Une équipe internationale découvre les plus anciens Homo Sapiens au Maroc
Une équipe internationale, dirigée par le Pr Jean-Jacques Hublin de l’Institut Max Planck d’Anthropologie Evolutionnaire (Leipzig, Allemagne) et le Pr Abdelouahed Ben-Ncer de l’Institut national d’Archéologie et du patrimoine de Rabat, vient de découvrir les plus anciens Homo Sapiens à Jebel Irhoud au Maroc.
Les découvertes de Jebel Irhoud font reculer les origines de notre espèce de 100.000 ans et révèlent un scénario évolutif complexe de l’humanité qui implique l’ensemble du continent africain, ont-ils souligné lors d’une conférence de presse à Paris, précisant qu’elle démontrent qu’il y a 300.000 ans, d’importantes modifications biologiques et comportementales avaient déjà eu lieu chez nos ancêtres directs à travers l’Afrique.
Les données génétiques sur les populations actuelles comme les trouvailles paléontologiques désignent sans ambigüité l’Afrique comme le continent d’origine de notre espèce Homo sapiens, ont-ils dit, expliquant que les restes fossiles découvertes sont celles de 3 adultes, un adolescent et un enfant.
« L’Afrique du Nord a longtemps été négligée dans les débats entourant les origines de notre espèce. Les découvertes spectaculaires de Jbel Irhoud démontrent en fait les connections étroites entre le Maghreb et le reste du continent africain à l’époque de l’émergence d’Homo sapiens », a indiqué M. Ben-Ncer.
« Nous avons pris l’habitude de penser que le berceau de l’humanité moderne peut être localisé en Afrique de l’Est il y a 200.000 ans, mais nos travaux démontrent sans ambigüité qu’Homo sapiens était probablement déjà présent sur l’ensemble du continent africain il y a 300.000 ans. Bien longtemps avant la sortie d’Afrique d’Homo sapiens, il y a eu une dispersion ancienne à l’intérieur de l’Afrique », a affirmé, de son côté, le paléoanthropologue Jean-Jacques Hublin.
Le site marocain de Jebel Irhoud est connu depuis les années 1960 pour des découvertes de restes humains et ses outillages de « Middle Stone Age ». Cependant l’interprétation des hommes de Jebel Irhoud a longtemps été obscurcie par l’imprécision persistante qui entourait leur âge géologique. Les nouvelles fouilles entreprises dans le site à partir de 2004 ont livré de nouveaux fossiles d’Homo sapiens in situ. Leur nombre est passé de 6 à 22, faisant de Jebel Irhoud le plus ancien et le plus riche gisement africain du « Middle Stone Age ». et documentant la première phase évolutive de notre espèce.
« En Afrique, les sites bien datés de cette période sont exceptionnellement rares et il est très heureux que le site de Jebel Irhoud ait préservé autant de silex brulés », a affirmé, de son côté l’expert de géochronologie de l’équipe Daniel Richter.
Selon les chercheurs, les hommes de Jebel Irhoud possèdent déjà une face et une denture d’allure moderne et aussi une boîte crânienne de grande taille mais avec une forme oblongue et par certains aspects archaïques.
L’équipe a utilisé les techniques avancées de la tomographie informatisée et de l’analyse statistique de forme sur des centaines de mesures tridimensionnelles pour montrer que la morphologie faciale des fossiles de Jebel Irhoud est presque indiscernable de celle des hommes actuels.
La morphologie et l’âge des fossiles de Jebel Irhoud confirment l’interprétation d’un fragment crânien énigmatique provenant de Florisbad en Afrique du sud et âgé de 260.000 ans comme un autre jalon ancien de notre espèce.