Rentrée scolaire ou quand la messe est dite

Abdelhak Najib
Écrivain-journaliste

Il est difficile d’aller au bout de la prière. Surtout celle des parents qui espéraient enfin voir leurs enfants aller à l’école. À quelques heures de la rentrée annoncée avec son lot d’aberration et d’incompréhension, on annule tout.

Entre temps, les parents ont payé ce qu’il fallait. Ils ont acheté au prix fort les fournitures scolaires. Ils se sont acquittés de tout pour que la rentrée scolaire se déroule sans encombre. C’était son compter avec cette désormais habitude chez les responsables de ce gouvernement marocain de décider de faire les annonces à la dernière minute. L’effet de surprise n’en est que plus marquant, il faut le dire. Mettre les populations, déjà aux abois, devant le fait accompli, c’est la marque de fabrique de ce gouvernement.

Après le «Débrouillez-vous» de la semaine dernière, ils nous servent le «restez chez vous, on verra après». Peu importe si vous vous êtes endettés pour garantir des études dignes de ce nom à vos enfants ! Peu importe si vous vous êtes coupés en quatre après les dettes d’une fête du mouton qui n’aurait jamais dû avoir lieu en pleine crise sanitaire ! Peu importe si on vous a dit que vous pouvez circuler pour aller passer vos vacances en payant d’avance avant de tout verrouiller !

Peu importe aussi si vous vivez dans l’angoisse du lendemain ne sachant plus à quel saint vous vouer ! Le mot d’ordre avec ce gouvernement a le mérite d’être simple : suivez-nous, on verra ce qui arrivera. Parce que, il faut le souligner, ni le chef du gouvernement ni la majorité de ses ministres ne savent où ils vont. On tâtonne. On essaie. On se ravise. On annonce. On se trompe. Et ce n’est pas grave ! Sauf que le Maroc a largement dépassé la barre des 70 000 cas.

En l’espace d’un mois, les chiffres ont explosé. Pourquoi ? Qui en est responsable ? Où les choses coincent-elles pour en arriver à enterrer des dizaines de morts par jour ? Malin qui nous le dira. Car, aucun porte-parole de ce gouvernement ne semble capable de nous donner le début d’une réponse claire. Ceci sans parler des saillies et des perles signées par le ministre de l’Éducation nationale, qui, au lieu de faire amende honorable, et dire qu’il s’est trompé, continue sur sa lancée. C’est une fuite en avant, monsieur le ministre. Et il n’y a aucun mal à ce qu’un responsable se trompe et fasse une erreur. Le plus important est de rectifier le tir et d’essayer de réfléchir en profondeur à d’autres solutions à la fois viables et applicables.

Vous avez-vous-mêmes dit que nous sommes un seul corps et que nous devons tous mettre la main à la pâte. Nous sommes d’accord et prêts. Mais nous avons besoin d’une ligne directrice à suivre et nous avons surtout besoin de savoir que la personne que nous allons suivre sache où elle nous mène. Messieurs les ministres, montre-nous la voie et nous vous suivrons, en toute confiance et en toute responsabilité citoyenne. Mais à force de répéter les mêmes habitudes sans une once de respect pour nos vies, nos existences précaires, notre angoisse, nos peurs et nos espérances, permettez-nous de vous dire que nous avons très peur aujourd’hui parce que vous naviguez à vue.

Nous avons tellement peur que nous mettons nos destins entre les mains généreuse de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le seul capable de nous sauver. Comme à chaque fois, quand les choses se corsent, c’est le Roi qui trouve la voie de sortie, c’est le Roi qui prend les bonnes décisions, c’est toujours le Roi qui veille sur son peuple. Parce que, comme l’a dit Sa Majesté dans son dernier discours, il pense à nous comme il pense à ses propres enfants et à sa propre famille.

Ce qui n’est pas du tout le cas de ce gouvernement qui a montré toute l’étendue de ses limites. Ce qui explique le large désavoeu de la part des populations qui s’en remettent à leur Souverain. Il faut juste revenir au discours clair et franc du Roi, le 20 août dernier pour avoir une véritable carte de route à même de nous aider à faire face à cette terrible situation. On le sait, la situation épidémiologique est intimement liée au non-respect des mesures de prévention. On sait aussi que seul le strict respect des mesures appliquées rigoureusement permettra de contrer la propagation du virus. Alors, il faut prendre le taureau par les cornes et assumer des mesures draconiennes.

Et s’il faut reconfiner pour le bien de cette nation, nous devons l’accepter et nous comporter avec civisme et responsabilité, dans la cohésion et la solidarité. Nous l’avons fait durant plus de trois mois et nous avons fait face avec efficacité à ce virus mortel. Puis tout est parti en vrille. Plus aucun contrôle sur rien. On ouvre les plages, on incite les gens à voyager, on appelle à égorger le mouton, alors que le bon sens veut que l’on annule tout puisque les constats ont été clairs : relâchement, irresponsabilité, rumeurs, fausses déclarations, comportements dangereux de la part d’une partie de la société. Pourtant, on a continué à tâtonner : on ferme telle plage en laissant les autres ouvertes ! Bien sûr, les gens vont envahir toutes les plages ouvertes se mettant les uns sur les autres et en prenant des risques ! Bien sûr, les gens vont sortir pour boire et manger en groupes sans respecter les distances de sécurité ! Bien sûr, c’est la pagaille au marché des moutons avec ce déchainement de violence que l’on a vu ! Bien sûr que sur les routes nous allons compter des morts quand on décrète un couvre-feu à la dernière minute !

Ceci pour amorcer sur les responsabilités qui incombent à nous autres citoyens de ce cher Maroc. On ne le répètera jamais assez, ce virus est mortel. La pandémie est une réalité des plus dangereuses et des plus réelles. Les gens meurent et sans enterrées sans cérémonial. Des familles pleurent leurs défunts quand d’autres vivent dans la peur de perdre un de ses membres. Il faut en finir avec ce fatalisme à la Marocaine qui veut que l’on se dise : «advienne que pourra, Dieu est grand ! ». Bien sûr que Dieu est grand, mais il faut respecter les mesures de sécurité. Il faut suivre rigoureusement les directives strictes des autorités compétentes. Il nous faut être solidaires et agir en conséquence pour éviter le pire. Cela passe par le respect des forces de l’ordre qui ont risqué leurs vies pour sauver d’autres. Il ne faut pas avoir la mémoire courte et oublier tout le travail qui a été fait, en assumant le plus dur, par la police, la gendarmerie, l’armée et les forces auxiliaires.

Caillasser les agents de sécurité comme on l’a vu est un acte criminel et inadmissible. Nous, les citoyens, nous avons une large part de responsabilité dans ce qui nous arrive. Il faut l’assumer. Et il faut agir en conséquence en se ravisant, en nous pliant aux règles et aux consignes qui peuvent nous sauver la vie. Certains d’entre nous ont agi avec irrespect des lois, avec dédain pour tous ceux qui risquent leurs vies pour ce pays. Comme nous n’acceptons pas que le gouvernement nous fasse des annonces à la dernière minute et nous mette dans des situations inextricables, nous n’acceptons pas de faillir tous ensemble en faisant fi de ce qui nous unit en tant que peuple, notre amour de cette terre et notre engagement à tous derrière le guide de ce pays, le Roi, dont le voeu le plus cher est de mener cette nation vers la prospérité dans l’union qui fait notre force. Amen.

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