Système éducatif : l’heure des explications pour Akhannouch face aux députés

Le 12 mai, la Chambre des représentants sera le lieu de débats, alors que le chef du gouvernement devra répondre à une interpellation sur la situation préoccupante du système éducatif. Derrière les chiffres budgétaires colossaux, les promesses de réforme peinent à masquer l’ampleur des blocages structurels qui minent durablement l’école marocaine.
C’est une séance qui s’annonce tendue pour l’exécutif. Ce 12 mai à 15h00, la Chambre des représentants consacrera sa session mensuelle aux questions de politique générale au thème brûlant de l’éducation nationale. Officiellement intitulée « Réforme et développement du système éducatif », cette rencontre, à l’initiative des groupes parlementaires d’opposition, portera une charge critique nourrie contre la gouvernance gouvernementale d’un secteur en crise chronique.
Au cœur des débats : un constat à plusieurs lectures. En dépit d’un budget conséquent – plus de 92 milliards de dirhams, soit le premier poste de dépense de l’État – et de multiples cycles de réforme engagés depuis deux décennies, les résultats tardent à se concrétiser. L’argument budgétaire ne convainc plus. En 2023 encore, l’État a pourtant alloué une enveloppe exceptionnelle pour revaloriser le statut de quelque 330 000 enseignants. Mais sur le terrain, les tensions perdurent, les grèves se multiplient, les ruptures pédagogiques s’aggravent.
Cette séance parlementaire permettra de mettre en lumière les raisons profondes de cette inertie. Car si le gouvernement Akhannouch a multiplié les annonces et promesses – à travers la feuille de route 2022-2026 et les engagements sur l’unification des statuts –, le bilan opérationnel reste désespérément maigre. Depuis le début du mandat, ce ne sont pas moins de quatre ministres qui se sont succédé aux commandes de l’éducation et de l’enseignement supérieur, sans que cela ne stabilise le pilotage du secteur.
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Au-delà des noms et des organigrammes, c’est une gouvernance éclatée, fragmentée entre les impératifs budgétaires, les contraintes syndicales et les priorités politiques, qui semble plomber l’ambition réformatrice. Les enseignants contractuels, toujours en lutte pour leur intégration dans la fonction publique, incarnent le malaise d’un corps éducatif déboussolé, parfois démoralisé. Les disparités régionales, les déperditions scolaires précoces et l’inadéquation criante entre les formations et les besoins du marché de l’emploi continuent de hanter les bancs de l’école marocaine.
L’opposition entend bien porter ce diagnostic au cœur de l’Hémicycle. Elle questionnera directement le chef du gouvernement sur les causes « objectives » de la stagnation du système éducatif. À défaut d’inflexions concrètes, c’est la crédibilité même des engagements gouvernementaux en matière sociale qui se trouve mise en cause. Car l’éducation, au-delà de ses enjeux pédagogiques, est désormais un test politique.
Alors que le pays aspire à jouer un rôle stratégique dans les chaînes de valeur industrielles et à capter davantage d’investissements étrangers, la faiblesse du capital humain devient un goulot d’étranglement majeur. De nombreux rapports, tant nationaux qu’internationaux, pointent l’insuffisance des acquis scolaires, l’échec de l’apprentissage des langues, la marginalisation des filières scientifiques, et l’absence d’une vision claire sur la formation continue.
Ainsi, la séance du 12 mai pourrait sonner comme un tournant. Pour le chef du gouvernement, il ne suffira plus d’invoquer les moyens engagés ou les chantiers en cours. Il lui faudra convaincre que la réforme de l’éducation n’est pas qu’un slogan récurrent, mais un projet structurant réellement pris à bras-le-corps. Et que les milliards de dirhams injectés ne s’évanouissent pas, une fois encore, dans les limbes d’une réforme perpétuellement inachevée.