Sommet UE-UA : Traduire l’ambition en actions

Le sixième sommet Union européenne‑Union africaine, qui se tiendra jeudi et vendredi à Bruxelles, s’annonce capital pour l’avenir et la nature des relations entre les deux continents. Plus qu’un engagement politique au plus haut niveau, c’est sur un plan d’actions, définissant des priorités conjointes assorties de mesures concrètes, que devra déboucher cette grand-messe euro-africaine.

Pour les responsables européens, les mots sont à la mesure de l’ambition. Ils veulent en faire une occasion ‘’unique’’ de jeter les bases d’un partenariat renouvelé et approfondi entre l’UA et l’UE, fondé sur la confiance et la compréhension claire des intérêts mutuels.

Concrètement, l’objectif est de lancer un ambitieux paquet d’investissements Afrique‑Europe en tenant compte des défis mondiaux tels que le changement climatique et la crise sanitaire actuelle, mais aussi d’approfondir les échanges sur les outils et solutions permettant de promouvoir la stabilité et la sécurité grâce à une architecture renouvelée pour la paix et la sécurité.

En amont du Sommet, la France, qui assure depuis le 1-er janvier 2022 la présidence tournante du Conseil de l’UE, donnait récemment le ton, à l’occasion d’une conférence préparatoire sur les relations commerciales euro-africaines.

‘’L’UE souhaite demeurer à tous égards, le premier partenaire de l’Afrique sur le plan économique, commercial, mais aussi en matière de sécurité, d’aide publique au développement et humanitaire’’, a souligné Franck Riester, ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, chargé du Commerce extérieur et de l’attractivité.

Pour le président du Conseil européen, Charles Michel, la nouvelle alliance UE-UA devrait être fondée sur la prospérité, la paix et des valeurs communes.

→ Lire aussi : Le Maroc, un modèle innovant sur lequel le partenariat UE-UA pourrait se construire

L’UE demeure en effet le premier partenaire multilatéral, les échanges commerciaux entre l’UE et l’Afrique ayant crû de 20% entre 2016 et 2020 pour atteindre 225 milliards d’euros. L’UE et ses États membres sont aussi les premiers contributeurs à la promotion du développement, de la stabilité et de la paix en Afrique.

Selon les chiffres de l’Exécutif européen, 21 milliards d’euros d’aide au développement ont été versés à l’Afrique en 2016 par l’UE et ses États membres. En 2015, 32 milliards d’euros ont été investis en Afrique par des entreprises de l’UE, ce qui représente près d’un tiers de l’ensemble des investissements étrangers directs en Afrique. A ceux-ci, s’ajoutent 3,35 milliards d’euros alloués au Fonds européen pour le développement durable, ce qui devrait permettre de générer jusqu’à 44 milliards d’euros d’investissements, et 1,4 milliard d’euros est consacré à des programmes éducatifs en Afrique sur la période 2014-2020.

Mais alors que le continent africain est courtisé de partout (Chine, USA, Russie…) et que les défis communs sont légion, l’Europe cherche à construire une relation durable avec ses voisins du sud. Les uns et les autres espèrent s’entendre sur une déclaration conjointe sur une ‘’vision commune pour 2030’’.

Avant d’y parvenir, les dirigeants de l’UE et de l’UA se réuniront autour de tables rondes thématiques pour débattre du financement de la croissance, de systèmes de santé et de production de vaccins, d’agriculture et de développement durable, d’éducation, de culture et de formation professionnelle, de migration et de mobilité, de soutien au secteur privé et d’intégration économique, de paix, de sécurité et de gouvernance, de changement climatique et de transition énergétique ou encore de connectivité numérique.

A cet effet, les chefs d’État et de gouvernement de l’UE et de l’UA participeront aux tables rondes avec un groupe d’invités sélectionnés qui sont des experts dans leurs domaines respectifs.

Le sommet de Bruxelles devra à cet égard capitaliser sur les avancées engrangées depuis celui d’Abidjan, en Côte d’Ivoire (29-30 novembre 2017). Les dirigeants européens et africains avaient adopté une déclaration commune exposant les priorités communes pour le partenariat UE-Afrique dans quatre domaines stratégiques : perspectives économiques pour les jeunes, paix et sécurité, mobilité et migration, et coopération sur la gouvernance.

Un accent particulier a été mis sur l’investissement dans la jeunesse. Il s’agissait d’une priorité absolue pour l’Afrique comme pour l’UE, 60% de la population africaine ayant moins de 25 ans. Un plan d’investissement extérieur de l’UE a été présenté aux dirigeants lors du sommet. Ce plan d’investissement prévoyait de mobiliser 44 milliards d’euros d’investissements en Afrique à l’horizon 2020, afin de créer de nouvelles possibilités d’emploi pour les jeunes sur l’ensemble du continent africain. Le sommet de Bruxelles sera l’occasion d’évaluer le niveau de mise en œuvre de ces engagements. L’autre sujet phare ayant dominé les travaux du sommet d’Abidjan avait trait à la mobilité et la migration. Les dirigeants européens et africains étaient convenus de promouvoir la mobilité des étudiants, du personnel enseignant et des chercheurs sur l’ensemble du continent africain. Ils s’étaient par ailleurs mis d’accord sur le renforcement des programmes d’échange entre l’Afrique et l’Europe, tels que ERASMUS+.

Outre les outputs du dernier sommet, le rendez-vous bruxellois devrait dépoussiérer la stratégie commune Afrique-UE, qui a été adoptée en 2007 pour servir de cadre formel des relations entre l’UE et les pays africains. Cette stratégie a été approuvée par l’Union africaine et les institutions de l’UE, ainsi que par les pays africains et les États membres de l’UE.

Elle est mise en œuvre au moyen de plans d’action périodiques. En 2014, les États membres de l’UE et les pays d’Afrique ont approuvé une feuille de route pour la période 2014-2017, comportant cinq priorités et domaines stratégiques pour des actions communes.

En mars 2020, la Commission européenne et le Service européen de l’action extérieure avaient présenté une communication conjointe intitulée « Vers une stratégie globale avec l’Afrique« . Ils proposaient d’œuvrer de concert sur cinq grands axes mondiaux, en l’occurrence un partenariat pour une transition verte et l’accès à l’énergie; un partenariat pour la transformation numérique; un partenariat pour une croissance et des emplois durables; un partenariat pour la paix et la gouvernance; et un partenariat en matière de migration et de mobilité.

Les propositions exposaient non seulement les possibilités à saisir et les défis à relever dans chacun des domaines considérés, mais aussi dix points d’action clairs qui serviront de base à la coopération future.

Le 30 juin 2020, le Conseil de l’UE a approuvé des conclusions sur l’Afrique, réaffirmant l’importance capitale d’un partenariat UE-Afrique renforcé. Dans ses conclusions, le Conseil notait que la communication conjointe constitue une excellente base pour instaurer un nouveau partenariat ambitieux avec l’Afrique.

Entre temps, la pandémie de la Covid19 a chamboulé les plans des uns et des autres. Le Sommet de Bruxelles devra être à cet effet un moment charnière pour renouveler une approche stratégique commune globale qui concrétise ces aspirations.

(Avec MAP)

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