Mort d’Abou Bakr El Baghdadi : entre soulagement et inquiétudes
Quand les groupes terroristes et les États-Unis étaient alliés
Si aujourd’hui les États-Unis se livrent à une guerre sans merci contre les groupes terroristes, ces derniers n’ont pas toujours été des ennemis, bien au contraire. Force est de rappeler que 30 ans en arrière, lors de la guerre froide qui opposait les deux principaux blocs, à savoir l’URSS et les États-Unis et leurs alliés, les groupes terroristes étaient d’une aide précieuse, dans le combat contre le bloc qui opposait les Américains. En 1979, les Etats-Unis de Jimmy Carter participaient alors au recrutement de ce qu’on appelait les « Moudjahidin » alias « Les combattants de la foi ».
Venus du monde entier, ils ont lutté contre l’invasion de l’Afghanistan par l’URSS et contre une potentielle étendue vers l’Asie centrale. À cette époque-là, le bloc de l’Ouest vantait les mérites de ce groupe, grâce auquel « l’Empire du Mal » s’était effondré, suite à une défaite sanglante. L’Afghanistan est devenu ainsi un véritable incubateur du terrorisme et a donné naissance à plusieurs groupes qui, aujourd’hui, sèment l’effroi dans le monde. Mais à présent, de nombreuses questions persistent : Si les États-Unis ont alimenté le groupe terroriste qui a fait émerger Al-Qaida, pourquoi veulent-ils maintenant se débarrasser desdits groupes ? Une chose est sûre : si hier les intérêts géopolitiques primaient, aujourd’hui, les groupes terroristes sont sur tous les radars.
Le chef de l’État Islamique est-il vraiment mort ?
Ce n’est pas la première fois que l’un des hommes les plus recherchés au monde est annoncé comme mort. En 2017, c’était la Russie qui affirmait avoir tué le chef de « l’État Islamique » lors de frappes aériennes. Son décès avait alors « été confirmé » par plusieurs sources excepté les États-Unis qui le considéraient vivant jusqu’à preuve du contraire. En 2014, c’est la mort d’Oussama Ben Laden qui avait fait polémique.
Tantôt le scénario de l’opération à 100% américaine qualifiée de mensonge, tantôt la communauté internationale allant jusqu’à questionner sur la véracité du scénario de sa mort, faute de preuves après qu’il ait été jeté à la mer. Si Donald Trump s’est toutefois montré clair sur les circonstances de la mort, en détaillant que « al-Baghdadi a été tué par l’explosion de sa propre ceinture explosive, alors qu’il a été poursuivi et pris au piège dans un tunnel par les forces américaines », la Russie, elle, émet des doutes et affirme que « ces derniers jours, aucune frappe aérienne n’a été effectuée dans la zone de désescalade d’Idleb par des avions américains ou par la soi-disant coalition internationale ».
Faut-il alors croire à la mort d’Al-Baghdadi ou bien attendre des preuves concrètes de sa mort telles que des images de la dépouille ? Les questions fusent et certains n’hésitent pas à mettre en relation la mort d’El Baghadi avec la fin du mandat de Trump, de la même façon que celle d’Oussama Ben Laden coïncidait avec la fin du mandat de Barack Obama.
L’après Baghdadi, que va-t-il se passer ?
Alors que les chefs d’États se réjouissent et se félicitent du décès du chef de l’EI, qu’ils qualifient d’un véritable « tournant dans le combat commun contre le terrorisme », l’ère post-Baghdadi risque d’être bien plus mouvementée. Hormis la portée symbolique dans l’histoire du combat contre le terrorisme, la mort du chef de Daech ne signifie pas la victoire contre le terrorisme, bien au contraire, les répercussions risquent d’être intenses.
Les dirigeants appellent alors à l’extrême vigilance, à l’instar de Christophe Castaner qui a averti les Français sur une « possible intensification de la propagande djihadiste consécutive à ce décès » et à de possibles « actes de vengeance » qui doivent conduire « à la plus extrême vigilance, notamment à l’occasion des événements publics ». Par ailleurs, les spéculations vont bon train quant aux successeurs potentiels d’Al Baghdadi. Certains médias américains annonçaient, en 2017, le nom d’Iyad al-Obaidi, nommé adjoint d’Al-Baghdadi en 2015. Une chose est évidente, le nouveau chef de « l’État Islamique » devrait incarner une figure d’autorité et de résistance, pour succéder à celui qui est resté près de 9 ans à la tête de l’Organisation.
Par Mariam MAAZOUZ