Le quota des femmes au niveau de la scène politique a connu une montée remarquable
Depuis l’adoption du Maroc en 2002 du système du quota, à travers une liste nationale dédiée aux femmes dans les élections législatives, la représentativité des femmes au niveau de la scène politique a connu une montée remarquable, marquée par une augmentation du nombre de femmes au sein du parlement.
Appliqué il y a 18 ans, ce système posent plusieurs questions quant à la capacité de cet outil à consacrer le leadership féminin en dehors de la liste nationale.
Le système de quota des femmes, préconisé par les pays participant au 4ème conférence mondiale sur les femmes, tenue en 1995 à Pékin, vise à renforcer la présence de la femme dans les institutions élues et les postes de décision en leur attribuant un pourcentage défini de sièges.
Le Maroc a, dans ce sens, adopté un scrutin par représentation proportionnelle, qui consacre une liste nationale aux femmes et une autre aux jeunes, dans le but de garantir un minimum de représentativité féminine au parlement. Ainsi, le pourcentage de quota a été fixé à 60 sièges dans les élections législatives de 2016, contre 30 sièges lors des élections législatives de 2011, selon les dispositifs de la loi réglementaire n°11-27 de la chambre des représentants.
Ce mécanisme a permis d’augmenter la représentativité des femmes au parlement. Le nombre de députées est passé, en effet, de 2 en 1993 à 35 en 2002 (année d’adoption du système de quota), atteignant 67 en 2011 et 81 députées en 2016, selon les chiffres d’une étude réalisée par l’association « Jossour forum des femmes marocaines » en 2017 sur l’évaluation des mécanismes de renforcement de la représentation politique des femmes au Maroc.
Malgré cette avancée notable, ce chiffre reste modeste par rapport au nombre total des députés, qui compte actuellement 395, d’où la nécessité de se poser la question quant à l’efficacité de ce système qui constitue aussi bien une discrimination positive à l’égard des femmes qu’un mécanisme limitant sa réelle participation politique.
Dans ce sens, le professeur du droit à l’université Mohammed V de Rabat Abdelhafid Adminou estime que le système de quota est l’une des techniques les plus importantes adoptées par la majorité des pays du monde pour promouvoir la présence de la femme dans la vie publique, précisant que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes permet de prendre des mesures de discrimination positive en vue de renforcer la représentativité politique des femmes.
Il a ajouté, dans une déclaration à la MAP, que cette volonté internationale a été incarnée par le législateur marocain, à travers les lois réglementaires proposées par la chambre des conseillers et des représentants, affirmant que la cour constitutionnelle a approuvé les dispositifs de discrimination positive en faveur de la femme et a insisté sur son caractère temporaire, lors de la vérification de la conformité de ces lois réglementaires avec la constitution.
Il a estimé que le niveau de représentativité des femmes au parlement ou aux conseils est due au système de quota, vue que le nombre de femmes qui ont pu accéder au conseil de représentants via les circonscriptions locales ne dépasse pas six femmes.
« Suivant la philosophie du législateur qui considère que ces dispositifs sont temporaires et visent à qualifier les femmes pour accéder aux circonscriptions locales, on peut dire que le système de quota n’a pas rempli ses missions »,a-t-il fait valoir, ajoutant que la présence des femmes reste liée à ce dispositif, sans lequel la représentativité des femmes reste faible.
Il a, en outre, souligné que le fait d’organiser un référendum par rapport à cette affaire n’a pas lieu d’être, puisque même les mouvements féministes tendent vers la parité, à travers la suppression du quota, ce qui exige la mise en place de programmes relatifs à la culture politique, et à l’autonomisation économique et financière de la femme, étant donné que l’indépendance financière de la femme lui permettrait de se libérer du quota.
M.Adminou a également insisté sur le rôle des partis politiques dans l’encouragement de la représentativité de la femme en politique, soit par l’incitation à occuper des postes de responsabilité au sein des partis politiques d’une part, ou par sa désignation en tête de liste dans les circonscriptions locales d’autre part, ou bien même dédier des circonscriptions spécialement aux femmes, en plus du système du quota.
Pour sa part, la députée parlementaire Hakima Bel Kassaoui affirme que le système de quota a permis de dégager une élite politique féminine présente au sein du parlement, or, peu de députées travaillent au niveau local, en coordination avec la société civile ou les collectivités territoriales.
Mme Bel Kassaoui a souligné, dans une déclaration, qu' »en plus de l’absence de la commercialisation du travail de la femme dans le milieu des électeurs, il existe le problème des traditions, en plus du type d’élection qui incarne la situation actuelle, ainsi que l’absence d’une véritable volonté des partis politiques pour réussir la contribution politique de la femme », ajoutant qu’il suffit de se poser la question quant aux ex-députées parlementaires élues par les listes nationales.
La députée a, en outre, mis en relief le système du quota, en tant que mesure temporaire, et qui représente une nécessité en absence de mécanismes susceptibles de donner l’opportunité de réussite aux femmes. « Il ne faut pas oublier que grâce au quota, un pourcentage de 21% de femmes sont présentes au parlement, ce qui est un bon niveau en comparaison avec d’autres pays »,a-t-elle relevé, confirmant que cela peut s’envoler en cas de suppression de ce système, et s’il n’a pas été compensé par un autre système garantissant la représentation des femmes au parlement.
« On ne peut pas dire que le quota permettra de donner une élite capable de concurrencer les hommes pour les causes citées auparavant, et qui tourne principalement autour de la conscience des partis politiques du rôle principal de la femme à réussir ou échouer tout modèle de développement », a-t-elle fait valoir.
Ainsi, le système du quota demeure une expérience positive dans le parcours démocratique national, permettant à plusieurs femmes d’accéder au monde politique, or, il est temps de transformer profondément les mentalités, afin d’assurer une large contribution de la femme marocaine dans la vie politique.