Repenser notre système de Santé devrait constituer une priorité nationale et dépasser tous les clivages politiques
Il y a quelques semaines, le Maroc a connu des records de cas positifs et un débordement des hôpitaux qui ont révélé l’absence flagrante d’une politique de crise du ministère de la Santé. La carte sanitaire, comme les politiques régionales se sont révélées être des coquilles vides. Aujourd’hui, nombreux sont les défis auxquels est confronté notre système de santé, notamment, la faiblesse de l’offre de soins, la pénurie des ressources humaines, l’insuffisance en qualité des soins et la persistance des disparités entre régions. «Si par définition, l’éclosion d’une crise sanitaire est imprévisible, sa gestion devrait être anticipée, et les moyens humains et techniques potentiellement mobilisables, répertoriés et définis», tels sont les principaux enseignements et leçons à tirer de la gestion de la crise sanitaire Covid-19, selon Professeur Youssef El Fakir, auteur de l’ouvrage «Plaidoyer pour une réforme du système de santé au Maroc : ordonnance pour une politique de santé 2.0». Ce plaidoyer s’inscrit dans une approche constructive visant à définir les contours d’une nouvelle politique de santé, axée sur le citoyen en partant de nos acquis sociétaux.
Professeur de radiologie, expert en télémédecine et vice-président de la Fondation des Médecins Enseignants libéraux, Youssef El Fakir a accepté de répondre aux questions de MAROC DIPLOMATIQUE, dans le cadre d’un long entretien.
MAROC DIPLOMATIQUE : Dans votre ouvrage, vous plaidez, sur 332 pages, pour une politique de santé 2.0 en vue d’une justice sociale en matière de santé et une efficience de notre système de soins, ainsi qu’une régulation du parcours de soins. Pourriez-vous nous expliquer ce choix d’un plaidoyer ? Pourquoi ce timing ?
– Youssef El Fakir : Je n’ai jamais pensé écrire sur la politique de santé, bien qu’on en débatte souvent entre médecins. Le choix de ce sujet m’a été inspiré voire dicté par la crise sanitaire actuelle, qui a dévoilé non seulement nos insuffisances en matière d’offre de soins, mais aussi l’absence de prévision et de vision pour notre système de Santé.
Nous avons vu comment une crise sanitaire s’est transformée en crise économique, avec ses conséquences économiques et sociales pour la quasi-totalité des pays, dont les plus industrialisés.
Si la «bonne Santé» peut coûter cher à la société, la «mauvaise Santé» ou la perte de Santé impactent de façon directe et négative l’économie de toutes les sociétés, quels que soient leurs niveaux de développement et d’industrialisation. Le confinement m’a donc permis de plonger dans une lecture transversale des données de la Santé, que j’ai voulu synthétiser et partager avec les lecteurs à travers la première partie de mon plaidoyer que j’ai intitulé l’État des lieux. J’ai ensuite entamé l’écriture de ce plaidoyer le 25 mars 2020, pour rendre ma copie le 18 août 2020. J’ai été aidé en cela par des experts nationaux auxquels je tiens à rendre hommage.
Repenser notre système de Santé devrait constituer une priorité nationale et dépasser tous les clivages politiques. Réformer notre système me paraît donc une évidence afin de faire face aux défis actuels et futurs.
MD : L’usage du terme 2.0 entend la nécessité du changement de paradigmes, mais quels changements face aux défis sanitaires actuels qui sont indénombrables ?
– Y.EF : Le concept Santé «1.0» tel que nous le pratiquons actuellement, s’essouffle et montre ses limites. Il y a lieu de l’analyser en profondeur et d’étudier sa capacité à gérer les défis sanitaires actuels et futurs que connaît notre pays. C’est dans cet esprit que s’inscrit notre plaidoyer «pour une Santé 2.0», qui sous-entend la nécessité de changement de paradigmes pour répondre, avec acuité, aux défis actuels et futurs et ce, à travers l’ensemble du territoire national.
Malgré les efforts consentis par les gouvernements successifs depuis l’indépendance, force est de constater que le Maroc est face à trois défis majeurs :
1- Combler le déficit en ressources humaines et veiller à l’équité de leur répartition. Il est à rappeler que le Maroc compte seulement 27.266 médecins pour presque 36 millions d’habitants, avec une importante inégalité de répartition, à travers le territoire national. Les régions de Casablanca-Settat et Rabat-Salé-Kénitra concentrent plus de 56% de l’effectif des médecins privés et 39% de l’effectif des médecins publics.
2- Gérer deux grands groupes de maladies : Les Maladies Transmissibles (MT) et les Maladies Non Transmissibles (MNT).
3 – Veiller à assurer en nombre et en qualité les offres de soins à travers le Royaume, équation difficile à résoudre compte tenu de ce que nous avons développé précédemment.
Afin de répondre à ces défis, nous devons innover et réformer dans la forme et dans le fond. Nous assistons à une transition épidémiologique avec glissement vers les affections longue durée (ALD) et les affections longues et coûteuses (ALC) qui sont chronophages pour le temps médecin et budgétivore pour les dépenses de l’État et du citoyen, mais aussi à une transition démographique attestée par le début de vieillissement de la population, sans oublier les orientations Royales visant une couverture globale des citoyens dans les mois à venir. Pour ce faire, l’organigramme de notre ministère de tutelle, n’est plus adapté pour répondre aux défis actuels et futurs.
Nous devons revisiter notre système de gestion de la Santé en veillant à :
- Mettre en place une Haute Autorité Nationale de Santé, qui serait chargée d’établir les normes de qualité, de rigueur, d’efficience, d’équité et d’indépendance des offres et du parcours de soins. Les productions en matière de recommandations, de référentiels, d’évaluations, de certifications et d’accréditations que cet organe fournirait en toute indépendance et en parfaite connaissance des sujets, compte tenu des commissions spécialisées qu’il mettrait en place, serviraient de Guide de Bonnes Pratiques. Ses productions contribueraient à homogénéiser voire assainir les procédés thérapeutiques au sein des différentes structures de soins à travers le Royaume, et serviraient de référentiels pour le remboursement des actes par les organismes gestionnaires des assurances maladies qui, dès lors, se consacreraient à leur cœur de métier, loin de tout conflit d’intérêt.
- Réformer notre modèle de formation médicale et structurer la Formation Médicale Continue.
- Unifier l’assurance maladie en revisitant le panier de soins et la tarification nationale de référence, à son juste prix dans un esprit citoyen.
- Organiser des parcours de soins adaptés aux différentes régions du Maroc, dans le cadre d’une régionalisation avancée en y intégrant le digital (Télémedecine, Dossiers patients informatisés, ..).
- Réhabiliter les structures de soins de base qui devraient concentrer à eux seuls plus de 90% des consultations, tout en veillant à une réelle motivation scientifique et matérielle du personnel soignant.
Vouloir améliorer notre système de soins, à travers la seule augmentation des dépenses de l’État en matière de Santé serait contre-productif en l’absence d’une restructuration, voire d’une refonte de notre système de Santé. D’ailleurs, cette augmentation du budget ne permettra que de juguler la charge des hôpitaux et de reporter pour les générations futures, les réformes structurelles pourtant nécessaires.
MD : Concernant vos enseignements de la gestion de la crise Covid, vous considérez que «nous avons beaucoup à apprendre du mode de gestion des crises par l’armée». Le Maroc aurait-il pu mieux gérer cette crise si les moyens humains et techniques étaient mobilisables et bien définis ?
– Y.EF : Dès l’apparition des premiers cas au Maroc, et grâce aux Hautes Instructions Royales, l’ensemble des organes de l’État se sont impliqués pour une gestion exemplaire de la crise de la Covid-19, aidés en cela par l’engagement sans faille du personnel soignant de tous les secteurs de soins, mais aussi par la société civile, les médias, …
Cette prise en charge a dû mobiliser d’importantes ressources humaines et «immobiliser» de nombreuses structures de soins pour la prise en charge exclusive des cas de Covid-19. Nos ressources étant inextensibles, leur mobilisation s’est faite aux dépens de la prise en charge des affections non Covid (ALD, ALC, urgences variées, …) et qui représentent presque 75% de l’épidémiologie des maladies au Maroc.
C’est dans cette optique que s’inscrit ma réflexion concernant la gestion des crises par l’armée. Nous devons définir des parcours de soins adaptés aux maladies mais aussi aux régions et prévoir des scénarios catastrophes.
Nous devons aussi cesser d’opposer le secteur public et privé, au profit d’une régulation et d’une réglementation des soins profitable au citoyen, en étoffant le panier de soins et en uniformisant les assurances maladies.
MD : «Un mode gestion statique et centralisé» et «des programmes de santé verticaux», c’est le constat que vous dressez et qui révèle aussi un problème de manquement de ressources humaines. Est-il urgent, aujourd’hui, de repenser cet aspect de notre politique sanitaire ?
– Y.EF : Aujourd’hui plus qu’hier. Rappelons que le Maroc a opté, au lendemain de l’Indépendance, pour un modèle de Santé où l’État s’occupait de la production des soins et services, du financement des soins, de la gestion des établissements et de la régulation du secteur. Cette vision s’est retrouvée déclinée dans les missions et l’organigramme du Ministère de la Santé, tel que stipulé dans l’art. 4 du Décret n°2-94-285 du 21 novembre 1994, relatif aux attributions et à l’organisation du Ministère de la Santé publique.
L’émergence d’un secteur privé qui concentre, actuellement, plus de 53% des ressources humaines, et entre 60% et 90% du matériel biomédical lourd, de même que le double virage épidémiologique et démographique qu’a connu notre Royaume, font que la gestion de la santé ne saurait être sous la charge du seul ministère de la Santé ni être dictée de façon centrale, comme c’est le cas dans la gestion des maladies infectieuses et transmissibles.
Il faut aussi rappeler que le Maroc est pluriel. Nous avons un panorama épidémiologique et culturel que nous devons intégrer dans notre mode de gestion de la Santé. Cela suppose une parfaite connaissance des données locales, provinciales et régionales pour pouvoir élaborer des politiques de santé ciblées. Certaines pathologies sont l’apanage de localités bien définies. Leur prise en charge devrait donc s’inscrire dans une politique de santé régionale et non nationale. Le contraire est aussi vrai.
Par ailleurs, l’intégration du digital ne devrait pas être perçue comme un effet de mode mais devrait constituer un réel atout à la gestion de nos défis sanitaires. L’informatisation des données des patients permettraient non seulement un excellent suivi des patients, particulièrement ceux suivis pour des affections chroniques en leur permettant de bénéficier de l’expertise des experts à distance de leur lieu de résidence grâce à la télé expertise, mais permettrait aussi le recueil de données nécessaires pour l’établissement de politiques de santé adaptées aux besoins et aux attentes des citoyens à l’échelle locale, régionale et nationale.
MD : Au Maroc, les frais des soins de santé sont assumés par les ménages à raison de 54%. Est-ce que c’est normal que les ménages continuent à supporter la grande partie des charges liées aux soins ?
– Y.EF : Le chiffre que vous avancez est malheureusement vrai, bien qu’il reste en deçà de la réalité, puisqu’il n’a pas été actualisé depuis plus d’une dizaine d’année. Il serait hélas plus important aujourd’hui, et ce, pour deux raisons. D’une part, le non-respect de la tarification nationale de référence (TNR) par la quasi-totalité des acteurs de soins et à juste titre, puisqu’elle n’a pas été revisitée depuis sa mise en application en 2006; et d’autre part, du fait de la mise sur le marché de nouveaux traitements très onéreux et souvent non remboursés par les gestionnaires d’assurances.
A cela il faudra relever l’iniquité du panier de soins et du montant de remboursement des frais de soins par les assurances pour les mêmes pathologies. Enfin, ce pourcentage ne concerne que les assurés, alors qu’il est de 100% du restant à charge pour les patients ne disposant pas de couverture médicale et de 100% pour les patients disposant du Ramed, quand ils choisissent de se faire traiter dans le secteur privé.
Devoir étendre la couverture médicale à l’ensemble des citoyens comme cela a été annoncé par le Souverain, lors du discours prononcé, le mercredi 29 juillet, à l’occasion du 21e anniversaire de son intronisation, où il a exprimé son «aspiration prioritaire» visant à «assurer la protection sociale à tous les Marocains», nécessiterait forcément une restructuration profonde de notre système de Santé, de notre parcours de soins, de notre panier de soins et de notre modèle de couverture médicale.
Celle-ci devrait être uniformisée et unifiée pour que le citoyen assuré puisse jouir de toutes les compétences humaines et techniques dont dispose le pays, indépendamment de son niveau socio-économique et des secteurs de soins.
MD : Un autre constat accablant que vous faites en rapport avec la gestion des ressources humaines dans ce plaidoyer, en disant que «les gérants du système de Santé ont fait l’économie de l’énorme potentiel du secteur privé», sachant que le privé compte 50% des médecins et produit 70% de l’offre de soins au Maroc. Selon vous, est-ce que le PPP est donc la solution pour une meilleure implication du privé dans la politique de Santé ? En ce sens, quel est le rôle que pourrait jouer la création d’une agence dédiée au PPP ?
– Y.EF : Les acteurs de soins au Maroc ne sont plus représentés par le seul secteur public. Nous avons assisté à un important développement du secteur libéral, militaire et des fondations, qui à eux trois concentrent plus de 70% de l’offre de soins dans notre pays. Établir des ponts entre les différents secteurs permettrait de juguler et d’absorber une partie des demandes de soins au profit du citoyen. Toutefois, le danger serait de pérenniser ce PPP, qui conduirait, à mon avis, à l’agonie du secteur public dont on a grandement besoin.
Le citoyen devrait être couvert par une assurance maladie qui devrait lui assurer avant tout sa dignité. Dès lors, tous les patients deviendraient clients avec tout ce que ce terme sous-entend en termes de service et de droits. Le PPP dans le sens d’achat de service, cesserait d’exister puisque l’achat n’est plus opéré par l’État mais dicté par le parcours de soins des assurés sous l’œil bienveillant de l’organe de régulation et de gestion de l’assurance.
L’hôpital retrouverait alors sa véritable place dans l’échiquier des structures de soins, puisqu’il concentrerait l’excellence et l’expertise pour assurer une prise en charge des pathologies lourdes tout en assurant une activité de soins de qualité pour la formation des étudiants en médecine et de l’ensemble du personnel soignant. Car malheureusement on a souvent tendance à oublier que la base de tout système réside dans ses ressources humaines, denrée rare par les temps qui courent, compte tenu de l’exode soutenu de nos compétences médicales vers les pays d’Europe et d’Amérique.
MD : Déficit de «production de médecins», émigration, départ à la retraite et retraite anticipée, vous évoquez une «hémorragie» par rapport au nombre de médecins exerçant actuellement au Maroc. Comment pallier l’insuffisance des médecins face aux contraintes budgétaires ?
– Y.EF : Le rapport de la Banque Mondiale, publié en juillet 2020, démontre comment une crise sanitaire s’est transformée en crise économique, mettant les budgets publics, les ménages et le tissu industriel sous pression, avec pour conséquence la récession économique de la quasi-totalité des pays, dont les plus industrialisés.
Le rapport sur l’indice du capital humain, publié par la Banque Mondiale en septembre 2020, attribue au Maroc une note de 0,50, inférieure à la moyenne de la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) et conclut que «si les conditions actuelles d’éducation et de Santé au Maroc persistent, un enfant né aujourd’hui sera, de moitié, moins productif qu’il aurait pu l’être si l’État lui avait assuré une bonne éducation et une bonne Santé».
Si la «bonne santé» peut coûter cher à la société, la «mauvaise santé» ou la perte de santé impactent de façon directe et négative l’économie de toutes les sociétés, quels que soient leurs niveaux de développement et d’industrialisation. La santé devrait être érigée comme priorité nationale pour avoir une souveraineté en matière de soins et des métiers de la Santé en général. Ceci a été annoncé à plusieurs reprises par notre Souverain au cours de ces derniers discours qui devraient constituer notre feuille de route.
Nous devons panser l’hémorragie causée doublement par le départ volontaire des médecins et l’exode de nos jeunes médecins vers les pays d’Europe et d’Amérique, en améliorant leur conditions de travail et de vie, en général, ce qui amènerait forcément nos compatriotes, actuellement installés à l’étranger, à regagner leur pays de naissance et de cœur qu’est le Maroc. Ce qui devrait être l’aboutissement d’une régionalisation avancée sans cesse rappelée par notre Souverain.
Dans ce contexte, relever le défi et réussir la formation de nos jeunes médecins nécessiterait une réforme de notre enseignement et un corps de médecins enseignants de qualité et en nombre suffisant. Le déficit aigu observé dans ce domaine pourrait être jugulé par une mise à contribution des médecins enseignants libéraux et des compétences marocaines à l’étranger, tout en instaurant une politique incitative pour les jeunes médecins désireux de suivre la voie universitaire et ce, quelle que soit la faculté qui les aurait formés, pourvu qu’ils soient compétents et motivés. Nous devons cesser les confrontations fratricides entre les étudiants de médecine des secteurs publics et privés, alors que les besoins de la nation en médecins sont énormes.
Quant à la contrainte budgétaire, elle me paraît inconcevable et en parfaite inadéquation avec les politiques de l’État visant à former plus de médecins pour couvrir les besoins de la nation.
A ce titre, nous souhaitons que la gestion des FMP soit du ressort du Ministère de la Santé et non du Ministère de l’Enseignement supérieur, afin de mieux gérer les besoins du pays en tenant compte des spécificités régionales et en y apportant les réformes qui s’imposent.
MD : Selon vous, «vouloir améliorer notre système de Santé à travers l’augmentation des dépenses de l’État serait contre-productif en l’absence d’une restructuration». Mais comment peut-on restructurer avec un budget qui représente 6% du budget de l’État ?
– Y.EF : Les maux de notre système de Santé sont, avant tout, d’ordre structurel et organisationnel avant d’être financiers. Plutôt que de plaider pour une augmentation conséquente du budget alloué à la Santé, nous devons d’abord remédier à ses insuffisances en adoptant une nouvelle architecture du parcours de soins et une gouvernance basée sur l’efficacité, l’efficience, l’économie et la qualité.
Vouloir améliorer notre système de soins, à travers la seule augmentation des dépenses de l’État, en matière de Santé serait contre-productif en l’absence d’une restructuration, voire d’une refonte de notre système de Santé. Il ne permettra que de juguler la charge des hôpitaux et de reporter pour les générations futures, les réformes structurelles pourtant nécessaires.
Nous sommes convaincus de la nécessité de revoir à la hausse le budget alloué par l’État au domaine de la Santé qui devrait arriver, à échéance, à 12% du BEG, contre seulement 6% actuellement. Nous sommes aussi convaincus que, sans une réelle réforme des structures et des mentalités, sans refonte de notre méthodologie d’enseignement et de nos unités de recherches, sans motivation du personnel médical et paramédical, sans mise en place d’une politique de Santé régionale, sans abolition des frontières entre les différents secteurs de soins au profit d’un PPP, sans une intégration et une généralisation du digital, sans actualisation de la TNR et généralisation de la couverture médicale, sans une gestion privée de la chose publique, aucun budget ne saurait améliorer notre système de Santé.
De la rigueur, de la bonne gouvernance, une gestion privée de la chose publique avec une meilleure optimisation des ressources humaines et techniques, la formation et la valorisation du personnel soignant, l’intégration du digital sous toutes ses formes, une réévaluation de la tarification nationale de référence à son juste prix, un parcours de soin préétabli et adapté aux besoins et aux disponibilités humaines et techniques de chaque région et non dicté de façon centrale comme c’est le cas actuellement, et tant d’autres choses, en somme, toutes logiques dans un système de Santé.
MD : En conclusion de votre plaidoyer, vous dites que «quand le Maroc veut, le Maroc peut». Est-il donc question de volonté politique selon vous ?
– Y.EF : Tout est question de volonté politique. Notre Souverain a, depuis toujours, donné la priorité au volet social, allant jusqu’à exhorter le gouvernement lors du discours du Trône, prononcé le 29 juillet 2020, à accélérer la cadence pour assurer une couverture médicale généralisée à l’ensemble des citoyens. Les Orientations Royales sont claires et constituent une feuille de route. La balle est dans le camp du gouvernement actuel et prochain. C’est ce que je sous-entendais par «volonté politique».
Enfin, la mise en application et la réussite de la couverture médicale pour tous les Marocains, comme cela a été dicté par la Volonté Royale, nécessiteraient de réformer profondément notre système de Santé et de soins afin de répondre avec acuité et équité aux besoins des citoyens, à travers toutes les régions du Royaume, mais aussi à faire face aux défis sanitaires actuels et futurs.