L’insolent essor du «made in China»
Par Gabriel BANON
Joe Biden, le président élu des États-Unis, risque d’arriver un peu tard pour mettre un frein à l’hégémonie chinoise sur le marché mondial. L’entrée fracassante de Pékin dans le domaine des nouvelles technologies complique encore plus le problème. Il semble que la caravane chinoise poursuit sa route, insensible aux remous qu’elle provoque.
Le « Made in China » continue sa conquête des marchés malgré les discours sur la démondialisation et les ambitions de délocalisations. Tirée par les exportations, notamment vers l’Europe, la reprise en Chine se confirme de jour en jour. Faisant fi de toutes les critiques, contrant les mesures prises par les Américains pour mettre un bémol aux importations des produits chinois, le constat est cinglant, c’est la Chine qui gagne.
Accusé par Donald Trump d’être à l’origine de la pandémie, qui certes a débuté dans l’Empire du Milieu, la Chine fait un pied de nez à l’Histoire, en démontrant sa maîtrise dans la gestion de la crise sanitaire. Le géant asiatique semble être le premier pays à sortir de la crise. Peut-être que la leçon à tirer est que les épidémies sont mieux maîtrisées par des régimes dirigistes que par ceux démocratiques. La pandémie ne fait pas bon ménage avec les droits de l’Homme.
Pendant ce temps, loin du Pacifique, les Etats-Unis et l’Europe se débattent dans des confinements successifs et des mesures drastiques qui nuisent à leur économie. La reprise économique, si elle s’essouffle en Occident, s’effondre dans certains secteurs, prend de l’ampleur en Chine. Les chiffres officiels font état d’une croissance du PIB de plus de 4,9% sur un an au troisième trimestre. Compte tenu du plongeon historique de l’hiver dernier, la croissance moyenne depuis le début de l’année se situe à 0,7%.
La Chine va être le seul pays au monde à avoir échappé à la récession en 2020. Les pronostics des institutions économiques, comme Ostrum Asset Management, prévoient que si l’expansion se poursuit au rythme actuel, l’économie chinoise va progresser de 2 à 3% cette année.
Depuis le début de l’année 2020, Washington intensifie sa lutte dans le domaine des nouvelles technologies à l’égard de la Chine. Après Huawei puis ZTE, c’est désormais China Telecom, c’est l’opérateur historique de télécommunications de la République populaire de Chine, qui est dans le viseur des Etats-Unis. La société est la nouvelle cible de la guerre technologique que livre Washington à Pékin. Un peu tard, pour freiner la domination, jour après jour, que prend la Chine dans ce domaine. Elle détient, aujourd’hui, le supercalculateur le plus puissant du monde. Le Sunway Taihulight agrège au total 40 960 processeurs, dont chacun comporte 260 cœurs. Particularité : ces processeurs ne sont pas des processeurs Intel, mais des processeurs 100 % chinois.
Sunway Talhlignt domine désormais le classement des 500 supercalculateurs les plus véloces du monde. La machine est capable de calculer 93 millions de milliards d’opérations en virgule flottante par seconde. Le supercalculateur Sunway Taihulight est cinq fois plus puissant que le plus rapide système américain : le Titan qui se trouve actuellement au troisième rang mondial. Cette performance est d’autant plus impressionnante que le nouveau supercalculateur n’embarque que des processeurs chinois et non des processeurs américains comme c’était le cas pour le Tianhe-2.
Côté applications, Sunway Taihulight est actuellement utilisé pour des recherches sur des techniques de fabrication avancées, les big data, le climat, les sciences de la vie et la modélisation de systèmes terrestres. Les investissements chinois dans les processeurs et supercalculateurs de haute performance, ont été particulièrement efficaces. En 2001, aucune machine chinoise ne figurait dans le classement mondial des 500 supercalculateurs les plus puissants. Désormais, l’Empire du Milieu compte 167 supercalculateurs dans le classement, contre 165 pour les Etats-Unis. La France, elle, place dix supercalculateurs dans ce classement mondial. Le premier se trouve au 11e rang. Il s’agit du supercalculateur Pangea détenu par Total.
Après ses performances commerciales, la Chine démontre sa capacité à jouer dans la cour des grands dans les nouvelles technologies. La réponse à la question de Peyrefitte (Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera) est : La Chine est belle et bien réveillée, et le Monde tremble !