Scandale à l’ENSA d’Oujda : des diplômes délivrés à des étudiants absents

À l’ENSA d’Oujda, l’inquiétude grandit. Des étudiants partis étudier à l’étranger auraient obtenu, à leur retour, des attestations de réussite sans avoir assisté aux cours ni passé les examens. L’affaire, qui fait grand bruit, a poussé le ministère à ouvrir une enquête, soulevant de sérieuses questions sur l’intégrité du système pédagogique.
L’École Nationale des Sciences Appliquées (ENSA) d’Oujda, l’un des établissements publics de formation des ingénieurs au Maroc, est secouée par un scandale pédagogique. Selon les médias, des soupçons de falsification des procès-verbaux de réussite pèsent sur l’institution, remettant en cause la transparence et la rigueur de ses procédures académiques.
Des informations font état d’étudiants ayant poursuivi leurs études à l’étranger, notamment en France, et ayant obtenu des documents officiels attestant de leur réussite auprès de l’ENSA, alors qu’ils n’ont ni suivi l’année académique concernée, ni passé les examens correspondants. Plus précisément, plus d’une vingtaine d’étudiants auraient quitté l’ENSA pour étudier à l’université Paris 13 Nord entre 2019 et 2024, avant de revenir à Oujda pour se faire délivrer leurs diplômes.
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Mais ces demandes ont été refusées par certains professeurs qui ont pointé leur absence totale aux cours, leur non-participation aux examens et l’absence de présentation de projets de fin d’études, ce qui les classait parmi les étudiants ayant échoué. La véritable controverse a surgi après la révélation que des procès-verbaux de réussite avaient été signés par le directeur de l’établissement sans que les procédures habituelles aient été respectées.
Face à ces révélations, une série de réactions s’est déclenchée au sein de l’ENSA. Plusieurs enseignants ont adressé des courriers au ministère de l’Enseignement supérieur et à la présidence de l’université Mohammed Premier. Ces alertes ont conduit l’ancien ministre de l’Enseignement supérieur à dépêcher une commission d’inspection générale pour ouvrir une enquête interne.
Cette commission a organisé plusieurs réunions avec la direction de l’école et les professeurs concernés. Elle a également entendu les représentants des enseignants qui ont dénoncé des dérives pédagogiques menaçant la qualité de la formation d’ingénieur dispensée. L’enquête a notamment mis en lumière l’absence d’un cadre légal clair concernant la « mobilité des étudiants », instaurée de manière unilatérale par la direction, créant une opacité dans le suivi des parcours académiques.
Le rapport d’inspection a aussi relevé des dysfonctionnements majeurs tels que l’exclusion de certaines spécialités, la transformation de l’identité académique de l’ENSA en une sorte de faculté spécialisée en informatique, ainsi que des irrégularités dans le concours d’accès au cycle d’ingénieur pour l’année 2019-2020.
Par ailleurs, la commission a dénoncé des décisions prises sans consultation des instances compétentes, comme la fermeture ou l’ouverture de filières, ainsi qu’une gestion pédagogique chaotique. Cette dernière se traduit par un retard important dans l’élaboration des emplois du temps, parfois établis en décembre, des matières jamais enseignées, et une opacité concernant le mode d’enseignement, qu’il soit présentiel ou à distance.
Le rapport souligne aussi l’absence prolongée de plusieurs enseignants, certains étant à l’étranger sans justification légale, ce qui remet en question l’engagement du corps professoral et impacte directement la qualité de la formation.
Enfin, les étudiants concernés par les diplômes litigieux auraient quitté l’ENSA lors de la dernière session, mais auraient malgré tout reçu des attestations de réussite, sans que leurs professeurs aient signé les procès-verbaux de délibération.
Ce scandale soulève d’importantes questions sur le sérieux et la crédibilité d’une école d’ingénieurs censée former les futurs cadres techniques du pays. Les autorités sont désormais sous pression pour prendre des mesures rapides et efficaces afin de restaurer la confiance dans ce secteur stratégique.