2ème conférence mondiale de l’OIE sur l’antibiorésistance entame ses travaux à Marrakech
La deuxième conférence mondiale de l’Organisation mondiale de la Santé animale (OIE) sur « la résistance aux antimicrobiens (AMR) et l’utilisation prudente des agents antimicrobiens chez les animaux« , a entamé ses travaux, lundi à Marrakech.
Intervenant à l’ouverture de cette rencontre de trois jours, placée sous le Haut Patronage de SM le Roi Mohammed VI, le ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts, Aziz Akhannouch, a indiqué que les actions coordonnées et l’approche collaborative restent les seuls moyens de couvrir efficacement tout le périmètre de cette problématique et d’obtenir des résultats concrets.
Rappelant que les agents antimicrobiens ont permis de combattre des maladies bactériennes autrefois difficiles, voire impossibles a soigner en médecine humaine comme en médecine vétérinaire, le ministre a relevé que l’usage qui en est fait -excessif ou inadéquat- a, toutefois, montré le revers de la médaille: des agents devenus inefficaces, des bactéries qui résistent aux traitements et donc de nouvelles maladies!. « L’escalade doit pouvoir s’arrêter!« , a-t-il lancé.
Dans ce sens, il a précisé que pour accompagner la stratégie agricole, le Plan Maroc Vert, dans l’atteinte de ses objectifs, et pour l’amélioration de la qualité et de la compétitivité des produits agroalimentaires, une structure nationale chargée de la sécurité sanitaire et alimentaire a été créée en 2010 au Maroc, à savoir l’Office National de Sécurité Sanitaire des Produits Alimentaires (ONSSA), qui est en charge de la santé animale et végétale.
Une législation spécifique est également prévue pour encadrer le secteur du médicament vétérinaire et couvre l’importation et la production locale des médicaments vétérinaires, leur autorisation de mise sur le marché, ainsi que leur distribution, a-t-il poursuivi.
Ce dispositif est renforcé par un système d’inspection de toute la chaîne du médicament vétérinaire; et consolidé par des plans de surveillance de la qualité de ces médicaments -y compris les antimicrobiens-; et des plans de surveillance de leurs résidus dans les produits alimentaires, a-t-il dit.
Le ministre a, en outre, fait savoir qu’en s’appuyant sur les recommandations de l’OIE, le Maroc s’est engagé depuis 2015 à intensifier les actions entreprises pour surveiller la résistance aux antimicrobiens et promouvoir leur bon usage, en particulier les antibiotiques, ajoutant que plusieurs actions ont été menées au niveau national par l’ONSSA.
Ces actions, a-t-il expliqué, ont concerné la mise en œuvre des normes internationales de l’OIE que ce soit au niveau de la collecte des données, l’analyse des risques ou la surveillance à différents maillons de la chaîne, indiquant que l’ONSSA a également pris diverses mesures, notamment la restriction de l’usage des antibiotiques chez les animaux, et que ces actions se poursuivent et ont permis actuellement d’atteindre des « progrès significatifs« .
Pour ce qui est du secteur de la santé animale, le Maroc est également muni d’une stratégie globale qui couvre plusieurs problématiques, et qui a permis d’affronter plusieurs situations lors des dernières années, a précisé le ministre, sachant que le secteur de l’élevage dans le Royaume touche 75% des agriculteurs, emploie 30% de la main d’œuvre en milieu rural, et participe à environ 30 à 35% du PIB agricole.
Ainsi, s’est-il félicité, le Maroc a pu gagner le statut de pays officiellement indemne de la peste équine en 2015, ce qui a eu un effet positif pour la promotion des exportations des chevaux vers les autres pays (UE, USA,…), soulignant qu’en matière de lutte contre la fièvre aphteuse, l’OIE a reconnu depuis 2012 le statut du Maroc en tant que pays ayant un programme officiel de contrôle de cette maladie. Un statut qui est toujours maintenu grâce aux efforts fournis par le Royaume pour préserver son cheptel à l’égard de cette maladie qui ne cesse de menacer la région, a-t-il relevé.
Akhannouch a, d’autre part, expliqué que la prise de conscience de la corrélation presque systématique entre la santé humaine et animale se limite souvent, dans l’esprit collectif, aux transferts possibles de maladies, mais cette corrélation s’étend aussi au transfert de la « résistance aux maladies« , notant que l’initiative « One health » (une seule santé) « nous confronte à une réalité établie : santé humaine et santé animale sont liées; et toutes les deux liées à leur environnement, à leur écosystème« .
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« En tant que pays membre à l’OIE depuis sa création, nous saluons cette initiative portée par les organisations internationales : l’OMS, la FAO et l’OIE qui œuvrent de concert, depuis plusieurs années, pour combattre la menace de la résistance aux antimicrobiens chez l’homme, l’animal et l’environnement« , a soutenu Akhannouch, tout en saluant aussi les efforts fournis pour inciter les pays membres à œuvrer à l’élaboration de politiques harmonisées et intégrées, basées sur les normes internationales.
De son côté, le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus a, dans un message vidéo, souligné que les antimicrobiens constituent une menace sérieuse pour la santé et un véritable défi à relever.
Il a, dans ce sens, insisté sur la nécessité d’une coopération étroite pour répondre à cette menace, mettant l’accent sur l’importance du soutien des pays membres à développer des mécanismes et à mettre en œuvre des plans d’action nationaux pour relever ce défi.
Pour sa part, le directeur général de la FAO, José Graziano da Silva, a dans un message vidéo, indiqué que cette rencontre témoigne de l’action et de l’engagement des intervenants à travailler ensemble, notant que la plupart des pays ont engagé des plans d’action nationaux en la matière.
Il a, en outre, souligné que la lutte antimicrobienne est capitale pour assurer la sécurité sanitaire, insistant sur l’impératif d’identifier les risques liés à cette problématique et sur l’importance du rôle des différentes parties (organisations concernées et intervenants) pour assurer la protection, à la fois, de la santé animale et humaine.
La directrice générale de l’OIE, Monique Eloit, a, quant à elle, fait remarquer que le sujet de la résistance aux antimicrobiens constitue un enjeu sanitaire majeur, relevant que les scientifiques ont alerté, il y a longtemps, sur les risques et les répercussions de cette problématique.
Toutefois, l’engagement scientifique n’a pas été suffisant pour y répondre, d’où la nécessité, a-t-elle souligné, d’un engagement politique qui reste déterminant dans la réponse et le contrôle de la résistance aux antimicrobiens.
Elle a, d’autre part, passé en revue les stratégies et les actions entreprises par l’OIE en la matière, estimant que cette importante conférence permettra de déterminer des pistes pour des actions futures.
D’après l’OIE, des pays membres ont fait preuve d’un engagement impressionnant en faveur du développement de leurs compétences nationales en ligne avec les normes internationales.
C’est ainsi que cette deuxième conférence, à laquelle prennent part plus de 500 participants venant de 136 pays, dont des ministres, des délégués de l’OIE et les points focaux nationaux pour les produits vétérinaires, des experts, des professionnels, des décideurs politiques, des organisations internationales et des donateurs, intervient à un moment charnière dans la lutte contre l’antibiorésistance, et revêt une importance capitale dans la mesure où elle vise à capitaliser et à consolider ces efforts, accroître la compréhension de la situation globale de l’antibiorésistance chez les animaux et à développer des recommandations en vue d’un contrôle durable de l’AMR dans le futur, tout en maintenant la santé et le bien-être animal, la santé publique vétérinaire et la sécurité alimentaire.
La Conférence sera un forum de discussion permettant de réfléchir à la meilleure façon de soutenir les pays membres en ligne avec les objectifs de la stratégie de l’OIE et du Plan d’action global contre l’antibiorésistance.
Le programme de ce conclave prévoit une série de séances techniques encadrées par des experts, notamment sur « La participation du secteur de santé animale aux plans d’action nationaux en matière de résistance aux antimicrobiens », « Le changement des comportements et stratégies de communication pour une réduction de l’utilisation des antimicrobiens chez les animaux », « L’utilisation responsable et prudente des agents microbiens vétérinaires : outils pratiques et expériences », « La surveillance et suivi pour une gestion efficace de la résistance aux antimicrobiens, « Panel industries : encourager l’implication du secteur privé dans la réponse mondiale à la résistance aux antimicrobiens », « La recherche et les développements futurs dans la lutte contre la résistance aux antimicrobiens » et « Les partenariats internationaux pour une mise en œuvre efficace du contrôle de la résistance aux antimicrobiens ».