Présidentielle algérienne : Tebboune, un triomphe sans adversité ni gloire

Le 7 août 2024, l’Algérie a vécu une nouvelle séquence électorale qui, à première vue, semblait permettre à Abdelmadjid Tebboune de cimenter son pouvoir. Cette présidentielle est cependant marquée par une absence manifeste de concurrence légitime, illustrant une situation où « à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire », pour reprendre une célèbre citation de Corneille. La victoire annoncée du président, soutenue par un appareil militaire déterminé, témoigne de la continuité d’un régime qui a constamment écarté toute forme de contestation populaire.

Les conditions dans lesquelles cette élection s’est déroulée interrogent profondément la validité de son résultat. En amont du scrutin, des figures politiques majeures, portées par l’élan du Hirak, ont été écartées de manière systématique, laissant le champ libre à un président dont la légitimité demeure contestée. La participation annoncée de 48 % par les autorités – dont le taux de participation à l’étranger s’élève à peine à 19,6 % – reste préoccupante au regard des précédents scrutins, notamment celui de 2019 où seulement 39,9 % des électeurs s’étaient mobilisés. Ce chiffre, agrémenté des doutes quant à sa véracité, ne peut masquer la volonté des autorités de revendiquer une légitimité qui s’apparente davantage à une illusion.

La manipulation politique orchestrée par le pouvoir a été manifeste dans le choix délibéré de tenir cette élection en plein été, période où l’indifférence citoyenne règne, exacerbée par la crise du coût de la vie et des pénuries d’eau. Une stratégie cynique pour étouffer toute contestation, sublimée par des promesses de progrès démocratique, alors que le schéma militaire continue de dominer la sphère politique algérienne.

Tebboune, dont le parcours rappelle celui d’un ancien ministre en terrain conquis, tentait d’apaiser les craintes populaires par des discours en faveur d’une « démocratie en construction ». Toutefois, ces déclarations s’opposent à la réalité des pratiques électorales, où le rôle prépondérant de l’armée jette une ombre sur toute prétention à une gouvernance démocratique. Les soutiens de Tebboune, tout comme ses adversaires, ont tenté de mobiliser les électeurs, mais la résonance des boycotts de précédentes élections et la méfiance persistante du peuple vis-à-vis d’un système perçu comme monopolistique ont pour effet d’affaiblir la légitimité de ce scrutin.

Depuis les manifestations du « Hirak » de 2019, qui avaient conduit à la chute d’Abdelaziz Bouteflika, la population algérienne aspire à un changement réel et durable. Or, la dérive actuelle du pouvoir, qui se place en avant de la légitimité civique, constitue une rupture avec les aspirations légitimes des citoyens. La désillusion s’installe, et une nouvelle vague de mécontentement pourrait éclore, faisant craindre un retour des manifestations citoyennes.

Aujourd’hui, au regard de la façade électorale se dresse la confiscation de la souveraineté populaire par des acteurs militaires et politiques qui poussent à interroger sur l’avenir de la démocratie en Algérie. Les voix du peuple, toujours présentes malgré l’apathie ambiante, pourraient bien se lever à nouveau face à un système qui, en continuant d’ignorer ses revendications, prend le risque de voir s’embraser la colère citoyenne.

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