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Taxis et applications de covoiturage : Une réforme qui peine à s’imposer

La lenteur des réformes visant à réguler les relations entre les chauffeurs de taxi et les applications de covoiturage cristallise davantage les tensions. Ces affrontements, qui se déroulent fréquemment sous les yeux des clients, alimentent les inquiétudes en matière de sécurité et de coexistence dans un secteur en pleine mutation et surtout à l’approche des grands événements comme la Coupe d’ Afrique et le mondial 2030.

Au Maroc, la promesse de moderniser le secteur des transports par taxis continue de se heurter à une lenteur administrative qui alimente les tensions entre les chauffeurs de taxi traditionnels et les conducteurs des applications de covoiturage. Lundi dernier, le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, a tenté de rassurer les élus en annonçant un projet de réforme qui, selon lui, ambitionne de répondre aux aspirations des citoyens tout en préservant les intérêts des professionnels du secteur. Pourtant, sur le terrain, les confrontations entre ces deux mondes du transport se multiplient et témoignent d’une crise qui s’enlise.

Depuis plusieurs mois, vidéos virales et témoignages de passagers ou de riverains illustrent la violence de ces affrontements, notamment dans les grandes villes comme Rabat et Casablanca. En décembre dernier, des images montrant des chauffeurs de taxi pourchassant un conducteur de covoiturage inDrive dans les rues de la capitale, ponctuées de coups et d’invectives, ont provoqué un vif émoi. La scène avait pour toile de fond la gare d’Agdal, l’un des points névralgiques où la cohabitation entre taxis et applications de transport s’avère particulièrement tendue.

Ces épisodes ne sont pas isolés. Au fil des années, les conflits se sont multipliés, accentuant les crispations au sein d’un secteur qui peine à trouver un équilibre. Les syndicats de taxis dénoncent la concurrence jugée déloyale des plateformes de covoiturage, souvent accusées d’opérer en marge de la légalité. Ils ont ainsi saisi en mars dernier la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (HACA) pour faire interdire la diffusion des publicités d’inDrive sur les chaînes publiques, arguant d’une atteinte aux lois nationales.

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Le ministre Laftit a reconnu devant les députés l’illégalité du transport de personnes par des véhicules privés sans licence. Il a toutefois averti les chauffeurs de taxi : toute tentative d’entrave au travail des applications de covoiturage par des moyens violents sera sanctionnée par la loi. Une mise en garde qui, si elle se veut ferme, peine pour l’heure à contenir les incidents récurrents, signe d’une régulation encore balbutiante.

La réforme promise, elle, semble s’enliser dans un cycle de déclarations sans réelles avancées concrètes. Le ministre a indiqué que des études sont en cours pour moderniser le système de taxi, mais n’a donné ni calendrier clair ni mesures précises pour apaiser les tensions. Cette indécision nourrit l’exaspération des deux camps et alimente un climat de défiance grandissant.

Au-delà de la rivalité entre taxis traditionnels et applications numériques, c’est la crédibilité de l’État à encadrer un secteur en pleine mutation qui est en jeu. Le manque de clarté législative, doublé de l’essor fulgurant des technologies de mobilité, impose une refonte du modèle actuel. Le défi pour les autorités sera de faire émerger un cadre réglementaire capable de concilier les intérêts de chacun, tout en garantissant la sécurité des usagers et la fluidité des déplacements.

En attendant, les clients, eux, se retrouvent souvent au milieu de ces batailles de rue, pris en otage par une guerre de territoire qui les dépasse. La lenteur de la réforme, loin de calmer les esprits, crispe encore davantage les relations entre chauffeurs de taxi et conducteurs d’applications, rendant urgente l’adoption de règles claires et équitables pour moderniser enfin un secteur vital du quotidien urbain marocain.

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