Le pire scénario ou comment le régime militaire algérien veut entraîner le Maroc dans une guerre régionale
Par Hassan Alaoui
Analyse – « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément ». Le proverbe est du poète français Nicolas Boileau. Nous le reprenons évidemment à dessein, parce que la situation au Maghreb, et c’est un euphémisme, l’impose tant il est vrai que les événements d’Algérie et accessoirement de la Libye nous inclinent à des interrogations graves.
Depuis l’arrivée à la Maison Blanche de Joe Biden en novembre 2020, les déclarations contradictoires semblent fuser à profusion quant à sa position sur la marocanité du Sahara, proclamée solennellement et par décret par son prédécesseur. Le lobby algérien, comme à son habitude, se mobilise et fait pression sur l’entourage du président des Etats-Unis pour le faire revenir au statu quo ante.
En vain, bien entendu, et le porte-parole du Département d’Etat américain, Ned Price, vient de réitérer mardi 23 février le soutien de son pays aux efforts du Maroc pour une solution au Sahara. Ce qui ne laisse aucun doute sur la volonté de son pays de soutenir le processus de règlement à travers la voie politique contenue dans le projet d’autonomie proposée par le Maroc au Conseil de sécurité de l’ONU en avril 2007. Cette déclaration de Ned Price reflète manifestement la position officielle du gouvernement américain, demeuré hermétique aux bavardages et à la propagande du gouvernement algérien et de ses stipendiés. En l’occurrence John Bolton, ancien et ombrageux conseiller de Trump, James Baker ou encore James Inhofe, les dirigeants de la Fondation Kennedy, à leur tête l’inoxydable Kerry Kennedy, réveillés aussitôt, et dont les génuflexions finissent par irriter jusqu’à ses meilleurs supporters.
On a dit et répété à satiété que le retour sur la décision de Trump à propos du Sahara marocain, s’il affole les dirigeants et les lobbies algériens, n’a jamais constitué une priorité voire même une préoccupation du gouvernement américain actuel. Et comme l’écrit mon confrère de « L’Observateur », Hakim Arif dans l’un de ses tweet, « on ne pouvait mieux attendre de Joe Biden de revenir sur Executif order d’une aussi grande importance .Le respect des institutions d’une part et celui du Maroc d’autre part sont réels ».
Le Maroc, allié stable et sûr
C’est en effet se méprendre sur la violation du principe de continuité de la politique des Etats-Unis dès lors qu’il s’agit de leurs intérêts suprêmes. Or, on a beau dire, mais le Maroc incarne de nos jours la stabilité et la sécurité dans la région du Maghreb et du Sahel. De surcroît il est l’allié et le pays ami des Etats-Unis depuis plus de 244 ans – autrement dit plus deux siècles. Dans la conflictuelle géopolitique sur laquelle réfléchissent les spécialistes américains, cette position du Royaume va au-delà de la simple compatibilité interétatique , elle s’inscrit dans une profondeur stratégique en Afrique même, continent adulé, convoité par la Chine et la Russie. Autant dire que sur le plan diplomatique, le Maroc s’est investi durablement dans sa zone de confort de partenaire, d’allié et d’acteur pour la stabilité et la promotion de la paix. En revanche, l’Algérie est confrontée à une situation dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle frôle – et le mot n’est pas vain – l’Apocalypse pour ne pas inquiéter une Amérique soucieuse de reconquérir son leadership mondial.
Le Maroc, allié politique et sécuritaire des Etats-Unis en Afrique ? Rien n’est plus sûr en effet que ce tropisme. Ce faisant, il ne saurait attendre de son grand allié américain une autre attitude. Il reste, en revanche, que les résolutions du Conseil de sécurité sont toujours en vigueur, elles confortent la position du Royaume quand bien même la propagande du régime algérien s’obstinent à soutenir le contraire.
Tandis que se propage le feu de la révolte à travers une Algérie bouillonnante et que l’Union européenne et plusieurs pays expriment leur inquiétude, le pouvoir algérien est plus que jamais défié, acculé . Plutôt que de résoudre les problèmes essentiels du pays, il s’obstine à entretenir la tension et à qualifier le Maroc de « pays colonial au Sahara », « d’occupant » en répandant sa propagande d’un autre âge et injustifiée, ses fake-news, en somme sa hargne instrumentaliée… Cela dit, le plus grave serait évidemment qu’au motif d’une menace « extérieure » factice, notamment du Maroc, inventée de toutes pièces, ce même régime algérien se lance dans une aventure militaire à ses frontières de l’ouest ! Tout nous pousse à prendre au sérieux cette hypothèse cataclysmique, le désarroi et l’arrogance d’un Saïd Changriha, général et soudard chamarré de « décorations », qui n’en finit pas de menacer notre pays, comme en témoigne la piteuse démonstration militaire organisée il y a quatre semaines à nos frontières, déployant chars, blindés, hélicoptères et tutti quanti…
Concomitamment, des déclarations ambiguës sont lâchées ici et là qui font croire que le président Biden est soumis à des pressions des lobbies pro-algériens afin qu’il annule le décret de reconnaissance par les Etats-Unis de la marocanité du Sahara. De Conrad Tribble, chargé d’Affaires de l’ambassade américaine à Madrid, à Bolton et James Baker, la rhétorique est la même. Récurrente et récusable. En viendrait-elle à bout de la patience de Biden qu’elle ne saurait aboutir, tant ce dernier est préoccupé par d’autres dossiers propres à une Amérique ravagée par la Covid-19 et exigeant une gestion prioritaire. D’aucuns n’hésitent pas à pousser le polisario à « faire la guerre au Maroc », non par la phraséologie traditionnelle et sémantique, mais par les armes…estimant que c’est le seul moyen de susciter une réaction de l’ONU et des institutions internationales.
Tropisme d’une guerre…
Si d’aventure et comme nous le pressentons , Joe Biden n’annule pas le fameux décret de reconnaissance de la marocanité du Sahara par l’Amérique, au grand désespoir de l’Algérie et de ses lobbies, cette dernière entend recourir à l’argument de la fatalité, du tout ou rien…Elle fera sien cet apocalyptique argument de Carl von Clausewitz, le théoricien allemand de la guerre, selon lequel « La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ». Les paradigmes d’un conflit ouvert et direct étant à cette étape peu perceptibles sur la scène maroco-algérienne, il convient en revanche de mettre en exergue ses relents : le Hirak qui célèbre son deuxième anniversaire pousserait ainsi le président Tebboune et son armée à remettre sur selle les anciens caciques militaires, les généraux Toufik Meddine, Tartag, Nizzar et autres et pousser à nouveau le polisario à proclamer « la guerre totale au Maroc » – il ne s’en prive point – à partir de la Mauritanie, considérée par les militaires algériens comme le « maillon faible ». Si cette hypothèse semble si fictionnelle voire irréaliste, elle constitue, semble-t-il, une hypothèse âprement discutée au niveau de l’état-major algérien et la seule voie dont celui-ci dispose, pris à la gorge qu’il est par l’inconnue du Hirak et par le verrouillage militaire au sud, et le verrouillage diplomatique conséquent au succès du Royaume du Maroc.
Le tropisme d’une guerre est omniprésent, ne serait-ce que parce que les militaires qui gouvernent et dirigent l’Algérie depuis juillet 1962, après avoir éliminé les vrais patriotes civils qui ont libéré leur pays, n’imaginent leur existence et surtout leur survie qu’en entretenant le mythe de « l’ennemi historique » et du bouc émissaire que sont le Maroc et son peuple.