Suspension des congés pour les professionnels de la santé: Un mal pour un bien

Par Maha RACHID

La décision du ministère de la santé de suspendre les congés annuels pour ses fonctionnaires au vu de l’évolution préoccupante de la situation épidémiologique dans le Royaume continue de susciter des réactions parmi les différents intervenants du secteur.

En effet, si certains sont convaincus qu’en cette période de crise sanitaire sans précédent, une mobilisation est indispensable pour faire face à la propagation de la pandémie de la Covid-19, d’autres pensent que quelques jours de repos ne sont pas de refus pour une reprise en toute sérénité.

Approché par la MAP, le professeur de médecine et d’épidémiologie, spécialiste en maladies infectieuses et santé publique Jaâfar Heikel a indiqué qu’en cette période exceptionnelle, « les soldats ont été rappelés au front », affirmant que cette décision a été prise compte tenu de l’aggravation de la situation épidémiologique au Royaume, afin de garantir la continuité des services médicaux.

« La mobilisation des professionnels de la santé, dans les secteurs privé et public demeure nécessaire pendant cette période exceptionnelle », a affirmé le spécialiste, mettant en avant la nécessité de déployer des efforts pour la gestion de la crise sanitaire.

Cependant, Dr. Heikel relève qu’un travail « continu et acharné, dans des conditions complexes », peut s’avérer « contre productif ».

A cet effet, le professeur propose de mettre en place « une approche régionale », accompagnée d’une mobilisation des professionnels du secteur public et privé, qui puisse permettre un système de congé rotatif.

Tous les professionnels de la santé, médecins, infirmiers, aide-soignants ou encore ambulanciers, ont fait preuve d’un engagement sans faille et d’une solidarité nationale remarquable en cette période, a affirmé Dr. Heikel, ajoutant que « quelques jours de congé, ne feront que stimuler cet élan et booster leur motivation ».

Abordant l’initiative de versement d’indemnités exceptionnelles au profit des professionnels de la santé, Dr. Heikel a souligné qu’il s’agit d’une noble décision. « Il est important d’exprimer de la reconnaissance pour l’engagement et le dévouement des professionnels de la santé en faveur de la sécurité sanitaire des citoyens », a-t-il relevé, insistant sur la nécessité de valoriser les efforts consentis par « les héros de la nation ».

De son côté, le secrétaire général de la fédération nationale de la santé affiliée à l’Union marocaine du travail (UMT), Mohamed Ouardi, affirme que « deux avis valent mieux qu’un », expliquant qu’il aurait été plus approprié que le ministère demande l’avis de ses partenaires avant de prendre une telle décision.

À cet effet, le syndicaliste déplore « le manque de coopération, de partenariat et de communication de la part des décideurs », soulignant qu’il s’agit d’une décision « hâtive, individualiste et lourde de conséquences ».

M. Ouardi estime qu’après des mois entiers de travail laborieux au sein des structures hospitalières du Royaume, les praticiens de la santé ont droit à quelques jours de répit, ajoutant que cette mesure de suspension « aura des répercussions sur leur mental, productivité et rendement ».

Pour sa part, Meriem, infirmière au CHU Ibn Sina de Rabat, a dû annuler son congé annuel après la récente décision ministérielle. « Après plusieurs mois de labeur, j’ai dû suspendre mes vacances en famille pour retrouver mon poste au CHU », a déclaré l’infirmière.

« Il est de mon devoir d’apporter l’aide et le soutien nécessaires à mon pays afin de passer outre cette crise », a souligné Meriem, faisant état des difficultés de son métier et des risques qu’il implique.

« J’ai été éloignée de ma famille pendant des mois par peur d’une éventuelle contamination », a-t-elle confié, poursuivant qu’elle aurait souhaité consacrer un peu de temps à sa petite famille pendant son congé annuel, qui, hélas, fut annulé.

« Je suis fière de participer à la lutte contre cette pandémie meurtrière », a-t-elle affirmé. « Cependant, je manque à mon devoir de mère, d’épouse, de fille et d’amie », a noté Meriem, révélant que ces derniers mois, elle s’est consacrée corps et âme pour son métier au détriment de sa vie familiale.

Le jeune femme a mis en évidence la nécessité de respecter les mesures barrières mises en place et appelle les citoyens à ne pas prendre le virus à la légère.

Ainsi, au vu de l’évolution de la situation épidémiologique, les congés annuels pour les fonctionnaires du ministère de la Santé ont été annulés, afin de pouvoir assurer une continuité des services sanitaires.

Le ministre de la santé Khalid Ait Taleb, a souligné que la situation épidémiologique exceptionnelle et alarmante du Royaume a imposé une décision tout aussi exceptionnelle.

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