Le PJD et ses ambitions électorales
C’est devenu une antienne. Depuis quelques mois, on n’arrête pas de nous prédire le pire : imminents attentats de Daech, radicalisation et islamisme rampant, violences et incivisme qui se développent à une vitesse plutôt inquiétante, corruption en hausse qui gangrène administrations, instances diverses et parfois jette des responsables en pâture…On n’en finit pas de se lamenter, alors que l’échiquier se dévoile en douce…
Que dire, à quelques semaines des élections communales et régionales ? Qu’espérer plutôt d’un scrutin qui devrait clôturer un cycle de votes qui, les échéances électorales professionnelles en témoignent, ne semblent susciter apparemment aucun intérêt auprès de l’opinion publique ? Sauf à se méprendre d’une ambiance plutôt morose, l’enthousiasme n’y est pas. Tout comme au dernier vote, notamment celui de novembre 2011 qui a vu le Parti de la Justice et du développement (PJD) arracher le score et se prévaloir d’une courte majorité.
Or, l’analyse qui était suggérée à l’époque, valable jusqu’à preuve du contraire, est que l’abstentionnisme rédhibitoire des votants – 62% – avait bel et bien favorisé le parti de Abdelilah Benkirane. C’est d’autant plus vrai que les troupes du parti islamique, à la différence de l’opinion lambda, sont disciplinées, obéissent aux consignes de vote et se rendent aux urnes comme une armée. Il est vrai, aussi, que pressentant pour la première fois la victoire, le PJD a organisé une mobilisation sans commune mesure avec celles de ses adversaires, en termes de communication, de battage et en se présentant comme un parti islamique « modéré » !
Les appels à l’inscription sur les listes électorales ne cessent d’entonner, aujourd’hui, le même refrain ! On agite le spectre du maintien du statu quo, autrement dit d’une reconduite des mêmes aux plan local et régional. Majorité et opposition battent le haut du pavé, et depuis que le Conseil du gouvernement a adopté, le 7 mai dernier, le projet de Loi organique 32-15 qui modifie et complète la Loi organique 28-11 portant sur la Chambre des Conseillers, ainsi que la Loi organique 11-59 pour l’élection des conseils des collectivités locales, des alliances virtuelles semblent s’être nouées…Le même jour donc verra la double élection régionale et communale. La représentativité des femmes atteindra 27% eu égard aux scrutins précédents qui les avaient marginalisées…Les anciens détenus et ex-trafiquants de drogues aussi, sont autorisés à se présenter…
Quelle est la stratégie de l’une ou l’autre formation politique dans cette nouvelle arène que constituent les élections régionales et communales ? L’on sait que, surfant sur sa lancée de novembre 2011, le PJD entend ratisser large ! Mais, plus que cela : il entend s’enraciner dans le tréfonds des communes et conquérir ce Maroc profond qui est à son programme idéologique et politique ce que le vivier est à son épanouissement. Depuis 2007, en effet, et même au-delà, le parti islamique creuse le sillon et ne cache pas ses ambitions de transformer – même touche par touche – la société marocaine, ses hommes et ses femmes. Il se heurte à une résilience diffuse, peut-être même à présent à une résistance organisée…Majoritaire dans la majorité, à l’épreuve du pouvoir, soumis à une critique virulente par une partie de l’opinion déçue, ravagé par un certain nombre de scandales de mœurs, pourrait-il encore prétendre rafler la mise aux régionales et communales ?