Satellite Mohammed VI-A : du rêve aux exploits

Par Souad Mekkaoui

En ce mois de novembre, le Maroc a vécu au rythme d’une émotion intense. En effet, la nuit de mardi à mercredi aura donné le coup de fion et suspendu l’attention et le souffle des Marocains, projetés dans un voyage spatial prévu à 01h42min31s, temps universel (UTC).

Le compte à rebours a été lancé, et le satellite a pris la direction de l’espace. Le Rêve s’est concrétisé et le Maroc était au rendez-vous d’un énorme exploit qui le hisse, dès lors, à un autre niveau mondial et le place dans la cour des pays disposant d’une technologie avancée. Le Royaume peut désormais se targuer d’avoir le coup et de devenir « une puissance spatiale ».

Un dispositif à la pointe de la technologie

Baptisé «Mohammed VI-A», le premier satellite marocain d’observation de la Terre, lancé à Kourou, en Guyane française, marque le coup et arbore le drapeau du Royaume du Maroc. Cette mission a été menée par Arianespace, dans le cadre de son dixième lancement de l’année, et le onzième avec le lanceur Vega, depuis le début de son exploitation au Centre spatial guyanais, en 2012. Le satellite «Mohammed VIA» est le 150e satellite fabriqué par Thales Alenia Space à être lancé par Arianespace qui compte 15 satellites supplémentaires de ce constructeur, dans son carnet de commandes. Système de deux satellites de reconnaissance et d’observation de la Terre (A et B) du type Pléiades du programme MN35-13, le satellite Mohammed VI-A est conçu par Thales Alenia Space et Astrium Satellites pour le compte du Centre royal de télédétection du Maroc. Lancé le 8 novembre 2017, le lancement du deuxième satellite (Mohammed VI B) est prévu en 2018.

Piloté, directement, depuis une salle d’opérations spatiales installée à Rabat, la mission, du décollage à la séparation du satellite, d’une masse d’environ 1,1 tonne, aura duré environ 55 minutes et 33 secondes. Rappelons que le contrat portant sur l’acquisition de ce satellite et l’accord final entre le Maroc et la France sur la commande du système des satellites espions a été signé en 2013, en marge d’une visite officielle, au Maroc, de l’ancien Président français, François Hollande, pour un coût estimé à 500 millions d’euros. Le Maroc s’est ainsi doté d’un dispositif à la pointe de la technologie qui constitue un grand pas en avant pour les ambitions et les visions du Maroc du 21è siècle et illustre le leadership visionnaire de Sa Majesté le Roi Mohammed VI.

De facto, cet engin spatial fait la fierté du pays tout en lui permettant une meilleure observation de son territoire et en renforçant le développement global du pays dans les domaines économique, social et environnemental. Ceci tout en étant un levier de progrès de la recherche et de l’innovation au pays. Conséquemment, et comme l’a affirmé M. Karim Tajmouati, Directeur général de l’Agence nationale de la conservation foncière, du cadastre et de la cartographie (ANCFCC), ce satellite procurera au Royaume son autonomie, en matière de visualisation cartographique et donc, une meilleure maîtrise de ses ressources et de sa dynamique de développement. Capable d’enregistrer plus de 500 images par jour et de les transmettre directement au centre de contrôle, situé à proximité de l’aéroport de Rabat-Salé, cet équipement aura, essentiellement, pour mission de surveiller, avec une définition de haute qualité, ce qui se passe sur terre à longueur de journée.

Un satellite au service de la vie  quotidienne des Marocains 

Pour la première fois donc, le Maroc s’outille d’une sentinelle, aux aguets de ce qui se passe sur la planète, pour apporter des informations utiles à la résolution de ses problèmes et de tout le continent. Force est de rappeler qu’avant, dans le domaine de la cartographie, le Royaume avait l’habitude d’avoir recours à la photographie aérienne ou de solliciter les services de fournisseurs à l’international, mais aujourd’hui et grâce au satellite Mohammed VI-A, qui se veut une infrastructure technologique avancée, le Maroc jouit, désormais, d’une souveraineté, dans ce domaine, et peut même développer des programmes accélérés, en matière de visualisation cartographique, comme l’a expliqué M. Tajmouati.

Ainsi, le lancement de ce satellite offre au Royaume de grandes opportunités en matière d’observation des activités cartographiques et cadastrales. Il servira aussi à l’aménagement du territoire, au suivi des activités agricoles, à la prévention et à la gestion des catastrophes naturelles, au suivi des évolutions environnementales et de la désertification ainsi qu’à la surveillance des frontières et du littoral.

Placé à près de 700 km au-dessus de la terre, ce dispositif met à disposition ainsi des applications en matière de surveillance de l’environnement, de maîtrise et d’anticipation des feux de forêts, de gestion des ressources forestières et de prospection des eaux. Le Satellite Mohammed VI-A est d’une grande utilité, en matière d’aménagement du territoire, en ce sens qu’il aide à la décision et à l’anticipation en vue d’un aménagement optimal des territoires aussi bien urbains que ruraux. Ceci en ce qui concerne l’aspect civil. Toutefois, il sera aussi une formidable projection de puissance du Maroc dans toute la région et sur l’ensemble du continent africain.

Renforcer la sécurité à partir de l’espace

Il est évident que l’espace permet de disposer de moyens de surveillance destinés à préserver la sécurité des routes commerciales maritimes et des zones terrestres de première importance. Aussi le Maroc cherche-t-il à renforcer la sécurité de ses frontières surtout que ce satellite, muni d’une très haute résolution et permettant de cartographier des lieux stratégiques aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières, constitue un moyen de plus pour faire face aux dangers qui menacent le reste du monde, notamment, le terrorisme, l’immigration clandestine en recrudescence, les réseaux de trafic de contre bande, ainsi que la piraterie dans le Golfe de Guinée. Il va donc permettre de surveiller les flux migratoires et surtout les déplacements des milices terroristes qui se déplacent aisément  dans les zones africaines désertiques, (de la Tunisie au Soudan), qui posent des risques grandissants émanant de Daech.

Danger qui inquiète et guette, d’ailleurs, les pays d’Afrique du Nord. La mise en place de ce dispositif va donc renforcer la coopération sécuritaire entre le Maroc, qui est le seul à posséder ce satellite de dernière génération, et ses voisins africains. En somme, on peut dire que ce saut qualitatif  réaffirme, encore une fois, le leadership du Royaume sur les plans régional et africain et consacre l’entrée du pays dans le cercle  des pays disposant d’une telle technologie si bien que ce bijou spatial marocain est considéré comme un gage de sécurité non seulement pour le Maroc, mais aussi pour ses voisins africains et européens. D’ailleurs, le Maroc est désormais la seule puissance militaire continentale à disposer de cet outil de reconnaissance militaire ultrasophistiqué, à l’instar de l’Égypte et de l’Afrique du Sud.

Des voisins agités et désappointés 

C’est donc un fait : le Maroc a fait son entrée dans l’ère du satellite espion dans le domaine de la reconnaissance militaire. Et si pour le Royaume, il s’agit d’un événement considérable qui introduit une dimension nouvelle dans la région et toute l’Afrique, le voisin de l’Est dont l’activité principale est d’épier, constamment, les actions de Rabat, ne le voit pas de cet œil, lui. A tel point que toute nouvelle initiative en matière d’armement terrestre, maritime ou aérien le sort de ses gonds et produit chez lui un branle-bas affolé et une panique telle que l’Algérie ne dort plus que d’un œil et annonce même, juste quelques jours après, qu’elle se dotera, elle aussi, de son satellite.

En tout cas, c’est ce que révèle France Inter, sur son site, dans un article intitulé «le Maroc va bientôt avoir son satellite espion» qu’elle a consacré à cet engin technologique spatial en soulignant que l’Algérie a mis en état d’alerte tous ses systèmes de contrôle et de défense bien avant la mise en orbite du premier satellite espion marocain. Et comme la peur panique fait faire des choses insensées, le régime algérien a installé radars fixes et mobiles, caméras infrarouges et autres outils aériens, tout au long des frontières avec le Maroc pour renforcer son dispositif de surveillance, en plus d’installations de brouillage des signaux susceptibles d’être émis par le satellite.

Ces dispositifs viennent renforcer le projet de construction d’un mur également doté de capteurs électroniques et d’autres technologies hautement sophistiquées. «L’Espagne de son côté, n’a pas ces moyens d’observation. Elle a bien des parts dans les satellites espions français Helios, mais pas plus de 2,5%. Autrement dit, elle peut utiliser 2,5% du temps spatial de ce satellite. Or, quand ils en ont eu besoin, la France a fait la fine bouche. Alors que le Maroc, lui, aura son satellite 100% du temps». «Avec ce satellite, les Marocains pourront tout savoir des positions de l’armée algérienne et de celles des insurgés sahraouis au Sahara occidental », explique, en effet, France inter.

Pourtant, depuis sa forte implication dans la lutte contre le terrorisme, la migration illégale, les trafics d’êtres humains et de drogues, le Maroc n’a jamais caché sa volonté d’acquérir un tel outil, qui lui permettra ainsi de mieux surveiller ses frontières, tout en jouant un rôle purement civil en fournissant des informations aptes à être utilisées dans l’élaboration des stratégies de développement. Pour ce qui est des autres pays africains, ils devraient, également, profiter de l’initiative marocaine, dans le sens où la piraterie maritime est devenue un véritable fléau pour le continent. Disposer d’un pareil outil devrait permettre de mieux faire face à cette menace. C’est dire que le Maroc affiche son ambition de se lancer dans le développement de nouvelles technologies.

Il fait, bel et bien, partie de l’élite des nations qui ont choisi de prendre leur destin en main et d’aller de l’avant, en matière de recherche spatiale. D’ores et déjà, et d’un coup de baguette magique, un nouveau palier vient d’être franchi par le Maroc, dans le domaine de la reconnaissance militaire et de la télédétection civile. De fait, un lancement similaire est programmé pour 2018.

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