Livre: « Le Sahara Marocain » l’espace et le temps
Hubert Seillan présente dans cet ouvrage l’espace global, qui enserre le Maroc et ses régions du Sahara marocain. Il pointe du doigt l’existence d’influences variées, venant du Nord ou Septentrion, de l’Ouest ou Ponant, du Sud et de l’Est ou Orient. Ces forces vives sont toujours agissantes. Elles le sont encore plus après la lecture de ce texte.
À propos du livre
Lorsque j’avais quatre ou cinq ans, un rêve un peu inquiétant m’entrainait vers le sommeil. Une peinture accrochée en face de mon lit, représentait un homme et un chameau, au repos, à l’ombre d’un arbre éthique, sur fond de l’immensité désertique. Je savais qu’il s’agissait du Sahara. Le nom avait quelque chose d’un peu effrayant. Cette assonance du a résonnait en moi comme un cri étrange. J’éprouvais en même temps une impression de force.
Un peu plus tard, je lus Saint-Ex dans Courrier Sud, trop tôt sans doute pour en saisir l’essentiel, mais j’en ai gardé l’idée d’un infini de l’espace et du temps ouvert aux hommes libres. De l’océan Indien à l’océan Atlantique, ce grand désert sépare au Nord le pays des blancs et au Sud le pays des noirs. Dans les temps anciens, il était Océan. Sur les mers il y a des marins, sur le sable, des nomades, et pour tous la quête de l’eau nécessaire à la vie. Le mot frontière y a été inconnu jusqu’à l’arrivée de la « civilisation ».
Le Sahara est donc tchadien, nigérien, malien, mauritanien, marocain, algérien, tunisien, libyen etc.
C’est le « marocain » qui est raconté ici, par la géographie, l’histoire, l’économie et le droit. Cette langue de plus de 1000 km qui sort du Maroc pour aller lécher la Mauritanie, est humectée par l’humidité océane. Ce Sahara atlantique est donc placé sous des auspices bienfaisants. Ses pâturages à chameaux en ont fait un espace envié.
Envié il l’a été plus encore à la fin de la période coloniale, quand l’Algérie et l’Espagne ont tenté de l’établir dans la forme d’un Etat, qui, ne pouvant être qu’artificiel, leur aurait permis de poursuivre la domination coloniale, mais la tentative a échoué. Il faut savoir que, depuis 1400 ans, le Maroc a été perçu dans le grand Ouest africain, comme une autorité spirituelle et politique. Les liens coutumiers entre les hommes du Sud et du Nord sont si nombreux qu’ils rendent absurde l’idée même d’une identité saharienne distincte. Le Sahara marocain ne peut donc être compris en dehors du Maroc.
2300 km entre Tanger et la Mauritanie, réservent évidemment des particularismes locaux. Ceux du Sud sont proches de ce qu’était il y a peu encore la Californie. Un observateur attentif y trouvera les germes d’une aussi belle aventure. Ce livre doit l’y aider.
Quelques extraits
« On observera qu’une spécificité propre du Sahara de l’Ouest n’a jamais été retenue comme essentielle pour son identité juridique. Celle-ci était marocaine sans plus. Elle était non contestable puisqu’elle était une réalité, née dans les temps les plus reculés, et le produit des forces naturelles et sociales qui ont donné naissance à des récits fabuleux partagés collectivement. Le passé délivre bien des vérités.»
Page 26
« Nous devons, aujourd’hui, apporter toute notre attention à la place accordée à la France et aux Français dans le cœur des Marocains. Ces rapports plus fraternels qu’amicaux, nous obligent à en rechercher les ressorts. Le Maroc est un tout culturel, avant d’être un État. Il a été un empire étendant son autorité jusqu’au Sénégal et au Tchad. Un empire Nord-Sud, plutôt qu’Est-Ouest, entretenant des relations avec l’Andalousie maure, puis avec les pays d’Europe, et singulièrement avec la France de l’Ancien Régime et de nombreux autres pays européens. On ne recense pas moins de trente-six conventions conclues avec ces pays, certaines portant sur l’assistance aux voyageurs français. D’une certaine façon, le Sahara, dit ‘’occidental’’, s’inscrit dans cette logique verticale et ne peut être identifié en dehors du Maroc. On peut donc dire qu’il est agrégé à tous les symboles du Maroc, dont celui de la fraternité avec les Français.»
Pages 50-51
« Le modèle d’autonomie avancée qui est en marche au Sahara est donc en parfaite harmonie avec la culture traditionnelle de ses habitants et avec l’évolution du monde moderne. Parce que l’habit du droit est en accord avec le corps social, la question de l’indépendance n’a, dès lors, plus grand sens. C’est sans doute pour cela que la communauté internationale a qualifié ce modèle de « sérieux » et « crédible » et ne considère plus le référendum d’autodétermination-indépendance, comme la solution du conflit.»
Pages 133-134
À propos de l’auteur
Hubert Seillan est juriste. Après avoir été universitaire et éditeur, il est avocat au Barreau de Paris. Il est également président de la fondation France Maroc-Paix et développement durable.