Les Relations maroco-françaises : « Amitié et Partenariat pour la prospérité de tous ».

Par Ali Lahrichi ,Docteur en Sciences Politiques et Juridiques

Les relations bilatérales entre le Maroc et la Francedepuis l’accession au trône de Sa Majesté le Roi Mohammed VI en 1999 empruntent le chemin du changement dans la continuité, et se construisent sur le dogme de l’amitié portant la devise : « Amitié et Partenariat pour la prospérité de tous ». 

Cette devise est la plus grande caractéristique qui écrit la permanence des relations entre les deux pays. Par ailleurs, le Maroc est le pays de l’Afrique du Nord avec lequel la France entretienne les meilleures relations. 

En effet, depuis plus d’un demi-siècle, ces relations se sont construites dans le cadre de rapports bilatéraux constructifs. Elles sont la traduction d’une large convergence d’approches sur de nombreux dossiers bilatéraux. Elles s’articulent autour d’entretiens réguliers au niveau des Chefs d’Etat et des gouvernements. La plus belle démonstration de ces liens indéfectibles se manifeste par le choix de la première visite d’Etat de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, qui était pour la France en 2000.

Les relations politiques entre le Maroc et la France, lors des vingt dernières années, se manifestent au plus haut sommet de l’Etat. Elles se traduisent par les visites et rencontres régulières entre les chefs d’Etat. D’une part le Roi du Maroc Mohammed VI, et d’autre part, les Chefs d’Etat français qui se succèdent au palais de l’Elysée, depuis Jacques Chirac qui a confessé au Roi toute sa gratitude au Maroc et à feu son père le Roi Hassan II : « je dois tout à votre père », et Nicolas Sarkozy puis François Hollande, qui ont dessiné ensemble, chacun lors de son mandat, avec le Souverain marocain les axes stratégiques de partenariat entre les deux nations, et aujourd’hui avec le Président Macron qui a effectué sa première visite en dehors de l’Union Européenne au Maroc en réponse à l’invitation du Roi Mohammed VI.

Dans la même ligne de conduite, ce sont les rencontres des chefs de gouvernements qui prennent les relais pour développer le partenariat entre les deux pays. 

Des entretiens réguliers entre les chefs de l’Etat

Après la première visite d’Etat de Mohammed VI pour la France en 2000, suite à son accession au trône, lSouverain marocain a également été le premier chef d’Etat à être reçu par le Président François Hollande, une semaine après la passation de pouvoir en mai 2012. Cet entretien avait été l’occasion de réaffirmer la place exceptionnelle qu’accorde la France à ses relations bilatérales avec le Maroc. Il a été aussi, le dernier chef d’Etat reçu par François Hollande, le 2 mai 2017, dans l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle. Lors de cette visite,Le président de la République a offert un déjeuner à l’Elysée pour son hôte marocain et où les deux chefs d’Etat étaient entourés des ministres des affaires étrangère français et marocain, ainsi que de personnalités du monde politique, culturel, artistique et associatif reflétant la diversité, la vitalité et l’intimité des liens entre la France et le Maroc.

A leurs tours, les présidents français ont choisi de rendre visite au Royaume du Maroc pour témoigner de l’amitié et de la solidité des relations bilatérales entre les deux pays. En octobre 2003, la visite du Président Chirac était un témoignage de toute l’amitié que porte la France et son Chef d’Etat au Maroc et à son souverain ainsi qu’a son défunt père. Cette visite est arrivée aussi pour consolider les acquis des relations bilatérales et de coopération entre les deux pays tout au long de l’ère Chirac et qui ont été consacré par la Convention de partenariat pour la coopération culturelle et le développement de juillet 2003. En octobre 2007, la visite du Président Sarkozy au Maroc était une occasion qui a ouvert le bal aux deux chefs d’Etat pour afficher leur volonté commune de renforcer le partenariat privilégié entre les deux pays. Plusieurs accords de coopération ont été signés dans les domaines du transport, de la justice, de la sécurité sociale, des mines et de l’équipement. L’un des plus importants accords, est celui relatif au projet du train à grande vitesse (LGV)

Le Président de la République François Hollande quant à lui, a effectué une visite d’Etat au Maroc, à Casablanca et Rabat, les 3 et 4 avril 2013, à l’invitation du Roi Mohammed VI. Une trentaine d’accords, de conventions et de contrats ont été signés. La visite à Tanger du président de la République, les 19 et 20 septembre 2015, s’est déroulée dans un climat très chaleureux, avec un accueil exceptionnel de la part du Roi. A cette occasion, les deux chefs d’Etat ont notamment signé ensemble un Appel pour une action forte et solidaire en faveur du Climat et ont présidé à la signature d’une déclaration conjointe pour la formation des imams. 

Le Président Emmanuel Macronlors de sa visite d’amitié au Maroc les 14 et 15 Juin 2017, rappelle dans la conférence de presse qui fait suite à la rencontre de Chef d’Etats le socle solide des relations maroco-françaises qui assure la permanence et se nourrit toujours des perspectives du renouveau : 

« Le Maroc, en effet, est un pays ami et un partenaire stratégique pour la France et c’est ce qui explique ce déplacement que j’ai souhaité, à l’invitation personnelle de Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Cette visite au caractère privilégié est, je crois, à la ressemblance de nos relations entre la France et le Maroc, fondées sur une vision commune et une volonté de poursuivre nos intérêts conjoints, non seulement au Maroc, mais également dans la région et, plus largement, en Afrique».

Des rencontres de haut niveau (RHN) entre les chefs de gouvernements

La confiance mutuelle entre les deux Etats se révèle aussi par les rencontres annuelles au niveau des chefs de gouvernement, mises en place depuis 1997, ont également permis de rapprocher le dialogue politique et celui entretenu avec les partenaires politiques européens les plus proches. La IXe rencontre, qui a réuni le Premier ministre François Fillon et son homologue marocain Abass el Fassi, le 17 et 18 avril 2008, a été marqué par la signature de dix-sept conventions bilatérales et accords commerciauxLa XIrencontre de haut niveau a eu lieu les 12 et 13 décembre 2012 à Casablanca et Rabat. Elle a réuni le Premier ministre Jean-Marc Ayrault et le Chef de gouvernement, M. Abdelilah Benkirane, qui ont présidé ensemble un séminaire intergouvernemental rassemblant dix-huit ministres des deux pays. La rencontre a donné lieu à la signature de vingt-six accords, conventions et contrats dans les domaines structurants de la coopération maroco-française.

La XIIe rencontre de haut niveau, co-présidée par les deux premiers ministres, s’est tenue à Paris le 28 mai 2015 et a donné lieu à la signature d’une vingtaine d’accords dans tous les domaines.

Ces rencontres permettent de dégager une série d’orientations constantes, et permettent à d’autres de se renforcer. Selon une étude dirigée pour le compte du ministère des Affaires étrangères sur la coopération franco-marocaine, ces rencontres régulières, dites « rencontres de haut niveau », permettent de dégager une série d’orientations constantes et de renforcer d’autres : «  

• Deux axes sont récurrents : l’appui aux plans macroéconomique (traitement de la dette) et microéconomique (soutien aux petites et moyennes entreprises), d’une part, et le développement social, d’autre part ; 

• L’importance de la coopération de la société civile est soulignée de manière croissante, au fur et à mesure des rencontres successives ;

• Le principe du co-développement est régulièrement rappelé ;

• La coopération culturelle ;

• Au plan international, l’accent est mis sur la relation privilégiée du Maroc avec l’Union européenne et sur le souhait d’une coopération tripartite ».

Les rendez-vous annuels des chefs de gouvernement sont l’occasion de plusieurs rencontres, formelles ou informelles, entre ministres, secrétaires d’État, directeurs et hauts fonctionnaires d’administration centrale, membres des corps d’inspection, dans le cadre d’entretiens politiques, de réunions de travail, de manifestations publiques, de séminaires, d’échanges. 

Les rencontres entre les chefs de gouvernement ont contribué largement au renforcement et à la consolidation du partenariat stratégique et des domaines de la coopération entre la France et le Maroc. 

La coopération entre les deux Etats s’est propulséegrâce à la dynamique créée par la Convention de partenariat pour la coopération culturelle et le développement de juillet 2003 et par le document cadre de Partenariat (DCP) de 2006-2010, qui a précisé les axes souverains de partenariat entre le Maroc et la France. 

La Convention de coopération en 2003, a mis en place un dispositif plus opérationnel autour d’un Conseil d’orientation et de pilotage du partenariat, de comités sectoriels thématiques, d’un forum de partenariat et d’un Fonds inactif de partenariat. A travers ces nouveaux outils, la coopération a emprunté la voie de la concrétisation d’une manière opérationnelle. Ils ont permis aussi l’émergence de projets pilotes. Cette convention a donné le ton à de nouveaux modes de coopération, tant dans le domaine de la société civile que dans celui de la coopération décentralisée.

La XIIIème Rencontre Haut Niveau (RHN) Maroc- France 

Le Premier ministre français va coprésider à Rabat avec le chef du gouvernement marocain, les travaux de la 13ème rencontre de haut niveau Maroc- France, les 15 et 16 novembre 2017. Selon Matignon : « Dans un contexte de relation d’amitié exceptionnelle entre la France et le Maroc, le Premier ministre, accompagné de neuf ministres, coprésidera avec son homologue, Saâdeddine El Othmani, la 13e rencontre de haut niveau à Rabat. Cette rencontre s’orientera autour des thématiques économiques bilatérales et de la mise en œuvre de notre coopération en faveur de l’Afrique »

La délégation française qui participe à cette RHN est composée par plusieurs ministres dont le ministre de la Justice, le ministre de l’Éducation nationale, la ministre de la Culture, la ministre des Sports, le ministre délégué à l’Intérieur et le Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des finances et aussi des PDG de grandes entreprises françaises notamment ceux qui opèrent dans les domaines portuaire, ferroviaire, portuaire et agroalimentaire. 

La XIIIème RHN Maroc-France aura pour pierre angulaire les thématiques économiques bilatérales, l’éducation et la jeunesseet la coopération des deux Etats en faveur de l’Afrique. Cette visite sera consacrée par l’ouverture par le premier ministre français et le chef du Gouvernement marocain du Forum économique franco-marocain où seront présentes plus de 150 entreprises marocaines et françaises et aussi par la visite du campus de l’ESSEC à Rabat qui vient de voir le jour en 2017. 

Comme toutes les RHN entre le Maroc et la France plusieurs accords vont être signés pour consolider le partenariat stratégique entre les deux pays.

Qu’en est-il des relations économiques maroco-françaises ?

L’analyse des relations économiques maroco-françaises lors des deux décades nous montre que la France occupe le rang du premier partenaire économique et financier du Maroc.

Pendant toute la décennie 1999-2009, la France a été le premier fournisseur du Maroc et son premier client dont elle absorbait 28 % des exportations. Elle se positionnait aussi comme premier pays d’origine des transferts des Marocains résidant à l’étranger avec un montant de 1,9 Milliards d’euros rapatriés au Maroc à titre d’exemple en 2006, soit 43 % du total des transferts des Marocains résidants à l’étranger

Toutefois, la France tout en restant le premier partenaire économique et financier du Maroc depuis 2010 à nos jours, elle a été détrôné par l’Espagne en 2012 de sa place de premier partenaire commercial du Maroc. Elle se retrouve aussi sous la houlette de la concurrence suite à l’ouverture du Maroc à de nouveaux partenaires et de ses marchés à de nouvelles puissances économiques comme la Turquie ou la Chine.

Les chiffres  de 2015 sont très éloquents à ce niveau.L’Espagne obtient en 2015 une part de marché de 13,9% tandis que celle de la France a été de 12,7%. La part de l’Afrique dans les exportations marocaines a progressé cette année là de 1,3 point pour atteindre 9,9% du total.

Sur le plan des investissements directs étrangers(IDE), la France occupe le rang du premier investisseur au Maroc. Ce dernier est aussi la première destination des investissements français sur le continent africain. Pour la période 2001-2006, leflux des IDE d’origine française était d’une moyenne annuelle de 1.16 Milliard d’euros, soit 60 % du total des IDE reçus par le Maroc. Sur la période 2006-2009, les investissements et prêts privés français au Maroc ont atteint, en moyenne, un volume annuel de 12,85 MMDH, soit 33% des Investissements et prêts prives reçus par le Maroc, plaçant ainsi la France au 1e rang des pays origine des investissements et prêts prives étrangers au Maroc. Au titre de 2010, ces investissements ont atteint 19,297 MMDH (52,61 % du total). 

Le flux net d’IDE au Maroc s’est inscrit depuis 2010 en hausse sur quatre ans pour atteindre 771 Millions EUR et à 484 Millions EUR en 2015. Les IDE français représentent 28,4% du total des IDE reçus par le Royaume, avec 750 filiales d’entreprises françaises recensées dont 34 des 40 entreprises du CAC 40 et qui ont atteint 5,6 Mds EUR sur la période 2000-2011, soit davantage qu’en Inde par exemple.

Quelle est la portée de la XIIIème RHN sur les relations économiques maroco-françaises ? 

Il est à signaler que le partenariat économique entre le Maroc et la France ne se limite plus au seul plan bilatéral, mais il s’ouvre aujourd’hui sur une nouvelle ère, celle de la voie de la coopération commune sur le plan régional à savoir l’Afrique.

Le président du MEDEF, Pierre Gattaz, lors de la journée de réflexion du Club des Chefs d’entreprise France-Maroc, le Medef pour la France et le CGEM pour le Maroc, tenue en marge de la XIIème RHN à Paris le 28 mai 2015, exprime clairement la nouvelle situation qui gouverne aux relations économiques entre les deux pays et à laquelle la France doit s’adapter : « Si nous souhaitons renforcer nos partenariats, nous devons reconnaître les nouvelles réalités de nos deux pays, pousser plus loin la notion de partenariats pour investir en Afrique et dans le monde arabe… L’Afrique est une priorité pour le Medef et pour le Maroc donc nous devons voir comment renforcer les initiatives. »

En effet, la politique du Maroc sous la conduite de Sa Majesté Mohammed VI pour le développement de l’axe Sud-Sud avec ses partenaires Africains n’est plus à démontré. Le Maroc est revenu après plus de trente d’absence à l’Union africaine, il rejoint aussi la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAOà partir du 16 décembre, à Loméau Togo, lors de la tenue du sommet de cette communauté économique

Le Discours Royal du 13 octobre 2017 au parlement vient consolider ce nouveau choix de développement de la coopération Sud-Sud. La décision du Roi arrive à bon port pour renforcer les relations du Maroc avec tous les pays d’Afrique à travers la création d’un ministère délègue auprès de celui des Affaires étrangères, chargé des affaires africaines, et plus particulièrement de l’investissement.

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