Algérie: l’armée parle d’un « élan populaire » pour la présidentielle
Le chef d’état-major de l’armée Ahmed Gaïd Salah, homme fort de facto de l’Algérie, s’est réjoui mardi de « l’élan populaire » suscité par la présidentielle du 12 décembre, dont tout indique pourtant qu’elle est massivement rejetée par la population, sur fond de contestation du régime.
La campagne qui s’est ouverte dimanche s’annonce agitée, les cinq candidats étant confrontés à des manifestations d’hostilité et tenant des meeting sous forte protection policière.
Lors d’une de ses régulières allocutions prononcées à l’occasion d’une visite sur le terrain, le général Gaïd Salah, a de son côté dit sa « grande admiration et fierté » pour « cet élan populaire qui s’est propagé à travers le pays » avec des « marches populaires spontanées soutenant l’armée (…) et la tenue de la présidentielle ».
Dans la matinée, un millier d’étudiants et de citoyens avaient pourtant défilé, sous la pluie, pour un 39e mardi consécutif contre le régime, scandant notamment, comme chaque fois ces dernières semaines, « Non aux élections! » ou « Dégagez! dégagez! » à l’adresse de leurs dirigeants.
Des manifestations estudiantines ont aussi eu lieu dans d’autres villes, selon des médias locaux.
→ Lire aussi : Algérie: nouvelles protestations contre la présidentielle au 3e jour de campagne
« Toutes les franges de notre peuple, toutes catégories confondues, hommes, femmes, jeunes, étudiants et vieux, sont sorties dans (…) la cohésion, la solidarité et l’adhésion du peuple autour de son armée (…) exprimant dans leur ensemble la volonté de se diriger massivement aux urnes le 12 décembre », a soutenu de son côté le général Gaïd Salah.
Les médias algériens ont fait état ces dernières semaines de quelques manifestations de soutien au scrutin à travers le pays.
Mais elles semblent avoir très peu mobilisé, comparées aux cortèges massifs qui chaque semaine scandent leur rejet d’un scrutin que le « Hirak », le mouvement inédit de contestation du régime né en février, estime destiné à régénérer un « système » politique dont il exige le démantèlement.
« L’intérêt de la patrie signifie certainement que le peuple algérien veille (…) en s’acquittant de son devoir électoral, à faire preuve de raison », a poursuivi le général Gaïd Salah, appelant « toutes les franges du peuple algérien (…) à se tenir main dans la main » et à participer au scrutin, « porte ouverte sur le bonheur et la prospérité de l’Algérie et son peuple ».
Dalila, fonctionnaire quinquagénaire manifestant mardi à Alger, semble peu sensible aux appels de l’armée à se rendre aux urnes. La campagne électorale est « une comédie » et le jour du scrutin, « le peuple sera absent », assure-t-elle.
L’armée n’a « aucune ambition politique » et n’a pour « objectifs » que « le bien de l’Algérie et de son peuple », a aussi répété le général Gaïd Salah, mais « sera aux aguets contre quiconque tente de porter atteinte aux fondements de la Nation, à l’intégrité territoriale et à l’unité populaire ».
Le haut commandement militaire est l’un des piliers de l’appareil de pouvoir en Algérie depuis l’indépendance en 1962 et joue un rôle-clé dans les mécanismes de décision extrêmement opaques. Certains observateurs lui attribuent même le « pouvoir réel ».
Depuis la démission en avril, sous pression du « Hirak », d’Abdelaziz Bouteflika, président depuis 20 ans, le général Gaïd Salah est apparu comme l’homme fort du pays, au détriment de l’effacé président par intérim Abdelkader Bensalah.
Avec AFP