El Othmani entre menaces d’El Aftati et devoir de réussir
Près de 10 jours sont passés depuis que le Roi Mohammed VI a nommé le nouveau gouvernement formé par Saad Eddine El Othmani. Depuis 10 jours aussi, tous les espoirs ont été portés sur ce changement que toutes et tous ont salué, y compris – avec peut-être moins d’enthousiasme – par Benkirane ! Mais en revanche depuis 10 jours un branle-bas de combat semble secouer certains cercles dirigeants au sein du PJD qui vit aujourd’hui l’une de ses plus graves crises !
Le moins que l’on puisse dire est que l’effervescence à laquelle on assiste, entre contestation et appel à un soulèvement, avait bel et bien commencé au lendemain de la désignation par le Roi de Saad Eddine Othmani comme chef du gouvernement. Des critiques peu amènes avaient fusé contre ce dernier tandis que les fidèles du carré de Benkirane – nostalgiques et frustrés – tressaient à celui-ci encore des couronnes tout en refusant de s’inscrire dans la dynamique du changement et de l’alternance, alors qu’ils ne cessaient de réclamer à cors et à cris l’alternance démocratique ! Sauf que l’alternance qu’ils défendent ne devait pas toucher Benkirane, idôlatré…
Leur rejet de Othmani est donc un déni de la démocratie et une violation de la Constitution, qui attribue au Roi la prérogative centrale et incontournable de désigner le chef de gouvernement de son choix !
N’est-ce pas les mêmes qui, après s’être opposés à la désignation de El Othmani, se sont lancés dans une guerre de tranchées et même violente contre lui quand il a commencé à négocier les postes ministériels et leurs attributions ?
N’est-ce pas aussi les mêmes qui, non contents de devoir déstabiliser le nouveau chef de gouvernement, en appellent par le biais de la « Jeunesse pijidiste » à l’organisation d’une réunion extraordinaire du Conseil national du PJD pour officialiser la déstabilisation d’El Othmani et l’isoler voire même l’excommunier à la longue, selon un procédé stalinien de sinistre mémoire !
La parodie d’un procès, quoi ! N’est-ce pas les mêmes qui éructent leur haine sur la nouvelle formation gouvernementale, contre « le Maroc dirigé par des lâches et de « chmayt » ? Monsieur Aftati qui affectionne les promenades nocturnes sur les frontières sensibles avec notre voisin de l’est s’est même risqué à lancer une invitation sous forme d’ordre aux jeunesses du PJD leur enjoignant ni plus ni moins de se confronter à « l’Etat profond », c’est-à-dire à se soulever contre les institutions ! Au terme de tahakkoum il substitue aujourd’hui celui de « l’Etat profond » et de « pouvoir solitaire » !
Relayé par les milices des sites électroniques du PJD dont on sait qu’ils sont maniables et corvéables, ce mouvement informe va – comme lors de la campagne électorale d’octobre dernier – jusqu’à l’insulte et la vulgarité !
Or c’est oublier que le PJD n’est qu’un parti comme tous les autres ! On n’a pas cessé de nous rebattre les oreilles à propos de son score électoral de 125 sièges qui, au total représente 1,5 million de votants sur 16 millions d’inscrits et 38 millions d’habitants du Maroc ! Donc une majorité relative compte tenu que les militants du parti islamique, discipline oblige à l’exemple d’une armée, se rend entièrement aux urnes !
Il convient de s’interroger finalement si cette agitation enflammée par les apparatchiks au sein de la direction du PJD aura-t-elle des conséquences directes sur le gouvernement constitué d’une majorité de 6 partis, sur son fonctionnement et ses activités ?
La question se pose avec gravité d’autant plus que le chef de gouvernement , El Othmani, prononcera vendredi prochain devant le Parlement le discours attendu qu’on appelle la Déclaration gouvernementale pour obtenir le vote de confiance auquel sont conviés les élus de la nation ?
Ce passage oral obligé, rituel incontournable inscrit dans la Constitution, sera un test pour le nouveau chef de gouvernement qui s’active depuis une semaine au moins afin de convaincre partisans et opposants au sein de son parti d’approuver la Déclaration gouvernementale !
Un test pour mesurer le poids de ses soutiens comme aussi de ses adversaires ?
Ainsi une certaine presse avance-t-elle déjà que Benkirane serait tenté de ne pas voter le programme que son successeur déclinera vendredi du haut de la Chambre des représentants ou même de s’absenter lors de la cérémonie d’investiture !
Ce qui signifierait une première grande fissure dans les instances du PJD et créditerait l’idée d’un malaise !
Sans un vote massif en faveur de la Déclaration gouvernementale vendredi, El Othmani serait handicapé ! Or, depuis quelques jours il s’active pour réunir les conditions, y compris et surtout au sein du PJD, afin d’obtenir le vote favorable décisif et se mettre au travail !