Covid-19: l’OMS opposée à l’utilisation du remdesivir
L’OMS recommande de ne pas administrer de remdesivir aux malades du Covid-19 hospitalisés, car ce médicament antiviral n’évite ni des morts ni des formes graves de la maladie, a-t-elle annoncé vendredi.
« Le médicament antiviral remdesivir n’est pas conseillé pour les patients admis à l’hôpital pour le Covid-19, quel que soit le degré de gravité de leur maladie, car il n’y a actuellement pas de preuve qu’il améliore la survie ni qu’il permette d’éviter d’être placé sous ventilation artificielle », déclare l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans un communiqué.
Elle s’est prononcée après l’avis de son panel d’experts, dont les conclusions sont publiées dans la revue médicale BMJ.
Ces experts soulignent « la possibilité d’importants effets secondaires » de ce médicament, de même que « son coût relativement important et ses implications logistiques », puisqu' »il doit être administré par intraveineuse ».
Selon eux, on ne peut pas dire à ce stade que le remdesivir n’a aucun bénéfice. Mais le fait que son efficacité n’ait pas été prouvée conjugué à ses inconvénients (possibles effets secondaires et coût) les conduit à ne pas le recommander.
Ils appellent toutefois à poursuivre les essais cliniques, pour voir si ce médicament ne pourrait pas bénéficier à certaines catégories de patients en particulier.
« Il y a peut-être certains signaux selon lesquels les gens qui sont moins malades ou en sont à un stade plus précoce de la maladie pourraient être une zone à explorer », a déclaré l’un des responsables du panel d’experts, Bram Rochwerg, lors d’une conférence de presse.
Initialement développé contre la fièvre hémorragique Ebola, le remdesivir est vendu par le laboratoire Gilead sous le nom commercial de Veklury.
Il est devenu le 3 juillet le premier médicament contre le Covid à recevoir une autorisation de mise sur le marché européen conditionnelle. Pour autant, il suscite plus d’enthousiasme en Amérique du Nord que sur le Vieux continent.
En France, la Haute autorité de Santé (HAS) a jugé que son intérêt (ou « service médical rendu ») était « faible ».
Par ailleurs, l’Agence européenne du médicament (EMA) a indiqué le 2 octobre qu’elle allait étudier des signalements selon lesquels des « problèmes rénaux aigus » pourraient être liés à la prise de remdesivir.
Les experts de l’OMS ont basé leurs conclusions sur l’analyse de quatre essais cliniques internationaux comparant l’efficacité de différents traitements et portant sur plus de 7.000 patients hospitalisés pour le Covid-19.
Une étude rendue publique mi-octobre et menée dans plus d’une trentaine de pays avec le soutien de l’OMS concluait déjà que le remdesivir n’avait pas prouvé de bénéfices en termes de réduction de la mortalité.
Selon une autre étude parue fin mai dans la revue américaine New England Journal of Medicine, il réduit en revanche légèrement la durée de rétablissement des malades du Covid-19 hospitalisés (de 15 à 11 jours en moyenne).
« Nous regrettons que les recommandations de l’OMS ne prennent pas en compte ces données alors même que le nombre de nouveaux cas augmente considérablement au niveau mondial et que les médecins recourent à Veklury, premier et seul traitement autorisé contre la COVID-19 dans plus de 50 pays dans le monde », a réagi Gilead dans un communiqué.
Le laboratoire fait valoir que son médicament est reconnu « par de nombreuses organisations nationales crédibles telles que l’US National Institutes of Health and Infectious Diseases of America, le Japon, le Royaume-Uni et l’Allemagne ».
Fin octobre, Gilead avait annoncé que le remdesivir lui avait déjà rapporté près de 900 millions de dollars au troisième trimestre.
Pour l’instant, les corticoïdes (dont la dexaméthasone) sont le seul traitement qui a permis de réduire la mortalité due au Covid-19, même si cela n’est vrai que pour une catégorie de patients (les cas sévères qui nécessitent l’administration d’oxygène). L’OMS a recommandé leur « usage systématique chez les patients atteints d’une forme sévère ou critique ».
( Avec AFP )