Entre 2000 et 2012, les échanges commerciaux sont passés de 221 millions USD à un niveau record de 2,15 milliards USD.

Pendant trois années consécutives – 2011, 2012 et 2013 – les échanges bilatéraux sont restés supérieurs à 2 milliards de dollars américains. Entre 2014 et 2016, il y a eu une certaine récession en raison de la crise économique au Brésil. En 2017, toutefois, il y avait une nette reprise, avec une augmentation (par rapport à 2016) d’environ 32% des importations brésiliennes de produits marocains et d’environ 26% des exportations brésiliennes à destination du Maroc. En conséquence, le Brésil a importé environ 868 millions USD du Maroc en 2017 et en a exporté environ 615 millions USD. En 2018, un solde de 252 millions de dollars américains avait été enregistré en faveur du Maroc.

Mais les échanges entre les deux pays sont encore concentrés sur des produits naturels. En fait, le Brésil renouvelle chaque année une forte demande de phosphates et d’engrais, dont le Maroc est un fournisseur majeur dans le monde. Au même moment, le Maroc importe de gros volumes de sucre, et d’autres produits agricoles. Avec l’approfondissement et la diversification des relations bilatérales et les efforts visant à réduire ou à éliminer les obstacles aux échanges, le même dynamisme devrait se manifester dans d’autres secteurs, notamment le secteur industriel. En ce sens, la négociation d’un accord de libéralisation des échanges entre le MERCOSUR (Marché commun du Sud)et le Maroc revêtirait une grande importance, de même que la signature d’un accord de coopération et de facilitation des investissements, qui fournira un cadre juridique favorable au développement des initiatives d’investissement des entreprises des deux pays amis.

Le Brésil et le Maroc partagent le même voisinage atlantique. De São Paulo à Casablanca, il y a neuf heures de vol, soit moins que de São Paulo à New York (9 heures et 45 minutes) ou à Paris (11 heures), et c’est un grand atout qui devrait être exploité davantage pour approfondir les relations bilatérales dans les années à venir. En conséquence, l’océan atlantique ne doit pas être perçu comme un fossé ou un obstacle à la coopération bilatérale entre les deux pays, mais plutôt un trait d’union.

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