Le Maroc se prépare d’une façon exceptionnelle pour passer des énergies d’origine fossile aux énergies renouvelables
Propos recueillis par Idriss TEKKI
Le Maroc se prépare d’une façon exceptionnelle pour relever le défi du passage des énergies d’origine fossile à des énergies renouvelables non polluantes amies de l’environnement, a estimé le physicien et inventeur marocain, Rachid Yazami.
« Le Maroc se prépare d’une façon exceptionnelle notamment avec un projet ambitieux visant à atteindre 52% de la production énergétique électrique en énergies renouvelables à l’horizon 2030 », souligne dans un entretien à la MAP le scientifique, créateur d’une puce capable de recharger les batteries des smartphones et les véhicules électriques en dix minutes seulement.
Selon lui, le monde vit une révolution énergétique où l’Humanité va passer des énergies dites non renouvelables (hydrocarbonés) aux énergies renouvelables (solaire, éolien et hydraulique), notant que cette évolution doit s’accompagner de la formation de spécialistes au niveau des universités et des académies et d’investissements pour doter le Maroc d’une infrastructure industrielle liée à ces opportunités extraordinaires dans les énergies renouvelables.
« C’est l’avenir, le Maroc n’a pas d’autre choix que d’aller de l’avant, car on sait que dans 50 ans ou moins, les prix du pétrole atteindront des niveaux non abordables au moment où l’Humanité aura toujours besoin de se déplacer, de se chauffer … donc l’énergie est indispensable. Il faut être au rendez-vous », remarque M. Yazami, le premier marocain et africain à recevoir le prestigieux prix Draper de l’Académie nationale américaine d’ingénierie à Washington.
« C’est très ambitieux et en même temps ça crée une culture locale au Maroc qui peut être exportable », relève M. Yazami, en marge de sa participation vendredi à l’Académie Hassan II des sciences et techniques à un séminaire sur les « énergies renouvelables et efficacité énergétique: de la recherche à l’innovation ».
SM le Roi Mohammed VI a ouvert le Maroc à l’Afrique, a-t-il rappelé, notant que l’expertise marocaine peut être exportée au bénéfice et de l’Afrique et du Maroc, ce qui constitue des opportunités absolument « uniques, extraordinaires et historiques ».
Le Royaume est en train de mettre en œuvre sa stratégie énergétique étape par étape, pour atteindre dans une première phase 6 gigawatts de puissance d’ici 2020, souligne-t-il, notant que déjà la centrale d’Ouarzazate est opérationnelle depuis presque un an, et c’est à partir de l’expérience acquise à Ouarzazate que les autres unités ou centrales vont être développées au Maroc.
Le Royaume jouit d’un climat ensoleillé presque toute l’année, de vent presque dans toutes les régions qui peut être exploitable ainsi que de barrages et des milliers de kilomètres de côtes pour produire de l’énergie hydraulique, fait-t-il observer, soutenant que ce projet énergétique est un atout pour le développement local, car il permettra aux populations de bénéficier d’une énergie bon marché, durable et non polluante.
Ces projets permettront au Maroc de passer de 97% de dépendance énergétique à un exportateur d’énergie dans un avenir proche, relève M. Yazami, notant que le Royaume va devenir indépendant et exportateur d’ici une génération.
Le Maroc, qui est parti de très bas, a réalisé des progrès importants, à la faveur notamment d’incitations aussi bien des pouvoirs publics que des industries qui s’installent dans le royaume pour faire des R&D et pour qu’il y ait des relations institutionnelles entre l’industrie et la recherche scientifique académiques dans les universités.
« Ça se développe de plus en plus et je suis très heureux que le nombre de brevets déposés au Maroc a plus que triplé ces dernières quatre années, ça veut dire qu’il y a de l’innovation et qu’il n’y a pas de raisons pour que le Maroc soit en retard par rapport à ça. Des chercheurs tout à fait brillants, créatifs et innovants, ça augure d’un avenir très brillant, dit-il.
Evoquant son domaine de recherche, il a fait savoir que la demande des performances des batteries fait qu’on est obligé d’explorer de plus en plus les frontières de la science et de la connaissance dans le domaine des matériaux qu’on va utiliser dans les batteries pour augmenter leur énergie (comment obtenir deux fois plus d’énergie d’une batterie de la même taille).
« L’autre problème très crucial est lié au besoin de recharger les batteries en 5 minutes », explique-t-il, ajoutant qu’il s’agit d’un défi majeur pour la communauté scientifique qui tente de développer des chimies rapide pour pallier à ce problème, notamment pour les voitures électriques, chose qui n’est pas possible actuellement.
Le problème touche aussi d’autres secteurs, en particulier l’informatique, car il faut gérer un réservoir d’énergie de la manière plus intelligente et plus efficace, indique le chercheur, expliquant que c’est toute l’industrie du silicium et des microprocesseurs qui est concernée car il s’agit de pouvoir développer des logiciels et des algorithmes permettant d’avoir une efficacité plus importante.